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 élévation

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Parcours initiatique Philosophico-Spirituel à travers mes rencontres et lectures liées au paranormal et à l'ésotérisme.


Les Lettres d'Anne-Marie

Publié par Yann-Erick sur 15 Juillet 2007, 12:16pm

Catégories : #réflexions

Anne-Marie D. (née en 1927) m'a demandé de diffuser ses écrits au sujet de sa compréhension de Dieu à travers sa vie.

annemarie2
Anne-Marie (1970)
 

Après ses trois premiers tomes (qu'elle partage ci dessous,
"puisqu'aucun éditeur ne lui a encore répondu positivement") suivent
 d'autres écrits qu'Anne-Marie D. a bien voulu me transmettre aussi:

- "Ce qui m'est arrivé en 1983"
- "Lettres en 1983"
- "Lettre de 1990 à 1992"
- "Incarnation = Dieu-Homme"
- "La Clef"
- "Genèse"
- "Réflexion"
- "Judas"

Les lettres d'Anne-Marie (Tome 1)

A mes parents à qui je dois Tout.
Pour mes enfants à qui je dois Tout.
Et ce Tout, c’est Toi, mon Seigneur et mon Dieu !


"Je ne suis certain de rien, si ce n’est de la sainteté des affections du coeur et de la vérité de l’imagination. La beauté saisie par l’Imagination doit être Vérité.
L’Imagination peut être comparée au rêve d’Adam : Adam s’éveilla et le trouva vrai. ! "

(Lettre de Keats à Bailey)


Prologue


– Franz Liszt a dit de Schubert : « Les anges parlaient dans sa tête et Schubert les entendaient.»
Il y a quelque temps, dans une interview à la radio du grand violoniste Isaac Stern, celui-ci a prononcé une phrase qui m’a beaucoup frappée : « Le talent est “ ce que ” possède l’homme ; le génie est “ce qui ” possède l’homme ».
Eh bien ! Vois-tu, j’ai la quasi certitude qu’il faut prendre ces deux phrases (entre beaucoup d’autres) au pied de la lettre !... car pour peu que l’on y réfléchisse, entre : ce que – ce qui – il y a là un monde qui donne le vertige ! C’est incontestable...
Et si c’était absolument vrai ? L’homme dans son humanité “normale”, ne pourrait
par lui-même devenir un génie, sauf s’il était “possédé ” par celui-ci. Il ne faut pas
oublier qu’avant notre civilisation, les Anciens donnaient le génie comme une
divinité, un “esprit ” présidant à la vie de chacun. Ce n’est peut-être pas par hasard que l’orgueil de l’homme moderne a oblitéré cette donnée. D’un grand haussement d’épaule il a rangé cela dans le fourre-tout de la mythologie ou de la légende ! C’est tellement plus pratique quand on a la Science. Mais les Grecs d’avant notre ère n’étaient tout de même pas des imbéciles : Platon, Aristote, pour ne citer qu’eux, deux mille cinq cents ans après leur éphémère existence, servent toujours de références à la philosophie, même si la Science s’est détachée de celle-ci pour devenir une Entité bien réelle qui ne veut plus s’appuyer que sur l’expérience.
Quelqu’un d’autre tout de même, au siècle dernier est revenu sans même s’en
douter à cette “mythologie ”, car je pense que sa démarche n’avait rien à voir avec elle. C’est Freud qui l’a en quelque sorte intériorisée dans sa définition du “Ca ”, du “Moi” et du “Surmoi ”. Et c’est là que par association d’idées, le déclic se produit...
– C’est un raccourci assez saisissant ! Qu’en concluez-vous ?
– Que je te dise tout de suite que je n’ai jamais rien lu de Freud – je n’ai rien à voir avec lui ; tout ce que je sais de lui, c’est ce concept de base : ça – moi et surmoi.
Cela a fait “tilt” et je l’ai repris pour une tout autre interprétation. Donc, conclusion est un bien grand mot ; disons que ces phrases entendues récemment, n’ont fait
qu’apporter de l’eau à mon moulin, ce moulin qui tourne dans ma tête depuis plus
de trente ans. Je veux dire, que si j’ai pu bâtir une hypothèse et non pas énoncer
une conclusion, c’est grâce à ces petites phrases, glanées surtout dans les livres,
ou attrapées au vol, quand elles sont exprimées. Elles sont venues conforter ce
que j’appellerais une “Intuition ”. Intuition qui est à la base du long cheminement
qu’ont été ces trente dernières années. Mais cheminement vers Dieu, ne l’oublie
pas.
– Comment pourrais-je l’oublier ! Je vous ai connue en 1976, j’ai su ce qui vous
était arrivé en 1970, vous m’en avez souvent parlé : cette illumination après une
longue quête désespérée de Dieu...
– « Dieu seul et rien d’autre » ; comme j’aime ces mots de Simone Weil philosophe
et mystique qui les a assumés jusqu’à se laisser mourir ; tant il est vrai que
lorsqu’on a “trouvé ” Dieu, plus rien ne compte.
– Mais vous ?
– Moi ? Tu veux dire comment se fait-il que je sois toujours là ? Tu sais ma petite
fille, je peux dire comme Jeanne d’Arc : « Messire Dieu premier servi », il n’en reste pas moins que j’ai une conscience très aiguë de mon devoir d’état. Cela peut paraître vieux jeu, mais il me semble logique de penser que si Dieu m’a justement mise sur cette terre, c’est parce que j’y ai un devoir à accomplir.
– Une mission en quelque sorte ?
– Comme tu y vas !... Non, je pense simplement à la vie de tous les jours parmi
ceux qui peuplent mon microcosme. Ma “petite voie ”, comme disait ma chère
Thérèse de l’Enfant Jésus. Dans mon éthique, il n’y a pas place pour la désertion.
Rester à son poste est pour moi une loi qui ne souffre aucune dispense, même si
“me muero porque no muero ! ” – “je me meurs de ne pas mourir ” comme
s’exclamaient l’autre Thérèse, celle d’Avila et mon maître spirituel St Jean de la
Croix. Je pense aussi que l’on n’a pas le droit de prendre le ciel d’assaut. Dieu
sait mieux que nous ce qui nous convient, il faut s’en remettre à sa divine
Providence ; je ne veux que Sa Volonté. C’est pour cela...
– Pour cela ?
– En fait, quand tu parles de mission, je ne te cacherai pas qu’après les
événements de 1970 ... et tous les autres, j’ai longtemps pensé que Dieu attendait quelque chose de moi. Quelque chose de concret, où j’essaierai de transmettre la grâce immense dont Il m’a comblée. Un livre, peut-être, mais il y en a tant... Et puis, comment le dire ? Comment le dire ?...
– Dire quoi ?
– L’Incroyable Amour de Dieu pour nous – qui est la seule réponse à connaître, qui est la seule chose à savoir de Lui. Ce Dieu que j’avais si longtemps cherché... ni des philosophes, ni des savants, mais d’Amour ! Comme je voulais le dire !
Comme je voudrais le dire, mais comment ? Si tu voyais tous les gens malades
autour de toi et que toi seule aies le remède, ne souhaiterais-tu pas le donner à
tous ? Quelle torture de ne pouvoir le faire !
Comme tu le sais, je n’étais pas crédible, puisque internée dix jours et dix nuits à la suite de ma “bouffée délirante mystique ”. A défaut, j’avais au moins appris
l’humilité... “C’est Jésus qui a tout fait”, me répétais-je; “qu’as-tu de plus à dire qui
n’ait déjà été dit ?...”
Au fil du temps, des illuminations et des longs tunnels noirs, j’ai appris à me taire.
J’ai vécu seule, absolument seule avec cette terrible interrogation : suis-je folle ?
Que m’est-il réellement arrivé ? Personne, ni médecins, ni prêtres, n’ayant
seulement essayé de donner la moindre explication à ce qui, manifestement, ne les intéressait pas.
Et aujourd’hui, j’ai “découvert ” Saint Jean de la Croix. Quelle merveilleuse
récompense, après ces trente longues années de traversée du désert !... Enfin, une réponse m’est donnée, par quelqu’un ayant quitté cette terre très exactement il y a quatre cents ans. N’est-ce pas incroyable ? Quelqu’un qui décrit, (pas dans ses moindres détails, car, ainsi qu’il le dit lui-même, chaque expérience de Dieu est unique et personnelle), l’état dans lequel je suis depuis 1970 ; quelqu’un qui me rassure, qui me prend par la main et qui redit pour moi seule, ce qu’il a écrit pour toutes les âmes qui lui étaient confiées, les faisant bénéficier de sa propre
expérience.
Si tu savais le bonheur qui m’a été donné ; quelle joie m’a inondée ; quelle paix m’a envahie ! Et je sais comment remercier Dieu de m’avoir ainsi confiée à saint Jean en faisant mienne cette maxime qu’il a écrite voici plus de quatre cents ans et qui peut tout aussi bien s’adresser à moi :
“Ce que vous prétendez et ce que vous désirez le plus, vous ne le trouverez point
par cette voie qui est vôtre, ni par la contemplation sublime : mais dans une
profonde humilité et une grande soumission de coeur ”.
– Comprends-tu à présent ma décision de silence ? Comment ne pas faire mien ce précepte, ce conseil qui par la grâce de Dieu, est arrivé jusqu’à moi après plus de quatre siècles. Je me dois d’obéir, c’est le moins que je puisse faire.
– J’admets que vous ne vouliez pas ou ne puissiez pas raconter votre expérience.
Pourtant, vous savez combien j’ai été touchée, concernée par ce que vous m’en
avez dit. Je sais que vous avez beaucoup écrit à ce sujet...
– J’ai brûlé beaucoup de ces papiers.
– Mais il vous en reste. Donnez-les moi si vous le voulez bien, j’essaierai de les trier, de les mettre en ordre. Certaines personnes seraient peut-être heureuses de les lire ; cela pourrait leur apporter quelque lumière, comme St Jean de la Croix l’a fait pour vous ? Et toutes ces lettres que vous avez écrites aux uns et aux autres, qui sont toujours restées sans réponse. Je sais que vous avez gardé les brouillons.
N’est-ce pas là l’occasion de les mettre au jour ? Pourquoi tous ces gens ne vous ont-ils jamais répondu ? Ce que vous m’en aviez confié me donne à penser qu’elles méritaient au moins un accusé de réception ! Dois-je attendre votre mort
pour en faire quelque chose ?
– Ma petite fille, j’admire ta bonne volonté, ta confiance en moi surtout. Laisse-moi un peu de réflexion... Mais ne crois-tu pas que nous sommes bien loin de notre sujet de conversation de tout à l’heure ?
– Ah oui ! Les anges qui chantaient dans la tête de Schubert ! – et le génie est ce qui possède l’homme ! Pas si loin que cela après tout... Dieu… les anges...
– Tu sais, il n’y a plus grand monde qui croit en Dieu et peut-être encore moins aux anges. Et pourtant, Bernard Shaw écrivait : « Les électrons ont une fonction
indispensable... et ils sont aussi invisibles que les Anges !... » Nous pourrions
inverser la proposition et écrire : « Les Anges ont une fonction indispensable, cependant ils sont aussi invisibles que les électrons ! » Notre passé témoigne pourtant à bien des reprises de leur existence. Faut-il penser que nos ancêtres étaient à ce point crédules, voire idiots, pour se laisser abuser par de grossières tromperies ? D’autre part, nous, gens du vingtième siècle, avons tendance à ne même plus croire ce que nous voyons. Paradoxalement, le doute est devenu notre seul critère !... Et pourtant il suffit d’un peu de réflexion. Comment peut-on penser que l’homme est le dernier mot de tout ? Quel orgueil insensé nous fait nous placer en haut de l’échelle ? Il y a probablement moins de différence entre le protozoaire et nous, qu’entre nous et Dieu. Nous sommes peut-être la chose la plus achevée dans le monde perceptible de la matière, mais après ? Qui oserait aujourd’hui prétendre que cela s’arrête là ? Les scientifiques eux-mêmes, disent qu’il y a Quelqu’un. Et entre ce Quelqu’un et nous, il n’y aurait rien ? Quelle aberration !
Quel aveuglement insensé ! Notre pauvre petit esprit confronté en direct avec l’Esprit Incréé ?... Heureusement qu’il y a des intermédiaires, qu’on les appelle anges ou non.
Et c’est ici que commence à se formuler mon hypothèse. Il y a bien longtemps que je la pèse et la soupèse. Tantôt je la renvoie au bric-à-brac de mon imaginaire, tantôt à la suite d’une phrase, comme celle de Stern par exemple, un déclic se produit et une pièce du puzzle vient se mettre à sa place.
– Un puzzle ?
– Celui que j’essaie de reconstituer depuis trente ans. J’ai l’impression de toucher
au but, que bientôt le dessin va se trouver achevé, et que nous pourrons voir...
– Voir ? Quoi donc ?
– C’est bien ce qui me fait peur. Ai-je le droit de pénétrer ce secret ? A bien des
reprises, j’ai eu tellement l’impression que tout se liguait contre moi pour m’empêcher de parler. Qu’en serait-il cette fois ? Bien sûr ce n’est qu’une hypothèse, mais avons-nous le droit de formuler et surtout d’écrire ce qui peut-être, pourrait être nuisible à certains ?
– C’est vous qui en êtes juge.
– Oui mais voilà où est le vrai problème, la question a déjà été posée : peut-on être juge et partie ?...
En attendant de trouver la réponse, je voudrais que tu lises quelques lettres de mon père qui m’ont certainement aidée à être ce que je suis. Tu verras la chance que j’ai eue d’avoir un père qui m’a tracé un tel chemin. Que je te dise auparavant qu’il avait des raisons de s’inquiéter pour moi.
J’étais affreusement romantique, je dévorais les livres de Delly ou Max du Veuzit, vivant dans un univers “à l’eau de rose ”, n’imaginant même pas que la vie était tout autre chose ! Et pourtant c’était la guerre, et crois-moi, en pleine ville de Lille, ce n’était pas un roman, mais bien une dure réalité qu’il nous fallait affronter tous les jours ; entre les bombardements dont j’avais une peur affreuse, qui nous faisaient passer des heures à la cave, tant dans la journée et les heures scolaires, que pendant la nuit. Les queues pour le difficile ravitaillement avec les tickets de rationnement ; le Secours National, où, à quatorze ans j’apprenais à faire des pansements ou à déblayer les décombres des maisons écrasées par les bombes !
Les privations de toutes sortes... – Ou peut-être était-ce à cause de cela ? Toujours est-il que lucide sur cet état de choses (à onze ans en 1940, regardant un combat d’avions au-dessus de nos têtes, je pleurais en disant : il y a des hommes là-haut qui vont mourir !), je n’en continuais pas moins de rêver... à quoi rêvent les jeunes filles ?... À l’Amour avec un grand A !... pour le reste, j’étais aussi ignorante qu’une enfant de cinq ans !
Pendant les cours de math que je n’arrivais pas à suivre, étant passée de
quatrième en seconde, je “faisais des vers ” en soupirant, regardant l’unique arbre se découpant sur le ciel de la cour...
Et j’abandonnais l’école trois mois avant le bac, les professeurs eux-mêmes ayant
reconnu qu’il était au-dessus de mes forces que je puisse comprendre quoi que ce soit à la trigonométrie !...
Je composais au piano (misérablement !) une “oeuvre ” que j’avais intitulée :
“Orage dans un coeur”, qui ressemblait vaguement à la première ballade de Chopin, (je ne l’ai su que plus tard, car à 16 ans, je ne l’avais jamais entendue...).
Je tombais amoureuse de tous les garçons qui avaient la gentillesse de me sourire, et versais des torrents de larmes quand je réalisais que ceux-ci ignoraient jusqu’à mon existence... Alors, je déversais mon chagrin dans des poèmes (en alexandrins, s’il te plaît !). Tiens je me souviens de l’un d’eux écrit justement dans cette affreuse colonie de vacances, (où je découvris mon père dans ces lettres que je veux te faire lire) il se terminait par un pompeux ; “Je n’ai pas dix-huit ans et je voudrais mourir !”– je ne savais pas que j’allais être presque exaucée !
Je peux te dire tout cela avec beaucoup d’ironie à mon endroit aujourd’hui. Mais sache qu’il y a près de cinquante ans, j’étais vraiment ce que je viens de te dire, une romantique complètement hors de son siècle et de la vie de tous les jours...
Pourtant ma souffrance était bien réelle. Quand je pense à cette période aujourd’hui, qui en fait ne s’est terminée que bien après mon mariage, par la force des choses, car un jour il faut bien atterrir, je sais à présent que j’étais née “comme ça ”
– on n’y pouvait rien. Rien ni personne n’avait cultivé cette fleur du romantisme, elle avait poussé toute seule, c’était ma nature : j’étais à 18 ans toujours la même que l’enfant de quatre ans qui disait à une de ses tantes : “Je voudrais bien cueillir des fraises dans la neige, cela doit être si joli ! ”.
A présent, je comprends vraiment l’inquiétude de mon père à mon sujet. Quant à ma mère, toujours positive et pleine d’un grand bon sens, elle me disait : “Garde tes larmes pour plus tard, grande sotte ”...
Donc, c’était après la guerre, en 1946, ... J’avais dix-sept ans, et j’étais partie comme “monitrice ” de colonie de vacances. Pour la première fois, j’étais à des centaines de kilomètres de la maison et tout ne marchait pas pour le mieux dans cette galère...

Les lettres de papa


- Dimanche 18 août 1946
J’ai été un peu surpris – pas trop – de tes déboires ; parce que connaissant ton inexpérience et tes illusions, je me doutais bien que tu buterais sur des obstacles imprévus ou insuffisamment évalués.
Malgré cela, si je suis ennuyé pour toi et crains que tu ne te décourages trop vite, d’un autre côté je ne suis pas fâché que tu prennes cette leçon de choses vécues, qui t’aidera – je l’espère – à apprécier le côté et le sens réels de la vie courante, que tu ne connais pas encore et qu’il faut cependant, bon gré, mal gré, voir et comprendre... car tout le monde y passe !
Je souhaite cependant, que la désillusion ne soit pas trop forte et ne te fasse pas tomber des nuées dans un terre à terre déprimant et avilissant. Il faut apprendre à tirer le bien du mal, ne pas passer d’un extrême à l’autre, mais être compréhensif et profiter des enseignements reçus ou imposés pour tirer des conclusions adéquates. Garder son idéal et sa bonne volonté, ne pas vouloir faire plier les gens et les événements à sa fantaisie, mais s’adapter aux circonstances imparfaites, sans se croire soi-même parfait : en un mot, suivre la voie droite, toujours tout droit !
Encore une recommandation : n’insiste pas outre mesure si la stricte discipline est impossible à faire observer ; mais néanmoins n’abandonne pas la partie et ne néglige pas tout :
tu as une responsabilité morale et matérielle qu’il ne faut pas perdre de vue. J’espère que tout cela s’arrangera. (...)

- 25 août 1946
Tes lettres m’ont causé – tu le penses bien – un très grand plaisir, et un plaisir très particulier, un peu ému, car elles m’ont révélé quelque chose de toi que je ne connaissais pas, que je ne soupçonnais même pas. Est-ce l’éveil du sentiment religieux ? Est-ce l’expression de ce qui existait déjà, mais ne se manifestait pas faute de l’occasion, du choc qui déclenche le ressort ? Est-ce seulement un accès de sentimentalité ?...
Car tu es sentimentale : je m’en doutais, malgré tes allures indépendantes et souvent
entêtées, et j’en ai bien la preuve par tes épîtres... sans t’en faire un reproche !
Je regretterais, je l’avoue, qu’il n’y ait eu chez toi qu’un accès, une petite fièvre de religiosité, provoqués par la déception, le désarroi de l’esprit et de l’âme nostalgique. Dieu n’est pas seulement le refuge des êtres attristés et désemparés : consolateur suprême des affligés,
guérisseur incomparable des malades, il est aussi et il doit rester toujours le soutien et le guide des bien portants ; il est la Voie, la Vérité et la Vie ; avec Lui, aucun risque de se tromper ou de s’égarer, même si le but reste caché, si les moyens sont durs et si le doute tente de s’insinuer.
Sans Lui, tout n’est qu’illusion, duperie, vanité ; et l’âme qui a cru pouvoir s’en passer, ne fût-ce qu’un instant, s’aperçoit bientôt de son erreur et revient à Lui, trop heureuse qu’Il veuille bien encore l’accueillir.
Garde donc l’idée de Dieu, la pensée de Dieu, l’aspiration à Dieu, l’amour de Dieu
dans la joie comme dans la tristesse, dans la sérénité comme dans l’épreuve, dans tous les actes de ta vie : Dieu est le sens de la vie, Dieu est la joie de la vie, Dieu est le bonheur.
Remercie-le, si tu as pu le comprendre ; mais non pas comme le pharisien en t’estimant au-dessus d’autres moins favorisés ; mais plutôt humblement comme le publicain –
en reconnaissant que rien ne te désignait spécialement pour cette grâce ; et demande-lui de
l’étendre de plus en plus aux autres déshérités.
Tu as d’ailleurs compris que si tes gosses de la colonie sont des “voyous ”, des
“mécréants ” – pour reprendre ton expression favorite – ce n’est pas entièrement de leur faute.
Tu le dis toi-même : la plupart sont des enfants d’alcooliques, lesquels sont à leur tour les
descendants d’autres dégénérés. Vois-tu, il faut beaucoup moins les condamner et les mépriser que les plaindre. Je crois sincèrement que même lorsqu’ils commettent de grosses fautes, voire
des crimes, ils sont en général moins coupables aux yeux de Dieu que celui qui, favorisé de la lumière et de la grâce divines, commet sciemment une faute légère : celui-ci sait, eux ne savent
pas.
Notre devoir à nous, c’est d’essayer de leur faire comprendre, doucement, humblement même, avec précaution, et surtout de leur donner l’exemple, sans nous décourager, même si nous ne voyons pas le résultat : le bien est une semence sûre qui germe toujours et porte toujours ses fruits, tôt ou tard. (...)

- 1er septembre 1946
(...) Quand je te parlais de l’éveil du sentiment religieux chez toi, je ne pensais
nullement à la “vocation”, je n’en ai pas eu la moindre idée et ne me fais pas d’illusions à ce sujet.
Je voulais seulement dire que, jusqu’à présent, la religion – notion exacte, conviction, mise en pratique – me paraissait n’avoir tracé en ton âme qu’un sillon très superficiel ; et j’en ai souffert parfois, demandant à Dieu que l’impression fût plus nette et plus profonde, la connaissance plus exacte, l’effet plus perceptible.
Il m’a semblé que le ressort s’était déclenché ; j’en ai été très agréablement surpris, charmé, ému. J’ai souhaité et souhaite de toute mon âme que ce ne soit pas seulement une étincelle, une flambée d’un jour, mais la flamme qui illumine et anime toute une vie. Si cela est,
tu n’auras pas besoin de conserver et de relire mes lettres, qui, par elles-mêmes ne sont que de pauvres mots, maladroitement assemblés, exprimant mal les pensées d’une nature renfermée – que tu as devinée – les idées d’un homme trop borné pour connaître les hommes et
les choses, car il ne se connaît pas lui-même !
Je te quitte non sans t’avoir redit : courage et bonne humeur ! Ferme les yeux le plus possible sur les ennuis, ne les analyse pas trop, ne les grossis pas surtout : tu en verras bien d’autres dans la vie, auprès desquels ceux-là te feront sourire ; garde la joie et la charité
chrétienne. Fais ce que dois, advienne que pourra !(...)

- 15 septembre 1946
(...) Pauvre chère fille sentimentale ! Une fois de plus, tu me fais bien penser à tante
Céline qui, lorsqu’elle vivait avec son frère abbé et moi-même dans l’Isère, ne songeait qu’à
son cher Nord et ne rêvait que de la maison paternelle. Mais lorsqu’elle y revenait, au bout d’un
peu de temps, cela n’allait plus tout aussi bien que dans ses rêves... il y avait des frictions, des
désillusions... si bien qu’elle était toujours un peu désemparée et devenait geignarde,
pleurnicheuse !... Elle n’avait d’ailleurs pas tous les torts, mais elle n’avait pas non plus toutes
raisons. Certes, la vie n’a pas été pour elle un gai passage ; elle a eu à souffrir des uns et des
autres et que de fois je la plaignais secrètement, ne voulant pas le faire ouvertement, pour ne
pas aggraver son chagrin en l’approuvant – sans parler des infirmités et des accrocs qui sont le
lot commun et qu’on ne peut éviter ! Mais, pour son malheur, elle manquait d’énergie...
Le sentiment, c’est très beau, il en faut et l’âme qui en est dépourvue est très à
plaindre sinon à blâmer (car ce n’est peut-être pas de sa faute). De la sentimentalité, très peu :
c’est peut-être émouvant, mais c’est une faiblesse, une infériorité et cela fait une victime, –
assurément plus intéressante et plus attachante qu’un être sec et dur (celui-ci méprisable,
sinon haïssable) – mais une victime tout de même et qui court de grands risques de faillir à sa
vocation, à sa tâche, à son rôle social. Ce qu’il faut surtout dans la vie, c’est de la grandeur
d’âme, de l’énergie, du caractère, de la volonté, avec beaucoup de bonté, d’esprit
compréhensif, de Charité en un mot.
Tu vois qu’il ne s’agit pas dans ma pensée, d’orgueil autoritaire, inflexible et
despotique ! Non, cela est intolérable. Il faut être – ou du moins tendre à devenir – volontaire,
dur, sévère pour soi-même, humble (quoique libre), indulgent (quoique droit et non complaisant
à l’erreur), bon (sans être faible), pour autrui.
Allons ! Encore un sermon ! Décidément, je suis incurable et j’ai manqué à ma
vocation ! Malheureusement, on pourrait m’appliquer la réflexion souvent entendue : Faites
comme je dis, mais non comme je fais !
Dans huit jours, tu vas rentrer à la maison. Je voudrais que tu reviennes avec – non
pas une provision, c’est trop difficile à contenir et surtout à maintenir – mais une ou deux bonnes résolutions à mettre en pratique, pas pour quelques jours, – ce qui n’est pas tellement
dur – mais pour tous les jours, ce qui est terriblement difficile, presque héroïque ; car
l’ambiance vous reprend, vous enveloppe, vous entraîne et vous rend girouette... comme
auparavant !
En tout cas, secoue bien la poussière – ou la boue ! – de ta “colonie ”, qui pourrait
être restée à tes souliers ; oublie toutes tes misères ou n’en garde qu’un souvenir moqueur,
juste ce qu’il faut pour apprécier les choses et reviens-nous bien gaie, bien portante, bien
résolue : l’esprit sain dans un corps sain, excellente formule, comme tu l’apprécieras plus tard.
Je t’embrasse bien tendrement.

Papa.


Les voies de Dieu sont impénétrables !


Mon pauvre et si cher papa, tu ne pouvais prévoir en traçant cette dernière phrase, que la prochaine lettre que tu allais m’écrire, le 15 décembre l’année suivante, serait pour ta chère fille atteinte à dixhuit ans dans son corps – plus sain du tout –.
Et qu’en 1970, 23 ans plus tard, et sept ans avant ta mort, l’esprit de ta chère fille ne serait plus sain du tout non plus, puisqu’elle allait être enfermée chez les fous – oh ! Dix jours seulement... (Délire mystique : « même si elle a retrouvé rapidement “son bon sens ”, elle
refuse de le critiquer ! » dixit les psys...). Comment aurais-je pu critiquer “ce délire ” qui prenait sa source en Dieu : c’aurait été renier Dieu lui-même !
Mais n’anticipons pas ; chaque chose en son temps. Revenons à
ta lettre du 15 décembre 1947, ta dernière lettre il me semble, puisque
après tu n’eus plus jamais l’occasion de m’écrire, du moins de cette
façon.
Le diagnostic au mois de juillet 1947 était tombé, terrible et
imprévisible, nos familles n’ayant jamais entendu parler de près ou de
loin de cette maladie dont le seul nom alors faisait fuir : tuberculose
pulmonaire, – Conséquence de la guerre ! dirent-ils... Je venais d’avoir
dix-huit ans…
Pneumothorax – seule thérapie de l’époque (à votre âge cela va
très vite, si on ne le fait pas, dans six semaines on vous enterre !) – effectivement en quinze jours s’était creusée dans mon poumon droit une “caverne ” de 4 cm de diamètre... Bon, allez-y docteur...
Et le complément indispensable pour le bon fonctionnement de
ce pneumothorax (à insufflations tous les dix jours) : la section de brides
– un truc un peu barbare sous anesthésie locale !... qui consistait à
l’aide d’un cautère enfilé entre deux côtes, à détacher les brides
retenant encore le poumon à la plèvre, empêchant celui-ci de se
“ratatiner ” totalement. Le but étant de mettre ce poumon au repos en
lui ôtant la possibilité de respirer afin qu’il se cicatrise...
A chaque jour suffit son petit souci, m’aviez-vous dit docteur, et
en m’envoyant en montagne (avec maman) vous m’aviez bien caché ce
petit “inconvénient ” supplémentaire, que je venais de subir et qui dicta
à mon papa la lettre qui suit.

- 15 décembre 1947
Ma chère petite fille,
Je reçois ce matin ta lettre du 12, et bien qu’ayant écrit hier à Saint-Gervais je ne
veux pas me dispenser de t’envoyer en supplément quelques lignes personnelles pour te
répéter – comme le dit ma lettre que ta mère te communiquera – combien depuis huit jours, j’ai
été continuellement avec toi dans la pensée et dans l’angoisse. Angoisse de cette opération
que tu as maintenant subie et sur laquelle j’attends des détails avec une impatience que seuls
le raisonnement et la distance peuvent brider.
Que de fois jour et nuit, j’ai prié Dieu de te venir en aide ! Je souhaite qu’Il m’ait
entendu et qu’Il t’ait donné la force d’âme nécessaire pour supporter l’épreuve et la douleur
physique. Mais ne l’aurait-il pas fait que nous n’aurions pas à nous plaindre, car nous ne
méritons rien, Il ne nous doit rien et nous lui devons tout. Que notre souffrance soit au moins la
“bonne souffrance ”; qu’elle nous apprenne à mieux nous connaître, à nous mépriser nousmêmes
davantage et à prendre conscience de notre néant, de nos obligations et de notre
devoir ; et à prendre pour l’avenir – s’il plaît à Dieu – des résolutions réfléchies sincères et
fermes et qu’il faudra savoir tenir.
J’ai confiance que le Père Brottier et Ste Thérèse de l’Enfant Jésus – qui m’a
toujours écouté dans mes moments de grande désolation – t’auront prêté assistance, et qu’en
tout cas ils feront sortir un grand bien, pour toi-même et pour les autres, de ce mal passager,
grâce auquel si tu sais l’accepter vaillamment et avec une résignation chrétienne, c’est à dire
courageuse et pleine de foi, tu participes à la Rédemption de l’humanité.
Que ce courage se maintienne, avec toute la patience nécessaire, pendant ton
séjour forcé en chambre. Profites-en pour méditer sur les grandes vérités de la Foi et les
enseignements de l’épreuve et prendre – non pas à la légère, mais en toute conscience – ces
résolutions solides dont je te parle.
Au revoir ma chère petite fille. Quoique bien éloignée par la distance, tu es plus près
de moi par la pensée et par le coeur que si tu étais à Lille à vivre une vie normale, car je suis
constamment avec toi par la liaison avec Dieu.
Je t’embrasse bien tendrement.

Papa.


En avril 1953 je me suis mariée avec Pierre, qui a parfaitement accepté ma
maladie, car j’étais toujours avec “mon pneumothorax ”, que le phtisiologue
continuait d’entretenir tous les dix jours. J’avais alors, “le loup enfermé dans la
bergerie ”, c’est-à-dire que la caverne s’était calcifiée en gardant en son centre un
petit lac de bacilles de Koch. (Tuberculome)
“Une espèce d’épée de Damoclès ”, m’expliquait un ami très cher, médecin, – car
ma vieille, un jour où tu seras fatiguée ou en état de moindre résistance, cette
saleté va sortir de son trou et alors ce sera la tuberculose rénale ou osseuse ou
n’importe où, et là, tu es foutue !
La solution ? « Allez voir le Professeur S. à Lyon, il est le seul en France à faire
proprement des lobectomies ».
J’y suis allée… en voyage de noces !... Le professeur au vu des radios et des
tomographies me dit qu’il était à ma disposition pour m’enlever le morceau de
poumon receleur d’un si grand danger. « Quand vous voudrez », me dit-il.
Vous y seriez allé, vous ? Je me sentais bien et je n’avais pas envie de me
retrouver avec des côtes en moins... Je n’ai jamais voulu et l’avenir me donna
raison. Mais non, ce n’est pas l’avenir – mais la Providence qui comme toujours
veillait et avait certainement d’autres vues sur ce futur qui apparaissait pourtant fort
compromis.
Toujours est-il que je reçus ma dernière insufflation quelques semaines avant la
naissance de mon premier fils, en juin 1954. Ayant failli mourir d’une embolie
gazeuse lors de l’opération habituelle (la deux cent cinquantième insufflation
environ !) le trocart ayant pénétré dans un vaisseau sanguin et véhiculant
tranquillement l’air destiné à séparer la plèvre du poumon vers... mon cerveau !
- Docteur, qu’est-ce que j’ai ? (Au bout du troisième essai, le poumon étant revenu
à la paroi), je me sens toute drôle... mon cou est dur comme un morceau de bois,
ma tête...
On arrête ! s’écria mon médecin me basculant la tête en bas ! Vite, vite une piqûre
de solucamphre destinée à me ramener sur terre... Et j’y suis toujours.
Mais quatre ans après, je me sentis pas bien du tout, très fatiguée, fiévreuse. Ca y
est, ai-je dit, j’ai trop attendu. Pris de panique, nous sommes partis retrouver mon
phtisiologue à cent kilomètres de notre foyer ; en passant chez papa et maman
pour les mettre au courant. Inutile de dire leur angoisse tandis que je partais chez
mon docteur.
Celui-ci, qui ne m’avait pas revue depuis quatre ans me passa à la radioscopie et
poussa une exclamation que je n’oublierai jamais :
– Ah ça alors !
– Docteur ? Dites-moi, je vous en supplie !
- Il y a... il y a qu’il n’y a plus rien du tout ! Que des cicatrices... Je n’ai jamais vu
cela – un cas sur cent mille, peut-être! Je vais faire une communication à
l’académie ! ! !
Mon papa a toujours pensé lui, que c’était un miracle...
Interlude
Et la vie a continué. En février 1959, j’ai eu mon second fils.
Malgré mes nombreuses occupations, mon esprit lui, restait préoccupé. J’avais tout
pour être heureuse et je ne l’étais pas.
A cette époque, je n’avais pas encore découvert cette phrase de saint Augustin, qui
me marqua si profondément quelques années plus tard : « Vous nous avez créés
pour Vous ô mon Dieu et notre coeur est inquiet, tant qu’il n’a point trouvé de repos
en Vous. »
Je lisais beaucoup : des romans certainement, car mon coeur insatisfait aimait
toujours à s’évader dans la poésie et la littérature.

En 1948 m’avait été offert “par hasard ”, un livre que depuis lors j’ai relu des
dizaines de fois. “Sparkenbroke ” de Charles Morgan. – Mais qui donc aujourd’hui
se soucie encore de cet écrivain anglais ? Je lui dois beaucoup. J’y trouvais une
véritable nourriture spirituelle. Le premier et le seul peut-être, il m’a fait comprendre
qu’il ne faut pas attendre de l’amour humain plus qu’il ne peut donner. La Vérité est
ailleurs.
“L’Art, l’Amour et la Mort”...
“La mort est un aboutissement”...
“Toute ma vie j’ai aspiré à cela – à aimer un être humain d’un amour
absolu, équivalent à la foi qui transcende la raison dont elle est née, et qui existe
ensuite de sa vie propre.”...
Que de passages marqués d’un trait me sautent aux yeux, tel un itinéraire sinueux
sur une carte de géographie. J’ai toujours eu cette mauvaise habitude de souligner
au crayon dans “mes ” livres, ce qui m’apparaissait le plus important. Si l’on pouvait
rassembler toutes ces phrases, (et aujourd’hui encore ce serait les mêmes), nul
doute que le but apparaisse : mais comme sur une immense carte d’état-major, où
tous les petits bouts de chemins, dont certains sont des impasses ou des
labyrinthes, ont l’air de mener nulle part. L’échelle de lecture est tellement grande,
qu’on ne peut en avoir une vision d’ensemble : seul ‘’le général commandant’’
connaît le but secret de ce parcours.
Quand je pouvais parler de ce livre, je disais toujours : “Si j’en avais eu le talent,
j’aurais pu l’écrire.” C’est dire à quel point il correspondait à mon besoin d’être.
J’étais à la fois Mary et Sparkenbroke. Enfin, je trouvais exprimé, et de quelle
façon, ce besoin de transcendance qui habite tout être humain. Ce besoin qui chez
moi devenait une soif de plus en plus grande. Ensuite, du même auteur :
“Fontaine”; le prolongement en quelque sorte de Sparkenbroke, mais avec une
dimension à la fois plus humaine et en même temps, ce qui n’est qu’une
contradiction apparente, plus mystique.

Combien j’aimais cette prière, un peu mystérieuse, car alors je ne la comprenais
pas très bien. Morgan l’attribuait à des protestants allemands. Je la récitais souvent
intérieurement avec une ferveur intense. Et encore aujourd’hui, elle me plonge
dans un ravissement quelque peu mêlé d’angoisse :
“Permets, Esprit Eternel, à nous qui sommes agenouillés devant ton
obscurité, qu’elle se change en lumière par Ta Grâce, car nous n’en portons qu’une
misérable étincelle en nous-mêmes. Envoie Ton souffle sur nous, qui ne le sentons
pas ; conduis-nous, bien que nous ne suivions pas ; reçois-nous, même si notre
fierté rejette toute consolation, car nous ne pouvons T’atteindre sans Ton aide et il
n’y a pas d’aboutissement, à moins que Tu ne le montres”.
Après 1970, cette prière prit enfin toute sa signification, de même que le texte qui la
précédait et que je tiens à reproduire ici – car aujourd’hui il me concerne tellement :
“Lorsque j’étais enfant, Dieu me tenait par la main, mais je m’échappais ;
dans ma jeunesse, ayant besoin de paix, je me dis : je Le retrouverai.
“Je parcourus la cité, avec ma lampe si bien garnie et si brillante que mes
compagnons me l’enviaient. Appliqué, je fouillai la campagne... j’interrogeai les
astres avec une chandelle ! Humble, je rampai sur la terre, et regardai au fond des
trous de renards et sous les pétales des fleurs. Mais je ne trouvai ni vérité, ni repos,
car, comme un enfant innocent et plus d’un lettré avant moi, j’avais oublié ce que je
cherchais. Je déposai ma lampe et ma chandelle, jetai mes clefs et je pleurai.
Aussitôt, Sa lumière fut en moi. Lorsque je revins à la cité, j’en étais encore
illuminé. – A présent, je suis dans la liberté de Sa prison, même si le monde entier
vient frapper à ma porte. Prends-moi la main, ô Dieu, quand Tu voudras que je me
mette en chemin !”
Et François Mauriac. Je lisais et relisais beaucoup plus ses essais que ses romans
d’ailleurs (aujourd’hui, je les relis encore). Partout où il parlait de lui : Il y avait une
telle affinité entre son éducation et la mienne, malgré la différence de générations.
Lui, je le voyais “dans la liberté de Sa prison”. Je trouvais un tel réconfort dans sa façon de parler de sa foi, de Dieu. J’aimais sa façon d’écrire : « que la religion était pour lui aussi naturelle que l’air qu’il respirait, qu’elle lui collait à la peau ». Avec lui je m’y retrouvais. Il me parlait, il me rassurait. Nous étions de la même famille.
Parallèlement, c’était les débuts de la science-fiction – la vraie – qui sous le couvert
de pseudonymes, faisait passer les hypothèses les plus hardies des scientifiques.
Je dois beaucoup à John Taine (le physicien Eric Temple-Bell), auteur d’un livre qui
ne m’a jamais quittée : Le Flot du Temps – qui a conduit mon imagination sur des
chemins que mon inculture scientifique n’aurait jamais pu emprunter. Et encore
plus à C.S. Lewis, pour son “Silence de la Terre”. Cet auteur anglais venu à la
théologie, écrivit ce récit de science-fiction en 1938. Il m’a plus ouvert l’esprit à
Dieu que tous les catéchismes dogmatiques que j’avais lus depuis toujours. Vérité
de l’Imagination !
De même, que de remerciements à Louis Pauwels et Jacques Bergier pour leur
“Matin des Magiciens. ” Ils ont pu par la suite, prendre leurs distances avec ce qu’ils
avaient écrit, je n’ai jamais pu prendre les miennes. Aujourd’hui encore, là où je
suis à présent arrivée, je sais et saurais toujours ce que je leur dois. J’ai toujours
leur livre (un peu dépenaillé et souligné à de multiples endroits, naturellement !)
sous la main. Se sont-ils rendu compte de son impact sur les adultes qu’étaient
devenus les enfants de la guerre ?
Adolescents alors privés de tout – et encore plus d’idées, – n’ayant de savoir que la
dure réalité qui oblige à vivre au jour le jour, (ou les rêves de Delly !) où était alors
la part de la Connaissance et surtout de l’Imagination ? Ce “Matin des Magiciens” :
une porte enfin ouverte sur un Ailleurs dont nous avions été tellement sevrés. Et
plus spécialement pour la provinciale ignare que j’étais, une porte aux multiples
serrures, qui me faisait accéder à des écrivains dont j’ignorais tout. Comment
aurais-je connu – entre autres – Fulcanelli et son “Mystère des cathédrales”, qui
m’a ouvert une autre porte, non pas celle de l’Alchimie comme on pourrait le croire, mais bien celle qui permet de trouver Dieu, véritable et seul aboutissement de toute
science !
Oui, grâces soient rendues à tous ces écrivains, les bons et les moins bons, que
j’ai peut-être lus pêle-mêle, mais qui, j’en suis sûre ont apporté de l’eau au moulin
de ma soif, quelques lueurs au bateau désemparé de mon esprit égaré dans la
profonde nuit de ma recherche.

Un plus profond sillon


« Je voulais seulement dire que, jusqu’à présent, la religion – notion
exacte, conviction, mise en pratique – me paraissait n’avoir tracé en ton âme qu’un
sillon très superficiel. Et j’en ai souffert parfois, demandant à Dieu que l’impression
fut plus nette, plus profonde, la connaissance plus exacte, l’effet plus
perceptible... »

(Lettre de papa du 1er septembre 1946.)


- 1970
Tu vois papa, Dieu nous exauce toujours, mais à sa façon et en son
temps à Lui !
Je ne pense pas que tu aies gardé en mémoire ces lignes que tu m'avais écrites, il
y a vingt-quatre ans… Quand, sortie de l’hôpital psychiatrique où je venais d’être
internée dix jours et dix nuits, à la suite d’une “bouffée délirante mystique ”, je me
suis précipitée à ton chevet – (à quatre-vingt un ans, tu étais déjà grabataire et tu le
restas jusqu’à ta mort, sept ans plus tard)
Je n’avais qu’une hâte : c’était te raconter ma “grande Aventure ”, et d’ailleurs
maman toujours perspicace, sans rien me demander, m’avait poussée vers ton lit
en me disant : va vite tout raconter à ton père, il va être si heureux !
La merveille c’est que vous deux n’avaient pas douté un seul instant de la vérité de
ce qui m’était arrivé : La Grâce de Dieu – même si cela m’avait conduite à “l’asile ”,
vous saviez en grands chrétiens que vous étiez, “que les voies de Dieu sont
impénétrables ”. Pas un instant, vous n’avez douté de l’intégrité de mon esprit –
“Perdre les pédales ” pendant quelques jours, qu’était-ce que cela au regard du
Don de Dieu : la Foi.
– Et tous ces psychiatres n’y comprendront jamais rien, – disais-tu maman avec un
grand haussement d’épaules... – Ne te préoccupe pas de ces dix jours, ni de ceux
qui vont suivre » (car je partais pour une cure de sommeil ordonnée par les psys).
Quand je lui disais que je n’avais plus qu’une peur : un genre de lavage de cerveau
qui me ferait perdre de que je venais d’acquérir si chèrement : la Foi.
– La Foi, ce n’est pas comme un porte-monnaie, quand on l’a trouvée, on ne peut
plus la perdre ; on la garde jalousement !
Chère maman, si pragmatique, si positive et si pleine d’espérance... “Notre petite
soeur l’Espérance ” ! S’exclamait-elle souvent, citant Péguy.
Et papa, qui sans l’ombre d’une incrédulité, attendait que je lui raconte ce qui
m’était arrivé. Ensuite, autant qu’il m’en souvienne, son seul commentaire fut :
– Tu n’as pas reçu les stigmates ?
– Non, car j’ai dit à Mon Seigneur : Aucun signe visible Majesté, aucun, car je ne le
mérite pas...
 

Récit d’Anne Marie


Elevée dans une famille très chrétienne, où la pratique de la religion rythmait les
jours, les semaines et les années, j’ai grandi dans un milieu où croire en Dieu allait
de soi.
Mais vers l’âge de seize ans, comme en témoignent les lettres de mon père écrites
à cette époque, je commençais à me poser des questions. L’automatisme cessait,
et à présent cette religion acquise ne me suffisait plus.
Les années passant, les questions se faisaient plus pressantes, plus angoissantes
aussi. Ayant arrêté mes études juste avant le bac, j’ignorais tout de la philosophie ;
mais je sais à présent que ces angoisses sont dites métaphysiques, et qu’elles sont
normales chez tout être pensant. A vingt ans déjà, j’avais fortement marqué un de
mes amis par cette question :
– A quoi sert cette vie, pourquoi sommes-nous là ? Quel but ?... Mais enfin quel
but ?
En 1949, apparemment, il était étrange qu’une fille de vingt ans se pose ce genre
de problème. Mais il était évident que je n’étais déjà plus une fille de vingt ans
“normale ”, puisque marquée entre autre, par la tuberculose.
Quoi qu’il en soit, mon mariage en 1953 se révéla au fur et à mesure ne pas être
l’aboutissement qui pouvait répondre à cette interrogation : Quel but ?
Plus le temps passait, plus l’angoisse grandissait. Et je cherchais... et je lisais... et
je lisais et je cherchais... Par-delà ma vie familiale et tout ce que cela incombait –
j’avais deux fils et ma devise était : quand on fait quelque chose, il faut le faire le
mieux possible ; tout le reste de mon temps se tournait vers cette unique et seule
question : Dieu existe-t-il ? Qu’est-ce que cette vie ? – On me dit qu’il faut adorer
Dieu, mais comment peut-on aimer quelqu’un que l’on n’a jamais vu et dont on se
demande même s’il existe ?
Il y avait dans ce postulat quelque chose à laquelle ma raison raisonnante ne
pouvait adhérer. Et cette angoisse du “moi ” qui se surajoutait. Je ne pouvais
concevoir et surtout pas accepter que ce “moi” que je ressentais existant,
disparaisse un jour à tout jamais. Quelque chose en moi se révoltait infiniment ; ce
n’était pas de l’orgueil ou un sentiment quelconque de mon importance. Non,
simplement mon “moi ” n’acceptait pas l’idée de retourner au néant dont il avait été
soi-disant tiré. C’était aussi simple que cela... Et j’endurais les tourments de l’enfer.
Mes questions aux représentants de l’Eglise, dont je continuais de fréquenter
assidûment les célébrations, étaient restées sans réponse ou m’attiraient ce genre
de pirouette : Faites comme les automobilistes la nuit, ils avancent et pourtant il fait
noir ! Ou d’un cousin prêtre m’entourant les épaules d’un bras fraternel : Ma pauvre
vieille, que veux-tu que je te réponde, nous, on a déjà bien du mal à s’accrocher !...
Je ne dormais presque plus depuis deux ans, et mon mari ne se doutait de rien,
mes préoccupations ne l’ayant lui, jamais préoccupé... Mon beau-frère, avec qui
j’essayais de discuter me traitait régulièrement “d’intellectuelle ” avec un rien de
dédain. Le seul avec qui je pouvais échanger, mais que je ne voyais pas souvent,
était mon frère de cinq ans plus jeune que moi, cardiologue, directeur d’hôpital qui,
se posant à peu près les mêmes questions, en arrivait de plus en plus sûrement à
l’athéisme...
Comment oublier ce dernier dimanche de janvier 1970, attablée à ses côtés, lors
des fiançailles d’un de nos neveux, où pendant des heures nous avons poursuivi
notre discussion favorite et passionnée. Tout à coup, il m’a déclaré avec une
grande assurance : « Écoute-moi bien, je peux t’affirmer que depuis que je suis
dans cet hôpital, des morts j’en vois tous les jours ; à présent je suis certain qu’il n’y
a rien – un mort est définitivement mort – Et tout se termine là. Il faut en prendre
son parti... C’est le cerveau qui fabrique tout ! »
Toute la nuit j’ai retourné cette déclaration dans ma tête. – Le lendemain, j’avais
totalement accepté.
Et pour la première fois depuis des années, une paix extraordinaire m’envahissait :
Pourquoi me suis-je autant tourmentée ! Qu’est-ce que cela peut bien faire après
tout s’il n’y a rien, puisque tu ne le sauras même pas... Ce que tu pouvais être bête
ma pauvre fille, c’est si simple d’accepter cela. Pourquoi ce désir de “survie ” t’a-t-il
hanté à ce point, alors qu’aujourd’hui tu adhères sans aucune difficulté ni révolte, à
cette conclusion de ton frère ?
Regarde et constate : Tu as cessé de te débattre, tu acceptes totalement
l’inexorable – et la paix t’a envahie... Que de temps perdu, que d’angoisses inutiles
avec toutes ces questions que tu n’aurais jamais dû te poser, puisque la seule vraie
réponse tu l’acceptes aujourd’hui et tu y trouves enfin la Paix.
D’un coeur incroyablement léger, j’ai fermé et rangé tous mes bouquins.
J’étais heureuse sans plus aucune arrière-pensée, j’allais enfin pouvoir vivre et
surtout dormir... et à la fin je disparaîtrais comme tout le monde ! Quelle sensation
de libération... Débarrassée du problème, comme par enchantement ! Je n’en
revenais pas : c’était comme si on m’avait ôté un carcan de fer qui m’enchaînait
depuis tant d’années... Je me sentais enfin libre, extraordinairement libre... J'en
dansais de joie !
Quatre jours durant je nageais dans ce nouvel état d’être, le savourant pleinement,
ne pensant plus à rien. C’était si nouveau pour moi : j’étais simplement heureuse
d’exister, sans plus aucun état d’âme, je crois même que d’âme je n’en avais plus
et c’est ce qui me rendait si légère...
Alors, comment cela s’est-il produit ?
Vingt-quatre ans après, bien sûr les détails de la genèse de cet événement se sont
estompés ; mais je me souviens que le vendredi soir en rangeant la Bible restée
sur un coin du bureau, j’ai ressenti comme un grand trouble, quelque chose de très
mystérieux, jamais éprouvé. Le lendemain samedi, faisant passer le devoir d’état
avant tout, j’ai attendu le soir, que ma famille soit couchée. J’ai ressorti de la
bibliothèque cet énorme livre, et suis allée m’installer sur la table de la salle à
manger, je l’ai ouvert...
Quelle page était-ce ? (Peut-être Job). Je ne le sais plus, mais ce que je sais et je
m’en souviens comme si c’était hier, c’est qu’en l’espace d’un éclair, j’ai tout
compris : Dieu venait de se révéler à moi... Les heures qui suivirent – le temps
avait disparu – j’ai écrit, écrit... Au fur et à mesure la lumière grandissait en moi,
cela allait de plus en plus vite, la réponse à tout m’était donnée... Ma tête
vrombissait littéralement et je sentais réellement se hérisser mes cheveux.
Aujourd’hui, je n’ai rien oublié de cette sensation effrayante, parce que si peu
naturelle.
Tout s’expliquait... mais il n’y a pas de mots pour le dire. Je participais en quelque
sorte à la Création... Je voyais des mondes en fusion, je tombais dans des
précipices... Le Temps avait cessé d’exister, j’étais partie loin, très loin, je roulais
dans des espaces infinis... C’était terrifiant !
Et tout à coup, il y a eu Jésus.
Je ne l’ai pas vu, mais j’ai su qui Il était. Je l’ai vraiment conçu en Esprit. Ce verbe
concevoir a d’ailleurs deux significations. Et comme Marie, j’ai dit : “Je suis ta
servante, ô mon Seigneur ! ”
Prise d’un amour total, j’ai voulu l’accompagner au jardin des Oliviers, je lui tenais
la main. Je partageais sa souffrance. Folle de douleur et d’amour pour Lui, je me
souviens avoir écrit : « Si j’avais été ta mère, je me serais couchée sur Toi sur la
croix et ils auraient été obligés de nous crucifier ensemble. Jamais je ne t’aurais
laissé, ils n’auraient pas pu me détacher de Toi. Les clous auraient percé mes
mains appuyées sur les tiennes, me soudant à Toi pour former un tout,
indissociable. »
Tout se précipitait ; tout à coup, je compris que c’était nous les chrétiens, qui
l’envoyons se faire clouer : Le temps n’existant pas pour Dieu, hier est aujourd’hui
et demain est toujours aujourd’hui ; c’était donc nos supplications d’aujourd’hui et
dans le temps qui s’était écoulé pour nous, qui l’avaient envoyé sur la terre pour
nous sauver. Coupables, nous étions coupables ! L’horreur me submergea ; mais
je n’étais pas encore arrivée à l’extrême...
Qui était responsable de cet état de choses ? Qui avait tellement compromis la
condition première de la Création qu’il en avait fallu arriver à ce que Dieu lui-même
se fasse humain pour nous récupérer ?
La réponse surgit fulgurante : c’était Ève, et puisque le temps n’existe pas : Ève
c’était moi – La curieuse qui voulait tout savoir !
Je fus précipitée la face contre terre. Durant une seconde ou une éternité, je portai
tout le malheur du monde sur les épaules et ce fut insoutenable. En un éclair je vis
défiler toute la souffrance que moi Ève, j’avais engendrée, depuis que le monde est
monde – Et je l’ai assumée –. Cela dura une seconde ou une éternité, mais c’était
la même chose, la notion de temps ayant perdu toute signification.
Une pensée jaillit dans mon esprit frappé d’horreur : Supprime-toi, c’est toi la
responsable ; jamais personne ne pourrait pardonner cela : le malheur de
l’humanité ! Titubant, je me relevais pour essayer de trouver de quoi m’anéantir,
car c’était bien cela : il fallait que je retourne immédiatement au néant, – ce
néant, que depuis toujours je n’arrivais pas à accepter ! – mais à présent, je ne
voulais plus qu’une chose : n’en être jamais sortie, afin que tout ce malheur du
monde ne soit jamais arrivé. En supprimant la cause, je supprimerais peut-être
aussi les effets monstrueux de mon existence – Je sais aujourd’hui que je n’ai
jamais frôlé d’aussi près le suicide et j’ai compris aussi le pourquoi et la nécessité
du suicide, tout au moins dans certaines circonstances.
C’est alors que tel un éclair fulgurant, une phrase surgit en lettres de feu dans mon
esprit : Et même si votre coeur vous condamne, Dieu est plus
grand que votre coeur !
Abasourdie, je me relevais ; hébétée je tournais en tous sens : d’où cela venait-il ?... Qui avait dit cela ?... Quelqu’un venait-il de dire cela ?... naturellement, pas de
réponse ! Je tenais ma pauvre tête entre mes mains : d’où venait cette phrase qui
m’avait remise debout ? Est-ce que je l’avais lue ? Comme un automate je partis
en tâtonnant vers la bibliothèque et j’y pris un livre au hasard – François Mauriac :
une onde de soulagement me traversa – c’était un peu mon père spirituel. Le livre
s’ouvrit à une page... et là devant moi, ô miracle, était écrite cette phrase : Et
même si notre coeur nous condamne, Dieu est plus grand que notre coeur !
Avec une stupéfaction pour le moins aussi grande que l’horreur dont je venais
d’être tirée, je réussis à lire dans les dernières pages de son “Ce que je crois ” ce
que je veux fidèlement retranscrire ici :
« “Et si notre coeur nous condamne, Dieu est plus grand que notre coeur.”
Que de fois je l’aurai méditée et citée, cette parole de l’Epître johannique – parole
qui m’est revenue un jour, comme récrite de Votre propre main pour mon usage
unique. Ce fut dans une circonstance que j’ai déjà plusieurs fois rapportée. J’ai
raconté souvent l’histoire du paroissien que m’avait demandé Colette. Je ne
songerais pas à mettre cet incident étrange au rang des signes que vous m’avez
donnés, s’il n’y avait ce qui concerne la parole de Saint Jean. Je rapporterai donc
brièvement cette histoire. Au cours d’un déjeuner, au plus noir de l’occupation,
Colette, à brûle-pourpoint, me demanda de lui donner un livre de messe, mais non
de lui en acheter un. Elle me décrivit celui qu’elle voulait, et que je ne pourrais
trouver, croyait-elle, que chez moi : un de ces vieux paroissiens d’autrefois
recouverts de basane noire, “comme il y en a dans les familles ”. Je lui promis d’en
chercher un. Ce que je fis, mais je ne trouvais rien.
Trois jours plus tard, je reçus d’elle une lettre étrange : elle me racontait
que sa concierge lui avait remis le paroissien qu’elle m’avait décrit. Mais il ne venait
pas de moi, comme elle l’avait d’abord cru. C’était une amie polonaise qui se
trouvait hospitalisée dans une clinique de Paris pour une opération sans espoir et
qui lui envoyait ce dernier souvenir. Colette lui téléphona à la maison de santé et
après l’avoir remerciée lui demanda : “Mais pourquoi ce paroissien ?” L’amie
étrangère hésita et répondit : “Vous allez me croire folle, mais je vous ai vue en
songe et vous me demandiez ce paroissien...” Colette me pressait de venir m’en
assurer par moi-même. Je me rendis aussitôt rue de Montpensier. Oui, c’était bien
le paroissien noir qu’elle m’avait décrit. Comme je le considérais avec attention,
Colette me dit que l’étrangère avait tracé quelques mots sur la page de garde. Je
lus et n’en crus pas mes yeux : c’était la parole de saint Jean : “Et si notre coeur
nous condamne, Dieu est plus grand que notre coeur.” Cette part du message me
concernait, je le savais. »
Et cette nuit-là, c’est à moi que fut adressé le message, juste à la seconde
où il le fallait, dans un concours de coïncidences tel que la probabilité ne
pouvait absolument y avoir aucune place. C’était votre Providence, mon
Seigneur, qui veillait et qui m’a sauvée.
Vingt-quatre ans après, tandis que j’essaie de retranscrire avec de si pauvres mots,
cette nuit du sept au huit février, je suis encore submergée par le flot
d’émerveillement qui m’envahit alors et qui au plus noir de ma destinée ne m’a
jamais tout à fait quittée : la certitude que Vous étiez là, et que pendant toute
cette terrible épreuve permise par vous, vous me teniez serrée dans vos bras.
Oui, vous m’avez donné la Foi – cadeau royal – et surtout la Foi en votre Amour.
Comment ne pas croire en votre existence après une telle démonstration ?
Alors dans tout ce qui a pu ensuite m’advenir, et Vous seul savait par quelles
terribles épreuves je suis passée, au plus profond de ma nuit a toujours subsisté cette petite étincelle inaliénable, à laquelle je me raccroche : Non, ce n’est pas le
cerveau qui fabrique tout !
Ce qui se passa ensuite, je ne peux le transcrire ici. Il est certain qu’au lever du jour
ce dimanche 8 février 1970, j’étais dans un état d’exaltation que je n’arrivais pas à
dissimuler. Le plus surprenant, c’est que mon mari a cru ce que j’essayais de
raconter. Il a cru et il y a adhéré pendant une partie de la journée, mais au fil des
heures, mon comportement devenant de plus en plus bizarre, – je lui disais « Tu es
Adam et je suis Eve… » – il a pris peur, et a cessé totalement de me croire.
J’avais la certitude que tout ce que j’avais vécu cette nuit, me dépassait infiniment.
Je veux dire que ce cadeau de Dieu, la Foi, accompagnée de tant de révélations,
ne m’était pas simplement destiné, à moi pauvre créature. Comme Jeanne d’Arc,
j’étais prête à tout : Messire Dieu premier servi ! Certainement, Dieu attendait
quelque chose de moi, me chargeait d’une mission, et j’avais dit oui à tout, j’aurais
fait n’importe quoi, Il le savait bien. “Tout ce que Tu voudras, Seigneur, je le ferais,
je suis ta servante ”... Mais ce tout, quel était-il ?
Dans mon cerveau enfiévré, toujours en “état de perception ”, se bousculaient la
joie, la souffrance, “l’urgence d’agir ”, pour partager immédiatement ce que je
venais de recevoir avec mes frères humains... Le Temps continuait de se
télescoper dans ma tête : le passé, le présent, l’avenir, tout cela n’avait plus aucun
sens : ici, maintenant – n’avait plus aucune signification. J’étais sortie du continuum
et me trouvais à la fois sur la croix de Jésus, et dans le temps présent et futur ; car,
comme dit St Pierre “ Pour le Seigneur, mille ans sont comme un jour et un jour est
comme mille ans ” – et tout se jouait en cet instant d’éternité. J’allais jusqu’à
annoncer l’assassinat imminent du pape, représentant du Christ, et
j’obligeais la maisonnée à regarder la télé en priant... (En fait ce fut Jean-Paul
II qui fut agressé… onze ans après !)
Il y avait des mois que je ne dormais plus, je n’avais pas mangé depuis au moins
vingt-quatre heures... Alors, “j’ai perdu les pédales ”...
Ce dimanche soir 8 février 1970 à 23h00, j’étais internée.
Quelle leçon, mon Seigneur ! La meilleure pour apprendre l’humilité !
Là non plus, je ne peux ni ne veux exprimer ce que furent ces dix jours et dix nuits.
Tout ce que je peux dire, c’est que les trois premiers jours je m’abandonnais à Dieu
dans un état de déréliction totale. Je me cramponnais à la promesse que je lui
avais faite : le servir jusqu’au bout. Je crois encore entendre battre dans ma tête le
bruit derrière les portes de l’enfer ; car je suis allée jusque-là : mais Il n’a pas voulu
que j’y entre...
Il est certain que la souffrance psychique dépassait infiniment le contexte effrayant
dans lequel j’étais plongée : douze “pauvres d’esprit”, dans mon dortoir... Raconter
cela remplirait cent pages... C’est inutile, mais je n’ai rien oublié. Déambulant nuit et
jour avec chacune son drame personnel – incommunicable – Après trois jours et trois
nuits de ma propre agonie, j’ai remis entre les mains de Dieu mon esprit. Je me
rappelle parfaitement “l’épisode ” où allongée sur mon lit, elles sont venues à plusieurs
« m’ensevelir ». Décidée à tout accepter, je me laissais faire, entourée de draps qui
m’asphyxiaient peu à peu ; c’est l’intervention d’une infirmière qui les a arrêtées.
Alors je me suis tournée vers elles, essayant, malgré mon égarement, de les aider.
Rien oublié non plus des “signes” (je t’avais dit Seigneur que je n’en
voulais aucun, car je ne les méritais pas) dont Il t’a plu de me combler. N’ayant de
signification que pour moi seule, ils m’ont puissamment aidée à reprendre pied
dans la “réalité ” – et à l’accepter – J’ai la certitude absolue que sans eux, je
n’aurais jamais été “libérée ” dix jours plus tard. « Et les anges le servaient » dit
l’évangéliste de Jésus au désert... Au risque de paraître prétentieuse dans ma folie
maintenant je sais ce que cela veut dire !
Me voilà de retour à ton chevet, mon papa ; tu viens d’entendre pour
l’essentiel, ce que vingt-quatre ans plus tard, je viens d’écrire. Je ne pense pas,
malgré les années écoulées, avoir changé quoi que ce soit à la narration de mon
histoire.
Toi et maman, vous ne l’avez pas un instant mise en doute. Pas une seconde vous
n’avez essayé de me dire : “ah oui mais... ma pauvre petite fille, tu es victime de
ton imagination, c’est le cerveau qui fabrique tout ! ” Non, vous avez cru. Pour ceux
qui ont la Foi rien n’est impossible à Dieu. Vous avez vu sans l’ombre d’une
hésitation l’intervention de Dieu dans ce qui de l’avis de tous, même de mon époux,
(et vingt-quatre ans après, il le pense toujours) n’était qu’un délire, un accès de
folie, une aberration mentale !…
Mais qui d’autre pourrait croire à cela ? Je me souviens avoir dit à l’un des
psychiatres chargé de soigner ma “bouffée délirante ” : Où saint Paul a-t-il écrit,
citant le Christ : “Tous ceux qui parleront de moi, on les prendra pour des fous ? ”. Il
n’a pas su me répondre, – et pour cause : saint Paul, mon frère, n’a jamais dit
exactement cela... mais presque la même chose.
Si Jésus revenait aujourd’hui nous parler de l’Amour de son Père ? – Oh non ! On
ne le crucifierait plus, on l’enfermerait dans un asile d’aliénés !...
Pour essayer d’expliquer ce qui m’est arrivé, je prends souvent la
comparaison du spéléologue : Il est descendu tout seul trois mois sous terre pour
découvrir des gouffres inconnus, explorer les entrailles de la terre. Il est enfoui sous
des tonnes de matière, dans l’obscurité la plus totale.
Là-haut une équipe de spécialistes de tout poil l’observe par appareils interposés.
Rien ne leur échappe : comment l’être humain – corps et âme – peut-il résister en
dehors de son milieu naturel, il est très important de le savoir. Aussi que de
précautions quand il remonte enfin vers la vie normale, les spécialistes sont aux
petits soins : les lunettes noires pour les yeux qui n’ont pas vu le jour depuis si longtemps, on le place sous monitoring, on lui tient la main, le psychologue est là et
le psychiatre aussi ; on va le mettre en observation pour être certain qu’il a bien
supporté le choc de son isolement, qu’il va sortir indemne de cette terrible épreuve
... (Et malgré tout ce déploiement de sciences, il n’en sort pas toujours !...)
Ainsi de moi, mais tout à l’envers : Après quarante ans d’enfermement
dans l’obscurité de mon esprit, j’ai été en une seule nuit projetée dans la lumière
fulgurante et intemporelle de Dieu... Quand je suis redescendue – âme et corps –
sur l’aire d’atterrissage de la vie de tous les jours, il n’y avait personne pour me
réceptionner... Personne pour me tendre une paire de lunettes noires, personne
pour me prendre la main. Alors, totalement seule au sortir de cet éblouissement, je
n’ai pas su retrouver tout de suite ma boussole... Et j’ai perdu le nord !
Cela vous étonne ?... Moi non – c’est plutôt le contraire qui m’étonnerait !
Mais alors, aujourd’hui, avec une telle “préparation”, une telle démonstration vous
devez penser que je suis sur mes gardes et que je tiens ma boussole bien serrée
dans ma tête ?
Vingt-quatre ans après, et pas mal “d’éblouissements ”, je crois que je peux faire la
part des choses, parce que Dieu m’aide à la faire. Et je la fais, parce que je suis sur
cette terre où se trouve mon devoir. Mais quelle souffrance, quel déchirement.
Comment peut-on vivre avec les pieds sur terre et la tête, je devrais dire le
coeur, dans le Ciel ?
Et puis : Faire la part des choses ? Dieu étant “la Chose en Soi ”, comment le
mettre “à part ” ou “en part ” ? Pour qui a pu appréhender cela, c’est impossible.
Platon écrivait déjà : « Or, toute âme humaine a, par nature, contemplé les réalités
de cet autre monde : autrement, elle ne serait pas entrée dans un corps. Mais
trouver dans les choses de ce monde-ci, le moyen de se ressouvenir de ces
réalités n’est pas aisé... Il n’est resté qu’un petit nombre d’âmes qui aient
suffisamment le don du souvenir; et quand elles aperçoivent ici une imitation des
choses de là-bas, elles sont hors d’elles-mêmes et ne se possèdent plus... »
Encore plus impossible quand on a perçu que cette “Chose en Soi ” c’est l’Amour.
Amour indicible et Source de toutes choses. Quand Dieu lui-même se révèle, Il se
révèle Amour : Dieu d’Abraham, d’Isaac, de Jacob, non des philosophes et des
savants... (Pascal). Et le Père Standinger avait lui, pleinement raison d’écrire
(L’Homme moderne devant les problèmes de l’au-delà) : Dès lors il est clair que
notre âme ne peut avoir sa vraie patrie que “là-haut”, dans le monde de l’au-delà,
car toute aspiration un peu profonde qui la consume, toute grandeur et sublimité,
toute valeur idéale et divine dont elle a faim, habitent là-haut, de l’autre côté des
frontières de la vie terrestre... Mais alors, cette terre n’est qu’un pays étranger qu’il
lui faut nécessairement traverser pour atteindre la Patrie, la vie d’ici-bas n’est
qu’une nuit au delà de laquelle l’autre Monde brille comme une aurore, un songe
qui du lieu d’exil monte vers le coeur du Père (...).
Oui, il apparaît impossible de reprendre là où on en était avant – et pourtant cela va
devenir possible et même obligatoire de par la Volonté de Dieu. Vous savez à
présent qu’Il est votre source et le centre de Tout, mais cette Révélation va
s’estomper. Et Dieu s’en charge, oh ! À votre corps défendant, croyez-moi ! Mais
c’est le prix à payer, et ce n’est que bien plus tard que vous reconnaîtrez qu’Il agit
envers nous avec une Sagesse qui n’a d’égale que son Amour.
Parce que après la preuve, toujours vient l’épreuve. – Dieu ne se prouve pas : Il
s’éprouve, dans le sens précis de ressentir – Mais Dieu redevient le Dieu caché.
Dieu se “retire ” et vous avez tout perdu ! Vous avez entrevu la lumière pour la
reperdre presque aussitôt, et il fait bien plus noir encore qu’auparavant ! Que de
plaintes, de douleur, de désespoir... – Que t’ai-je fait Seigneur, pour avoir ainsi
démérité ? (Insensée, qu’avais-tu donc mérité ?). Il vous faut apprendre à vivre à la
fois sans Lui et pour Lui... mais à travers et pour les autres. C’est la grande Leçon :
Ce n’est que cela qu’Il attend de nous... – Pas de grandes missions, mais un
simple et unique devoir, une unique exigence, mais quelle exigence : aimer les
autres, tous les autres à travers Lui.
Quelle dégringolade ! Les autres, Seigneur, quand on a vu Ta Splendeur ! Quand
on a ressenti ton Amour ! Quand on ne peut plus se passer de Toi, car justement
après T’avoir “vu ” on ne peut plus aimer, voire supporter les autres !
Il n’y a que deux commandements dit Jésus. Lui a quitté Son Amour qu’il voyait
face à face depuis les siècles des siècles pour prendre la peau d’un homme, afin
de nous montrer comment on peut aimer les autres ! Jusqu’où il faut aller pour
aimer les autres ! Car le deuxième commandement est semblable au premier.
Maurice Clavel, ce “converti ”, mon frère en Jésus-Christ, écrivait :
« Il est un fol amour dont Dieu veut que j’aime ! (...) L’amour est ce qu’il y a
de plus difficile au monde, parce qu’il y est impossible ! Les spécialistes, les
patentés de l’amour de l’humanité m’écoeurent... Ghéon demandait, se
demandait en 1915, au front : « Est-il humain d’aimer les hommes ? » Non,
c’est divin : “Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés ” ne
souffre pas l’interruption d’une virgule. C’est d’un trait, et Jésus n’y donne
pas le modèle mais la matière de cet amour : Lui-même. Pardon si je fais le
scribe, c’est contre les pharisiens ! Christ est Amour et Il accomplit la Bible.
L’Amour est Christ : sinon pourquoi rajouter à la Bible ? Christ est Amour et
l’Amour est Christ...
D’ailleurs au nom de quoi, de quel droit, pourquoi les aimer les hommes ?
Quel privilège, dira Lear supra lucide sur sa lande, à cet animal nu et fourchu.
Qui fait, qui vaut que nous nous aimions ? La Nature ? On s’y mange, mon
bon Jean-Jacques... La sympathie instinctive ? Scheler, le seul penseur
sérieux de la sympathie, est aussi le grand dénonciateur du “ressentiment ”,
l’obscur ressort de nos humanismes justiciers... La liberté, la personne
humaine de Kant, fin en soi ? Foutaises ! Laïquement pieuses ! (...) Ah,
comme il faudrait tout reprendre à l’envers et par en dessous, depuis le
protozoaire où nous aboutissons en Deleuze et voir dans le désir déjà une
espérance ! Mais qui peut déceler à coup sûr l’Espérance s’il ne l’a ?
Et la Charité même, en acte et en pensée, qui la saisira ?... Un Maître hindou
qui dirigeait des hôpitaux à Bénarès et des maisons de prière et de
contemplation dans l’Himalaya, disait : “J’envoie le plus souvent possible
nos infirmières dans les couvents de montagne pour réparer les dégradations
spirituelles que ne manque pas de produire en elles l’exercice de la charité.”
Sic, mes pères !...
Et Bérulle : “Dans les premiers temps de votre conversion ne vous risquez à
la charité que, pour ainsi dire, par prudentes sorties et petits coups d’essai”.
Et certes Bérulle dit encore : “Abandonnez la contemplation de Dieu dès
qu’un pauvre vous demande ”. (...) J’ai mentionné les six heures de prière de
Vincent de Paul : comprend-on maintenant qu’elles étaient nécessaires ? Et
quel pur feu du ciel dévastateur fallut-il à François d’Assise pour être un jour
entendu de ses habitants les oiseaux !
Je n’aime pas les hommes, j’espère pouvoir un jour les aimer. La plupart de
mes tentatives me rebutent, accusant mon vide. Je donne du vent, comme ce
radiateur que je purge. Il faut être trempé en Dieu, non, trempé de Dieu pour
aimer : mourir et ressusciter – c’est parfois possible, par Grâce – de
l’incandescence de cette haute tension qui passe.
Mais j’arrête : rien qu’en parler me désespère. Je pense toutefois en avoir
assez dit, lecteur ami, pour que tu comprennes quel Amour est prostitué par
des chrétiens sur des estrades politiciennes, dans la sécurité sociale de
l’intime et le bonheur balisé de l’humanitairerie ! (Maurice Clavel)
Tout de même Scheler, pour revenir à lui, dans son approche nouvelle de
la sympathie, introduit un mot nouveau : empathie – qui est la faculté intuitive de se
mettre à la place d’autrui, de percevoir ce qu’il ressent. – Ne pourrait-on voir dans
cette définition au delà de toute philosophie, la vraie signification de la Charité, don
de Dieu ? Dieu lui-même étant le Seul à pouvoir se mettre à la place de chacun d’entre nous et à connaître réellement ce que nous sommes. Si chaque fois que nous jugeons quelqu’un, et souvent sur des apparences, nous essayions de nous mettre, dans la mesure du possible, à sa place ? Je pense que bien souvent nous serions forcés d’admettre en toute bonne foi, que nous aurions peut-être encore plus mal agi !
Mais se mettre à la place d’autrui, percevoir ce qu’il ressent c’est bien, pourtant,
cela ne suffit pas. Il faut bien sûr prendre ce chemin, cependant celui-ci doit nous
mener beaucoup plus loin, à ce qui est le véritable aboutissement de l’Amour : la
Compassion – c’est à dire : “souffrir avec ”. Autrement dit : assumer.
C’est ce qu’a fait Jésus pour nous. C’est ce qu’Il continue de faire pour et en
chacun de nous. C’est ce qu’Il nous demande de faire les uns pour les autres...
Pour ceux vers qui va notre “sympathie ”, ce n’est pas trop difficile encore que notre
naturel égoïsme cherche toujours le moyen de rester bien au chaud dans son
cocon. On peut compatir, mais pas trop longtemps !... Le malheur des autres,
fussent-ils de nos amis, est souvent bien encombrant !... Et puis, comme disait st
Paul : “Quel mérite avons-nous à aimer ce qui est aimable ? ”
Mais que dire de nos “ennemis ”, ceux à qui Jésus nous dit de tendre la joue
gauche ? Ceux avec qui nous n’avons aucune affinité, ceux qui nous font horreur
même, par leur comportement. Clavel semble avoir raison : “Est-il humain d’aimer
les hommes ” – et comment en outre, aimer les plus mauvais ? La réponse devient
évidente : Non, c’est impossible, car ce n’est pas dans la nature de l’homme. –
C’est vrai, c’est divin – Mais si Dieu est en chacun de nous – alors Lui-même peut,
par-dessus nous en quelque sorte, pardonner et aimer. Et c’est bien là, je crois,
l’état d’esprit que nous devons nous forcer d’acquérir. – Pardonne-nous nos
offenses, comme nous pardonnons aussi, cet – aussi – indiquerait la cause et la
conséquence et l’adhésion : Toi en nous, Tu pardonnes à ceux qui nous ont
offensés – scandalisés – torturés – massacrés... Et à travers nous : à ceux qui t’ont offensé – scandalisé... Alors, nous nous en “remettons ” à Toi – qui seul peut
“remettre ” les fautes !
Si je peux écrire ceci aujourd’hui en 1994... il est bien évident que j’étais incapable
d’une telle réflexion il y a vingt-quatre ans ! Quel long et patient travail tu as
accompli en moi Seigneur !
Mais cela s’appelle mettre la charrue avant les boeufs !… Nous sommes encore en
1970 et je vais partir en cure de sommeil après mes dix jours d’internement... Car
l’atterrissage fut rude ; la vie de tous les jours bien terne après un tel
éblouissement. Néanmoins avec Ta Grâce, je recommençais de cheminer parmi
les hommes. Sans trop de difficultés, j’ai réintégré “ma planète” et assumé les
devoirs qui incombent à chacune de tes créatures, Seigneur, quand elles ont
compris le sens de leur vie.
Parallèlement ma vie spirituelle progressait, avec toujours cette interrogation en
filigrane : Qu’est-ce que Dieu attend de moi ? Je ne pouvais croire que toute cette
“Révélation ”, (j’allais dire en pensant à la Divine Comédie de Dante : toute “cette
mise en scène ”), était à moi seule, destinée. Une amie à qui j’avais confié un peu
de mon “histoire” à ceci répondait légèrement scandalisée :
– Mais c’est de l’orgueil de votre part ma chère. Pourquoi voulez-vous que Dieu
attende quelque chose de vous !
Cette dame était dotée d’un solide bon sens. Elle avait certainement raison ; et
pour me rappeler à l’humilité je lui donnais mon adhésion aux “Conférences de
Saint Vincent de Paul ”, pensant qu’effectivement Dieu n’attendait rien d’autre de
moi que d’aller réconforter un peu ses délaissés. Je me souviens, hélas pas
complètement, de cette splendide prière que nous récitions avant chacune de nos
réunions, et ce passage : ... “Et quand ils n’auront plus rien à donner, qu’ils
aillent jusqu’à se donner eux-mêmes ”.... commença d’être mon guide. J’étais
ainsi certaine de ne pas Te décevoir, tout en restant à Ton écoute…
J’eus pendant les trois années qui suivirent quelques “bouffées ”, que je cachais
soigneusement à mon entourage. – Surtout ne plus les faire souffrir – Pas un autre
internement, pense à tes enfants !...
Te souviens-tu Seigneur de ce soir-là, où, agenouillée au pied de mon lit, j’ai cru
T’approcher si près que j’étais certaine que j’allais devoir mourir. “Nul ne peut voir
Ta Face sans mourir ” est-il dit dans l’ancien Testament... (Aujourd'hui, j’ai compris
le vrai sens de cette phrase : il nous faut mourir pour voir Ta Face, c’est dans
l’ordre des choses, évidemment et avant tout mourir à nous-mêmes !) Mais pour
l’heure, si je n’avais pas vraiment vu Ta Face, je venais d’être projetée (mais de
nouveau les mots manquent pour raconter cela), dans une sorte de grande roue
cosmique (ressemblant à la Svastika hindoue) qui tournait en projetant des rayons
d’une lumière extraordinaire. Je venais de pénétrer tel un nageur dans un de ceuxci,
remplie à la fois d’un effroi et d’un bonheur si intenses, dans une telle acuité de
compréhension, que tout ceci n’avait plus rien de terrestre ; et cette certitude qui
submergeait le tout : au-delà de cette vie non seulement je gardais mon identité,
mais je devenais pleinement “Moi”. (Il faudra encore dix-sept années pour que Tu m’aides à comprendre – enfin – que ce moi pleinement accompli – ne peut l’être qu’à travers Toi – ‘’revêtu de Ta Beauté, que Tu me donnes.’’)
Mais comment expliquer cela ? J’ai compris qu’une autre réponse venait de m’être
donnée. Rappelez-vous, une part de ma recherche avant 1970 venait de ce que –
sans aucun orgueil pourtant – je ne pouvais supporter l’idée que mon moi existant
puisse un jour retourner au néant. Somptueux cadeau de mon Seigneur... Mais
bien que prête à payer le prix de ce qui venait de m’être donné, tremblante, je le
suppliais de me laisser encore à mon existence terrestre : j’avais mes enfants et
tant de devoirs à accomplir avant de pouvoir me baigner sans remords dans ces
merveilleux rayons...

Les lettres d'Anne-Marie (Tome 2)

Lettre adressée à “La boîte à questions” de la Vie Catholique en 1972 (restée sans écho et sans réponse).


Puis-je vous demander de lire ce qui va suivre avec attention ?
Peut-être ne suis-je qu'une sotte qui va redire avec d'autres mots ce
que tout le monde sait déjà… mais que j'ai mis si longtemps à
comprendre ! Qu'importe, je vous laisse juge.
Je suis toujours surprise de voir les gens regarder par le mauvais
bout de la lorgnette. A moins que, comme dit St Paul “nous voyons à
présent comme dans un miroir”, c'est-à-dire : à l'envers !
Je lis toujours votre rubrique avec beaucoup d'intérêt, et à
travers les divers problèmes que l'on vous soumet, reviennent
toujours ces mêmes questions : – pourquoi la Mort ? – pourquoi la
Souffrance ? – pourquoi le Mal ?
Si Dieu existe, il est infiniment Bon, nous dit-on depuis des
siècles ! Comment expliquer aux êtres humains, dont la vie sur cette
terre n'est qu'une longue suite d'épreuves nullement proportionnées
au mérite ou au démérite de chacun, qu'elles sont voulues par ce
Dieu Bon, qui nous aime comme un Père !…
Il est évident que toute votre théologie n'a jamais su donner une
réponse convenable au malheur du monde !
Je suis peut-être bien présomptueuse, mais j'ai eu véritablement
la Foi, l'Espérance et la Charité, quand j'ai compris ce que je vais
essayer de vous expliquer (et que vous savez probablement mieux
que moi) ; mais pourquoi ne pas essayer de le dire simplement à
tous les gens simples, qui ne peuvent rentrer dans les arcanes de la Théologie ; cela pourrait peut-être les aider ?

Le péché originel nous a retranchés – coupés – de Dieu, faisant entrer le mal, la souffrance et la mort dans le monde. La désobéissance d'Adam a fait perdre à tous ses descendants le
bonheur pour lequel il avait été créé – C'est vrai – mais pourquoi ne
pas essayer d'expliquer aux pauvres créatures de cette terre, que ce
ne fut pas une punition, mais la conséquence d'un acte accompli
par l'homme, faisant mauvais usage de sa liberté (et si nous ne
l'avions pas nous ne serions que des robots ! ).
Dieu avait averti solennellement Adam : « Si tu touches à cet
arbre, certainement tu mourras. »
Quand une mère dit à son enfant : “ Si tu touches à ce bibelot
fragile et que tu le casses tu n'auras pas de dessert”, là, il s'agit
réellement d'une punition. – Par contre, quand elle dit : “Si tu touches
au feu, tu vas te brûler”. C'est différent – elle prévient :
l'avertissement montre la conséquence de la désobéissance.
Mettons les choses au pire : Une mère montrant à son enfant
une bouteille contenant un poison mortel, l'avertit : “Surtout n'en bois
jamais, car certainement TU MOURRAIS ! ” – Si l'enfant, qui n'est
qu'un enfant, se laisse entraîner par les mauvais conseils d'un
camarade, (qui, horreur suprême, sait qu'en incitant l'enfant à la
désobéissance, il va le faire mourir : mais peut-être est-il Jaloux ?) –
l'enfant donc subjugué, désobéit, boit et meurt…
Inutile de vous décrire la douleur de sa mère, elle est facile à
imaginer. Quoi ! Son enfant bien-aimé ne l'a pas écoutée, pas crue ! Il
a désobéi et il en est mort… Mais tout son amour et toute cette
douleur seront impuissants à réparer le mal qui a été fait – elle sera
incapable de ressusciter son enfant – ce pouvoir n'appartient qu'à
Dieu.

Or Dieu, qui est INFINIMENT TOUT, est entre autres, INFINIMENT JUSTE – IL NE PEUT PAS TRICHER. Il serait peut-être bon que j'intercale ici ce qu'écrivait le Père Standinger dans son livre “L'homme moderne devant les problèmes de l'au-delà” (page 128) :
… Car tout ordre, l'ordre naturel, comme l'ordre surnaturel, est
avant tout l'ORDRE, c’est-à-dire qu'il repose sur la conformité à la Loi
et non sur sa violation permanente ; autrement, l'exception
deviendrait la règle et la règle l'exception. Et le miracle, au lieu de
transcender l'ordre en question, en deviendrait la perturbation et
l'annulation ; résultat opposé à la Grandeur, à la Sagesse et la
Sainteté infinies de Dieu.
Inutile de souligner cette constatation de plus en plus évidente
pour les savants du monde entier. A cause de leurs extraordinaires
moyens d'investigation du “macro” et du “micro”- Cosme, ils
s'extasient devant l'Ordre inimaginable et inimitable qui a présidé à
“l'installation” de l'Univers !
Donc, Dieu avait averti Adam de la conséquence inévitable –
imparable – irrémédiable – qu'aurait son acte. Mais Adam, comme un
enfant inconscient du danger, a désobéi et en est MORT, entraînant
avec lui toute l’humanité… Responsable du malheur des hommes.
Quelle conséquence pour une imprudence ! Pauvre Eve, pauvre
Adam !
S'il avait effacé immédiatement cette conséquence, Dieu aurait
triché et perturbé une Loi établie par Lui ; ce qui d'ailleurs aurait pu
se répercuter gravement dans le COSMOS. – Car que savons-nous
réellement de celui-ci ? Que savons-nous des anges par exemple ?
Quand cesserons-nous donc de penser que nous sommes les êtres les
plus importants de l'Univers !…
Dieu s'il avait agi ainsi, ne serait plus infiniment juste, donc, il ne
serait plus Dieu.
Mais c'est ici que va se révéler l'AMOUR DE DIEU, plus grand
encore si cela est possible, que sa JUSTICE.
Si l'on s'en tient au pied de la lettre de la Genèse, nous montrant
un Dieu implacable punissant Adam et Eve en les chassant du
paradis terrestre, il devient proprement incompréhensible de voir
ce même Dieu envoyant ensuite son Fils, (c’est-à-dire lui-même)
naître, souffrir et mourir sur notre terre, pour nous sauver. S'il est
capable d'un tel Amour pour nous pauvres humains, c'est que c'était
la seule solution possible, conciliable avec son infinie Justice.
Non, Dieu n'a pas “puni” les hommes en les chassant du paradis
terrestre, ce sont les hommes qui, dans la personne d'Adam passant
outre l'Avertissement Divin, sont obligés de supporter la
conséquence de cet acte inconsidéré. – (La projection dans
l'Espace et le Temps ?…)
Or Dieu pur Esprit tout-puissant, nous ayant créés par
Amour, par Amour encore, va prendre un corps d’homme, en
naissant comme chacun d'entre nous, d'une femme : Marie. Il va
vivre, souffrir réellement dans son corps d'homme. En mourant sur la
Croix, il va RACHETER – dans le sens fort de ce mot : Délivrer en
payant une rançon (mais à qui ? certainement pas à Son
Père !) * – ce qui était PERDU, devenu INACCESSIBLE ; car c'était le
seul MOYEN compatible avec l'UNIVERSELLE JUSTICE.

Voilà la preuve de son immense Amour – Dieu n'a pas besoin des hommes ; comme Dieu il se suffit à Lui-même. C'est par Amour qu'il nous crée, c'est par Amour qu'IL NOUS SAUVE - du verbe Sauver :
tirer du danger, de la mort, du malheur. Nous n'existons que parce
qu'il nous PENSE et qu'il nous AIME. Ce serait si simple pour Lui de
nous renvoyer au néant dont il nous a tirés. Un dieu indifférent le
ferait : “Vous m'ennuyez avec tous vos cris, vos méchancetés... Pfft !
Je vous balaie, je vous efface...”. Mais LUI, notre Dieu d'Amour, voit
la souffrance de chacun de nous et plein de compassion envoie son
AMOUR, c'est-à-dire son FILS prendre un corps d'homme, la
souffrance d'un homme, la mort d'un homme et quelle mort ! JÉSUS,
qui pour effacer la désobéissance du premier homme, n'a qu'un seul
mot à la bouche : “Père que ta Volonté soit faite ! ”
Or, la VOLONTÉ DE DIEU est que nous vivions de la Vie ÉTERNELLE
– qui n'a aucune mesure avec notre misérable vie terrestre. Cette
Vie, nous la possédions avant notre grand malheur et Jésus, Fils de
Dieu, Amour de Dieu fait homme l'a récupérée pour nous.
Pour accéder de nouveau à cette VIE, il faut absolument passer
par la Mort, (résultat de la “faute” d'Adam) – Mais le Christ nous
l'apprend en ressuscitant : Il a vaincu la Mort par l'Amour. Si
nous allons à sa suite, nous aussi nous vaincrons. Il nous suffit de le
croire, d'aimer Jésus et même peut-être que de se laisser aimer par
Lui.
– Car le Jugement particulier à la mort de chacun d'entre nous n'est pas autre chose : La Blancheur de Jésus – la grisaille de notre âme, face-à-face. C'est nous-mêmes qui nous jugerons
en toute lucidité, face à LUI. Notre salut dépendra alors de notre confiance en l'Amour de Dieu. Saint Jean ne dit-il pas : “Et même si votre coeur vous condamne, Dieu est plus GRAND que votre coeur”. Voilà une phrase qui, si elle était répandue à travers le monde, devrait sauver tous les humains.
Sainte Thérèse de Lisieux, la petite Thérèse, qui avait si bien compris l'Amour de Dieu disait : “On pourrait croire que c'est parce que je n'ai pas péché que j'ai une si grande confiance dans l'Amour de Dieu. Dites-bien, ma mère, que si j'avais
commis tous les crimes possibles, j'aurais toujours la même confiance en LUI. Je sens bien que toute cette multitude d'offenses serait comme une goutte d'eau jetée dans un brasier ardent”.
La voilà LA VÉRITE. Pourquoi ne la dit-on pas aux pauvres hommes ? L'exemple de Gilles de Rais devrait nous convaincre. Peut-être le plus grand pécheur de tous les temps – un monstre – Avant de mourir sur le bûcher, touché par la Grâce, il fit preuve d'une Foi si extraordinaire qu'il ne cessa de répéter “que Jésus pouvait tout lui pardonner et le prendre immédiatement en Paradis”. Une Foi à ce point contagieuse, que ses accusateurs et les parents de ses mille petites victimes tombèrent à genoux et se mirent à prier pour lui et avec lui !
N'est-ce pas ce que Jésus nous répète tout au long de son Evangile : “Va, ta Foi t'a sauvé ! ” – La Foi en son Amour et rien de plus.
J'en arrive à me dire qu'avec un tel Amour, le prince des anges déchus, pourrait être sauvé. Il suffirait qu'il cesse de s'obstiner dans son Orgueil et son Désespoir, par lesquels il continue de
faire aller tout de travers dans le monde !… Qu'il plie le genou devant l'AMOUR ; sachant que même “si son coeur le condamne, Dieu est plus grand que son coeur” et qu'Il peut tout lui pardonner.
J'ai parfois pensé que c'est peut-être à nous, chrétiens, de le lui dire. Saint François parlait bien au loup de Gubbio pour lui demander de cesser de faire mal aux êtres humains !
Est-ce que tous les chrétiens, mes frères, ne pourraient pas s'unir pour lui adresser cette supplique : “Je t'en prie : arrête de tourmenter notre pauvre monde ; va trouver notre Dieu et demande-Lui de te pardonner le mal que tu as fait, comme nous te pardonnons le mal que tu nous as fait. – Tu verras, l'Amour de Dieu est infini et tout redeviendra comme avant”.
J'arrête ici mon Père, cette lettre sans doute bien sotte, mais dictée par un immense amour qui, lui, ne peut être inspiré que par DIEU.
* Je maintiens le mot ‘’rançon’’. Mais à qui donc Jésus a-t’il payé de sa personne cette rançon ? Certainement pas à son Père, puisqu’il est ‘’semblable au Père’’ et que "le Père et Lui ne font qu’un’’.
C’est tellement idiot de penser cela : « Jésus se verse une rançon à soi-même !!! »
Je m’étonne que pendant longtemps l’Eglise nous a laissé chanter ‘’pour apaiser de Dieu le courroux !’’.
Il n’y a pas trente-six solutions à la question posée ! la seule envisageable et qui explique Tout, c’est que c’est à Satan lui-même – Homicide depuis le commencement – que Jésus Dieu est venu reprendre ce que celui-ci (le jaloux !) avait pris en otage : Le Genre Humain…

Les lettres d'Anne-Marie (Tome 3)

- 28 février 1989

Lettre au “Pèlerin Magazine”


Le Père bénédictin qui dessert les sept paroisses de ma campagne, me disait l'autre jour : «l’'Église de France devient athée ! »
Si je vous rapporte ce propos, auquel je souscris avec vigueur, c'est à cause de l'article intitulé “Aux portes de l'au-delà” paru dans votre magazine 5543 du 24 février 1989.
Quelle tiédeur !… Et pourtant votre journal “Le Pèlerin” n'est-il pas celui
par qui passe la “Bonne Nouvelle” ? Qui, mieux que vous, sautant sur l'occasion
offerte, pouvait enfin rappeler à vos lecteurs la Vérité, révélée par Jésus-
Christ, rapportée par les Evangélistes, confirmée par Saint Paul – et redite
par nos contemporains “revenus des portes de l’au-delà”?
– L'essentiel de leur message à tous : à savoir que cette vie terrestre
n'est qu'un passage dans un corps matériel, donc périssable. Que la mort de ce
corps libère un autre corps “incorporel”, c'est-à-dire non soumis aux lois de la
physique, telles qu'elles nous sont connues. Corps “subtil” – glorieux –, mais
gardant son identité. Corps semblable à celui de Jésus après “qu'Il se soit
relevé d'entre les morts”. Différent, mais visible pour les témoins privilégiés à
qui Jésus a voulu se montrer. Témoins tellement certains de ne pas avoir été
le jouet d'une hallucination, que “les pauvres gars qui fuient totalement
désemparés, le samedi saint”, (propos cités par Henri Guillemin dans son livre “L’affaire Jésus”) seront complètement transformés en quelques jours !
Jésus, qu'ils avaient vu mourir sur la croix est de nouveau Vivant au
milieu d'eux – Différent, mais Vivant – A tel point persuadés de cette
évidence, de cette réalité, qu'ils n'hésiteront pas à affronter le martyre plutôt que de renoncer à dire ce qu'ils ont à dire, ce qu'ils ont vu, tant c'est
prodigieux ! – “Je crois, dit Blaise Pascal, les Témoins qui se font tuer” –
On ne se fait pas tuer pour une imposture ! (et la plupart de ces témoins ont
été martyrisés).
Alors, mes frères et soeurs dans le Christ ? Cela fait deux mille ans bien
sûr... Peut-être est-ce le moment de nous rappeler ou de lire cette parabole de
Jésus, que rapporte Luc (chap : 16, vers : 19 à 31), sur le mauvais riche et le
pauvre Lazare ?
Résumons : tous les deux moururent - et dans ce “séjour des morts”, il y a un
étrange dialogue entre Abraham avec “Lazare en son sein” et le mauvais riche.
Celui-ci en proie aux tourments, demande à Abraham d'envoyer Lazare dans la
maison paternelle, pour faire la leçon à ses cinq frères, de peur qu'ils
n'aboutissent eux aussi dans ce lieu de tourments. Mais relisons la fin :
Le riche dit à Abraham : “Si quelqu'un de chez les morts va les trouver, mes
frères se repentiront”. Abraham lui dit : “Du moment qu'ils n'écoutent ni
Moïse, ni les Prophètes, même si quelqu'un ressuscite d'entre les morts,
ils ne seront pas convaincus”. »
Allons, reconnaissons que c'est à nous que ce discours s'adresse !
Reprenons un passage de votre article :
– La mort connaîtrait-elle des allées et venues, permettant d'en
rapporter une image plus humaine ? – Non, affirme le P. Bernard Matray,
chercheur engagé dans l'éthique des sciences de la vie, au centre Sèvres à
Paris... (Ô Seigneur !). “La vie est une, il n'y a pas de vie après la vie qui puisse
entrer dans le champ de nos expériences” !!! Excusez-moi, M. Matray, mais vous me faites penser à Marcellin Berthelot chimiste académicien, qui disait à
la fin du siècle dernier : “L'univers est désormais sans mystère” !!!
Je me permettrai de vous citer Hugo : “De ce qu'un fait vous semble
étrange, vous concluez qu'il n'est pas. On a vite fait de dire : c'est puéril. Ce
qui est puéril, c'est de se figurer qu'en se bandant les yeux devant l'inconnu,
on supprime l'inconnu ! ” - Ou Gilson (ironique) “Ce qui étonne les professeurs
perd pour eux le droit d'exister ! ”
Alors Messieurs, êtes-vous à ce point enfoncés dans la matière, que tout
ce qui n'est pas “enfermé” dans cette matière ne vous paraît pas crédible ou
croyable ?
Si vous étiez poisson, votre seul élément connu serait l'eau. – Alors, vous
nieriez qu'il existe l'air, ou le feu parce que vous ne les avez jamais vus… ?
Vous êtes des hommes connaissant TOUT ! C’est-à-dire tout l'univers
physique que nos savants ont maintenant traqué et expliqué dans ses plus
grandes profondeurs. Bien sûr, notre univers physique n'aura bientôt plus de
secrets pour nous. – Est-ce à dire qu'il n'y a rien – au delà, – à côté – ou
en plus ? … Comme les poissons qui dans leur eau ne peuvent pas connaître,
sous peine de mort, l'atmosphère que nous respirons ! (à propos, pourquoi le
signe des premiers chrétiens était-il un poisson ?…)
Allons, un peu de bon sens ! Que craignez-vous ? Qu'on vous traite de
“débiles”, de “crédules” ? Ah ! Le beau pays de Monsieur Descartes où l'on ne
croit plus que ce que l'on voit ... et encore !
Vrai, “la Fille aînée de l'Eglise”, Jésus disait que “les premiers seront les
derniers”... Mon curé a-t-il raison de penser que tu deviens athée ?
Tu es malade de trop de science et de philosophie ! Rappelle-toi cette
phrase de Jésus, rapportée par Luc (chap.10, v : 21) “Je te bénis, Père,
Seigneur du Ciel et de la terre, d'avoir caché cela aux sages et aux habiles et
de l'avoir révélé aux tout petits” – Et Pascal, toujours lui, dans sa nuit de
Certitude : Feu – Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob – non des
philosophes et des savants… Dieu de Jésus-Christ –
Et voici que Celui-ci fustigeait les pharisiens qui lui demandaient des “signes”...
Les juifs de son époque en avaient pourtant bien plus que nous, puisqu'ils
l'avaient LUI, Jésus.
Génération d'incrédules, disait le Seigneur. – Que dirait-il aujourd'hui ?
Des signes ? Mais Dieu sans arrêt nous fait signe et nous ne voyons rien,
enfoncés que nous sommes dans la matière, le matérialisme, la société de
confort et de consommation !… Le bien-être ! – nous en sommes arrivés à croire
qu'il est le mot de la Fin ! Cela nous suffit-il vraiment ?
Des Signes ? “Sois attentif, et sache que je suis Dieu”. Qui prend
encore le temps d'être attentif ?
C'est vrai, nous sommes entourés de signes, mais aveugles que nous
sommes, nous ne savons pas les voir ; ou alors, nous les appelons hasard ou
coïncidence. Avec notre objectivisme imbécile, nous ne savons plus les
percevoir.
Seulement voilà, en cette fin de vingtième siècle où la Science fait de
tels bonds en avant que notre Philosophie en perd l'équilibre, nous arrivons à la
croisée des chemins où tout devient possible. Une preuve parmi d'autres : les
technologies cardiaques, biologiques, chirurgicales… Il y a cent ans ou cinquante, on mourait tout bonnement !… Aujourd'hui, on va vous “repêcher”
(tiens ! encore nos poissons !) aux “portes de la mort”!
Et tous ces gens “repêchés” disent la même chose : La vraie Vie, ce n'est
pas celle que nous connaissons sur cette terre, c'est seulement après qu'elle
commence, ou plutôt qu'elle continue. Car n'oubliez jamais l'avertissement
de Jésus : “La Vie après la vie sera ce que vous la ferez dès ici-bas” –
Pas de laxisme dans cet avertissement, “Il sera donné à chacun selon ses
oeuvres”, mais Dieu fort heureusement n'est pas un “comptable”, et de toute
façon Il ne compte pas comme nous, rassurez-vous ! Et Péguy d'écrire “Je ne
suis pas un méchant homme” dit Dieu !…
“Paix aux hommes de bonne volonté”.
Qu'y a t-il d'intéressant à retenir dans tous ces rapports de N.D.E ?
Une chose évidente et commune à TOUS. Mais je reprends votre article :
« Ce qui frappe, c'est surtout la transformation intérieure du sujet qui fait
penser à un véritable éveil de la vie spirituelle, (c'est moi qui souligne). La NDE
provoque en effet un bouleversement complet des systèmes de valeurs de
l'individu concerné. Vouloir faire bonne impression, désirer la célébrité,
craindre le rire des autres, tout cela disparaît de la vie, comme s'il s'agissait
d'une maladie infantile… A l'inverse, l'attention aux autres, un mélange
complexe de patience, de tolérance, de compréhension connaissent une hausse
à la verticale. Et la peur de la mort a disparu pour laisser place à une immense
volonté de vivre. » (Ce texte provient du livre de Patrice Van Eersel : “La source noire”)
Alors là, bravo !… et cela ne vous rappelle pas la transformation radicale
des disciples témoins de la Résurrection du Christ ? – Sont-ils devenus fous,
nos faux morts ?… Et quelle est cette noble folie qui, de votre propre constatation, les rend attentifs aux autres ? – Patience, tolérance,
compréhension, compassion – n'est-ce pas la Voie enseignée par Jésus-Christ
pour accéder à la Vie éternelle ? Et : “La peur de la mort disparaît pour laisser
place à une immense volonté de vivre”.
Comment en effet, pourrait-on après CELA, avoir peur de la mort ?
Persuadé, puisqu'on est quasiment passé par là, que, loin d'être
l'anéantissement prôné par certains beaux esprits, la mort est la Porte par
laquelle on accède à la Vraie Vie. – Et pourquoi “cette immense volonté de
vivre” ? La phrase est incomplète ! – parce que tous ces gens-là, reviennent de
“là-bas” convaincus que c'est ICI et MAINTENANT que tout commence.
Qu'il est nécessaire d'accomplir au mieux notre “traversée terrestre”, non pas
dans le bien-être corporel, mais dans l'AMOUR – et de le faire savoir aux
autres.
2.000 ans pour çà ! Pour de nouveaux Témoins, qui redisent avec d'autres
mots la même chose que les autres… Avec quel regret en même temps, de
devoir “rentrer dans leur corps”! Le seul que nous connaissons, Messieurs et
que nous chérissons ! Mais eux, à regret obéissent et reviennent, “éblouis”,
comme les Apôtres à la Transfiguration et nous racontent ce qu'ils ont vu et
entendu...
Et vous allez faire la fine bouche ? Vous plaindre que “la mariée est trop
belle” ?
La Patience de Dieu est infinie, mais tout de même !…
Alors, au nom de Dieu notre Père, de son Fils Jésus, “donné en rançon
pour racheter ce qui était perdu”… (Dans la matière ?) – laissez l'ESPRIT
souffler où Il veut.
Ne voyez-vous pas que l'humanité n'en peut plus de cet “humanisme”
qu'Aldous Huxley appelait “un anthropocentrisme hérétique” ? Le Père
Vernette a raison de citer “il y a une immense aspiration à l'Espérance et un
irrépressible désir de la Vie Eternelle” !
Et si pour une fois ce désir était : réalité ? – DIEU NOUS AIME –
Comment, devant l'angoisse de ses enfants, que la Science ne rassure pas, bien
au contraire, ne voudrait-Il pas dissiper leurs craintes ? – Et à cause de cette
science même, ou par les moyens de cette science même, poussée à son
paroxysme – qui n'arrive plus à définir dans son “verbiage”, si un mort est
vraiment mort !…
C'est vraiment vouloir nier l'évidence. Et plutôt que de la reconnaître et
de la proclamer de toutes vos forces, vous membres de l'Eglise du Christ et
ses témoins, vous vous réfugiez frileusement derrière un “subconscient” !
Avez-vous peur que l'on vous accuse de “récupération” ? Plutôt que d'en
faire le mauvais usage que l'on en fait aujourd'hui, laissez-moi copier dans le
dictionnaire les deux premières significations de ce mot récupérer :
Récupérer : rentrer en possession de, retrouver après avoir perdu.
Ou : recueillir pour utiliser ce qui pourrait être perdu.
Nous n'avons pas à en rougir ; Jésus n'est il pas venu, selon ses propres
paroles, sauver ce qui était perdu ? Coïncidence ?… A vous de décider.
Quant à moi, qui ne suis qu'une croyante, (je n’ai jamais eu de NDE !),
devant le doute, je ne m'abstiens plus – Plutôt que de prendre le risque que
cette “épître” ne voit jamais le jour, (comme n'a jamais vu le jour une autre
écrite en 1972 à votre confrère “la Vie Catholique” où par une coïncidence prémonitoire j'écrivais : « car le jugement particulier à la mort de chacun
d'entre nous n'est pas autre chose : la blancheur de Jésus-Christ, – la grisaille
de notre âme, face-à-face. C'est nous-mêmes qui nous jugerons en toute
lucidité, face à LUI. Notre salut dépendra alors de notre confiance en son
AMOUR – l’AMOUR DE DIEU. St Jean ne dit-il pas : “Même si votre coeur
vous condamne, Dieu est plus grand que votre coeur”. »
Seize ans après cet écrit, nos “rescapés” que disent-ils d'autre ?
Forte de mes convictions inspirées par plus grand que moi, je décide
qu'après vous en avoir laissé la primeur, sans réaction de votre part, je ferai
copie et adresse de ce message à d'autres journaux, pas forcément
“catholiques”.
Je reste en cela fidèle à Jésus-Christ. Il disait : “Il ne faut pas mettre
la lumière sous le boisseau”. Relisons donc l'Evangile et disons avec Pierre :
“Maître à qui irions-nous, Tu as les paroles de la Vie Eternelle”.
Un très grand merci au Père BRUNE, de la part de tous ceux à qui il a
redonné l'Espérance.

CE QUI M'EST ARRIVE EN 1983

Maman est morte le 15 septembre 1982

Du 16 au 30 avril 1983

Séjour chez Bruno et Michèle, en pleine crise de dépression. Reçue cinq fois par le docteur F, qui écoute attentivement le "récit de ma vie : mon ‘’itinéraire mystique’’, parallèlement à ma vie quotidienne, depuis treize ans – Il écoute, comprend et quelquefois précède ma pensée ou mes explications. Après cela il me dit : " Nous allons essayer de transformer le charbon en diamant "…

Il pratique une acupuncture à distance qui consiste à tenir le pouls du patient et avec l’autre main, dessine autour du corps du malade, suit des lignes de forces, expliquant que dans le champ magnétique ou psychique entourant ce corps, il peut se produire des fuites : C’est ce qui provoque la maladie. Il faut donc ré-harmoniser ce champ de forces et "colmater" ces brèches. Pour cela, il se sert de toute une série de lentilles qu’il braque vers le sujet.

À la première séance, il me fait une pointe de feu au sommet du crâne. Pendant la troisième séance, il observe que je suis enfermée dans une sorte de coque, depuis le cou jusqu’aux genoux. À la quatrième séance, il m’explique que chaque partie du corps : foie, reins, rate, intestins, poumons etc. est commandée par un méridien. Il arrive qu’un de ceux-ci se bloque et provoque une perturbation dans l’organe concerné – et c’est la maladie – Mais dans mon cas, chose étonnante, tous les méridiens sont bloqués par quelque chose d’unique, qui agit sur l’ensemble de ma personne, – une force mauvaise extérieure à moi. Le traitement de ce jour consistera à braquer une lentille de bas en haut à dix centimètres environ de ma cheville gauche. Lors de ces séances il se sert de temps à autre d’un stylet relié à des appareils électroniques, mais dont jamais il ne me touche. Le docteur F. tient toujours mon poignet, (le pouls, je pense) pendant ces manipulations.

Quand je sors de chez lui, durant une petite heure, un mieux se fait sentir, comme si un étau se desserrait de ma tête, et que tout à coup, je réapprenais à respirer... mais cela ne dure pas, et je me trouve de nouveau plongée dans le plus affreux des marasmes. Comme à chaque crise de dépression : dégoût de tout et, surtout de moi-même, une taupinière devient montagne insurmontable à franchir – impuissance à prendre une décision – enfermée au fond d’un puits noir d’où il n’y a aucune possibilité de sortir – désespoir total et définitif. De quelque côté que je me tourne, c’est la détresse et l’enfer. Le soir de la quatrième séance, j’ai eu une crise de larmes qui a duré plusieurs heures, j’ai vraiment cru que je ne pourrais plus jamais m’arrêter de pleurer ! Alors, je décidais de rentrer chez moi, ne voyant pas la fin de ce traitement, qui pouvait durer un an, deux ans, etc.

Le lendemain, cinquième séance, j’annonçais ma décision au Dr F, le remerciant beaucoup de tout le mal qu’il s’était donné pour moi, la foi avec laquelle il pratique sa thérapie, son extrême gentillesse et sa compréhension. Je lui expliquais qu’en un dernier sursaut de volonté, j’avais décidé de ré-affronter mes problèmes, toutefois en me faisant aider d’antidépresseurs dans la journée. Le Dr F qui ne prescrit aucun médicament m’a approuvée.

Trois jours après mon retour dans le Nord, faisant un très grand effort, j’allais voir mon médecin habituel, pour lui expliquer pourquoi je faisais de la dépression : Il n’y a pas d’issue, car pas de solution à mon problème... Il m’a prescrit du Survector, me disant que cela allait m’aider, et que dans peu de temps, j’allais même refaire des projets ! – je n’en demandais pas tant !

Samedi 21 et dimanche 22 mai, retour en Bretagne pour quarante-huit heures. Michèle (ma belle-fille) me remet une lettre de sœur Thérèse Johannes, religieuse dont j’ignore jusqu’à l’existence. Je suis encore très dépressive, malgré dix-huit jours de Survector. Mais en rentrant, j’entreprends le grand nettoyage de la maison. Tôt levée, quelquefois vers quatre heures, avec une énergie que je croyais à tout jamais disparue, je passe quinze jours à tout récurer à fond : intérieur et extérieur. Tout en restant à l’écoute (qui est une découverte) de France Culture. Je suis de plus en plus "extralucide" aux messages que je découvre dans chacune des émissions. Elles me paraissent toutes converger vers le même point : Dieu – que ce soit philosophie, sciences, littérature, etc. Chacune apporte de l’eau à mon moulin et m’illumine de certitude en Dieu retrouvé !... Ainsi que je l’écris vers le 20 juin au docteur F de Rennes lui parlant de sœur Thérèse qui prie incessamment pour moi : la lumière grandit en moi de jour en jour !

... Et puis, et puis... le 7 juillet j’ai perdu le contrôle. Je me suis envolée !

 

Première lettre de sœur Thérèse, 16 mai 1983 :

Madame,

Permettez-moi de me présenter car vous ne me connaissez pas.

Je suis la religieuse aide-paroissiale au presbytère de V. Votre fils Bruno m’a rendu plusieurs services, entre autre la réparation de mon transistor, sans compter ses conseils appréciés pour l’achat d’un Minicassette.

Quand je lui ai demandé combien je lui devais, il m’a répondu : " vous ferez une petite prière pour ma maman". Je partais le lendemain pour cinq jours de retraite sur Thérèse d’Avila et saint Jean de la Croix et votre pensée m’a été beaucoup présente. Aussi je tiens à vous l’exprimer.

Le Seigneur permet parfois que nous passions par des épreuves de santé très pénibles, mais c’est pour un plus grand rebondissement dans son Amour : "Tout est grâce" disait saint Paul.

Pour l’avoir expérimentée, j’ai connu la dépression pendant plusieurs années, trop fatiguée par l’Enseignement. Je comprends maintenant que cet état m’a purifiée et m’aide à comprendre les autres et à les écouter.

Je vous envoie une image accompagnée d’une pensée de Thérèse d’Avila que j’aime beaucoup. (Que rien ne te trouble, que rien ne t’épouvante : Dieu seul suffit.)

Et quand vous regarderez ce visage, il vous rappellera qu’une "petite sœur de Jésus" prie pour vous ; pour que vous connaissiez la PAIX et la JOIE, que Dieu donne par son ESPRIT d’AMOUR.

Bonne fête de Pentecôte.

Veuillez agréer, Madame, l’expression de mes sentiments respectueux et l’assurance de ma prière.

Thérèse – Joannes

Chère Sœur Thérèse,

Venue à C.N trente-six heures à la Pentecôte, ma belle-fille m’a remis votre lettre.

Je ne saurais vous dire à quel point j’ai été touchée de votre démarche. Émue d’abord, de savoir qu’une religieuse inconnue avait prié pour moi – je ne pensais pas mériter cette attention – Reconnaissante aussi de constater qu’il existe encore de par le monde, des êtres qui n’hésitent pas à tendre la main à d’autres êtres, pour leur apporter un peu de réconfort.

Je garde précieusement et votre lettre et le portrait de sainte Thérèse d’Avila, elle, dont je cite si souvent la phrase : "Me muero, porque no muero" – Je me meurs de ne pas mourir ! – Comme saint Paul s’écriait "Qui me délivrera de ce corps de mort !".

Je sais qu’il faut attendre notre heure, mais la vie, qui cependant m’est matériellement facile, est parfois très pénible parce que privée de Dieu – Voyez-vous, à la suite de ce que l’on a appelé "délire mystique", j’ai approché Dieu d’assez près pour savoir qu’Il est la Source dans laquelle j’ai aspiré à me confondre.

Mais depuis lors, il y a eu de tels événements dans ma vie que je me suis coupée de Dieu, de la religion. Je ne sais plus, au reste, si Dieu existe ou s’Il n’est qu’un produit de mon imagination – pour ne pas dire folie !

"Nul royaume ne peut vivre divisé contre lui-même" – disait Jésus – C’est pourtant ainsi que je survis depuis dix ans ; mais dans quel état par moments ! Ces crises de dépression de plus en plus fréquentes et longues en sont le témoignage.

Que votre prière soit entendue, pour qu’au moins je ne fasse pas souffrir mon entourage et qu’à défaut de paix intérieure, je puisse la laisser croire aux autres. Je pense à mon grand garçon Bruno, dont je suis heureuse de constater la serviabilité, et qui vous a demandé cette prière, prouvant ainsi qu’il est fort sensibilisé par l’état de sa maman : Que je trouve la force nécessaire pour continuer mon parcours en cessant d’être un boulet pour les autres.

Je vous redis un grand merci et vous assure de toute ma sympathie.

Anne-Marie

De sœur Thérèse, 10 juin 1983 :

Chère Madame,

À mon tour d’être surprise en recevant votre lettre. D’abord je n’attendais pas de merci... ni tant de confiance !

Aussi depuis, je vous "porte dans mon cœur", dans ma prière presque continuelle pour vous. C’est aujourd’hui, fête du Cœur de Jésus, que je tiens à vous livrer son message, ou plutôt, car vous le connaissez, à vous le redire :

"Tout est grâce, tout est providentiel : la santé, la maladie, la richesse, la pauvreté, etc., et c’est à nous, à travers tout de croire à l’Amour."

Pour moi, c’est ma force ; et c’est ma petite mère, qui, dans mon enfance, m’a communiqué la confiance et l’amour de Dieu qui l’animaient.

Maintenant, "je comprends" que les épreuves de santé, que j’ai connues il y a des années et qui m’ont obligée à quitter l’enseignement, étaient dans le plan de Dieu : cela m’oblige à écouter ceux qui traversent des épreuves de la sorte.

Vous parlez de "délire mystique" – c’est un terme péjoratif... Seuls ceux qui approchent Dieu "de très près" dans la prière, peuvent comprendre combien la blessure d’amour est profonde ; combien elle laisse l’âme désemparée, déçue de devoir encore vivre avec ce corps qui la sépare de Dieu.

Il ne faut pas penser que c’est le produit de votre imagination. Même si cela était vrai, cette expérience vous a marquée si profondément, que treize ans après, vous vous en souvenez encore. C’est l’esprit du mal qui s’est emparé de l’affaire pour vous couper de Dieu, en vous faisant croire à l’illusion. Il aurait été bon de confier la chose à un conseiller spirituel expérimenté.

Mais ne revenons pas en arrière... Le passé est du passé et "Dieu fait tout concourir au bien de ceux qu’Il aime" – Il nous a aimés le premier.

Aujourd’hui, pour un service matériel rendu par votre fils à Thérèse, bien souvent nommée "l’enfant gâtée du Bon Dieu", Dieu vous redit son amour, sa tendresse infinie... Frappera-t-il en vain à la porte de votre cœur ? Je ne crois pas... Laissez-vous faire par Dieu... Vous tenez le secret de la joie et du bonheur.

– Croire à la tendresse de Dieu, s’abandonner comme le petit enfant qui a toujours besoin de la main de son Père – Pour cela, il faut accepter de rester petit, reconnaître qu’on a eu tort de vouloir marcher seul. – Faire le calme en soi – C’est une prière sans paroles, car c’est l’abandon de l’amour.

La joie que vous donnerez à ceux que vous aimez et qui ne comprendront pas ce "retournement subit" augmentera votre joie et votre amour. Et les années qui vous resteront sur cette terre ne vous seront plus un poids, mais un tremplin pour aimer davantage.

Hier soir, je suis allée aux " Vigiles", chez les carmélites de Rennes. J’aime prier avec elles ; et je vous ai confiée particulièrement au cœur de Jésus.

Que l’Esprit Saint à qui j’ai recommandé "cette réponse" dès que j’ai compris à quoi m’engageait votre lettre, vous inonde de sa lumière et vous embrase de son Feu, pour la plus grande gloire de la Trinité.

Thérèse Joannes

 

20 juin 1983

Chère Sœur Thérèse,

Cette semaine, je pensais trouver le temps de vous écrire longuement, mais j’ai dû faire face à pas mal de choses. Cela sera donc pour la semaine prochaine.

Ces quelques lignes pour vous dire : merci ! merci ! Grâce à vous, grâce à votre prière, je re-nais – le jour se lève de nouveau pour moi ! Vous êtes si aimée de Jésus que je voudrais confier à votre prière deux âmes qui se sont trouvées sur mon chemin cette semaine. J’ai essayé de les aider, moi qui suis si faible ! Moralement, j’ai fait tout ce que j’ai pu ; mais au-dessus de tout cela, il faut la prière, pour que ces œuvres entreprises aboutissent. Donc, j’ai encore besoin de vous, car je ne sais plus tellement prier...

Merci de votre lettre merveilleuse ; comme vous pouvez le comprendre, elle m’a sûrement donné la force de tendre la main, cette semaine, à ceux qui en avaient le plus besoin.

Toute ma reconnaissance et mon affection à vous, chère Thérèse.

Anne-Marie

 

6 juillet 1983

Très chère sœur Thérèse,

Toujours pas le temps de vous écrire une longue lettre. Je pense à vous avec tellement de gratitude que je vous envoie ce petit mot pour vous le dire.

Comme vous êtes l’enfant gâtée du Bon Dieu, le meilleur moyen de parler à un enfant, c’est de lui montrer des images. Je vous envoie donc celles que j’ai trouvées dans le vieux missel de mon père. Elles sont un peu vieillies, mais sa vie durant, elles ont marqué les pages du livre où tous les jours, il lisait la Messe.

J’espère aller bientôt à Rennes et avoir la joie de vous rencontrer. Pour vous faire patienter, je vous joins également cette image de la Vierge, en remplacement de celle de sainte Thérèse d’Avila dont vous vous êtes privée pour moi – Sachez qu’elle fut la clef qui m’a ouverte la "Porte de la Perception".

 

Toute cette lumière en moi qui ne cessait de grandir... La porte s’ouvrait de nouveau, grâce aux prières de Thérèse... Le lendemain de cette dernière missive, le sept juillet, je me suis ré-envolée. Oh pas du tout de la même façon qu’en 1970 ! Je veux dire que mon approche de la "lumière" ne fut pas du tout la même... Au reste, s’il en avait été ainsi, je me serais certainement méfiée : on ne peut pas passer deux fois par la même expérience sans en avoir tiré quelque leçon !

Comment traduire par des phrases tout ce qui s’est passé alors, psychiquement et physiquement ? Je ne peux rien dire de cette période : treize jours environ ; simplement qu’elle fut terrible et pour moi et pour les miens, qui voulurent me garder à la maison. Physiquement, je vivais dans une sorte d’univers parallèle, où tout était déphasé, même le temps et la vitesse. Je me souviens très nettement avoir vu le médecin entrer et sortir de la maison, alors que je l’observais de la fenêtre du premier étage, à la vitesse d’un film passé en accéléré. Moi-même, je me déplaçais paraît-il, "comme l’éclair", à tel point que si j’arrivais à me sauver au jardin, ils avaient le plus grand mal à me rattraper ; alors qu’à la suite d’une opération aux orteils, je ne peux plus marcher que lentement ! Bien entendu, je ne pouvais absolument plus dormir... Mais tout cela n’est rien à côté de ma détresse psychique : sans arrêt j’étais confrontée à des dilemmes à résoudre dans le plus bref délai, des puzzles mentaux à reconstituer à toute allure : il me fallait payer le prix de ce que je venais de trouver, c’était une question de vie ou de mort, pas pour moi, mais surtout si je voulais sauver ceux que j’aimais et la planète tout entière ! Non, aucun mot ne peut exprimer cette souffrance. D’une manière très différente de 1970, mais pour le même but : Dieu.

Le quinze juillet, mon fils Bruno est venu me chercher pour la Bretagne, car Michèle et lui croyaient pouvoir me sortir de cette crise ! Etaient-ils tous en état d’aberration pour m’avoir laissée partir ? Treize années se sont de nouveau écoulées et je n’arrive toujours pas à comprendre comment ils ont pu le faire ; il aurait pu arriver n’importe quoi ! La Providence veillait, c’est certain. Je ne peux pas parler non plus de mes deux jours passés là-bas, c’est trop douloureux ; simplement une image surnage : mes deux petits-fils, cinq et trois ans, qui, me voyant sangloter, grimpaient sur mes genoux pour m’embrasser et se serrer en silence contre moi pendant de très longs moments. Non les anges du ciel ne m’avaient pas abandonnée et déléguaient leurs pouvoirs à ces autres anges : nos tout-petits. (De même qu’au début de "ma crise", assise par terre à la porte de mon jardin, alors que je faisais peur aux adultes, deux petites voisines de sept et huit ans étaient venues se jeter dans mes bras !)

Alors, j’ai enfin rencontré sœur Thérèse. Mais dans quelles conditions ! Ce fut une terrible épreuve – En présence du prêtre dont elle tenait le presbytère, elle ne put me dire un seul mot. Sitôt que j’ai ouvert la bouche, il me fit taire et ce fut un bref réquisitoire contre moi où ma pauvre tête ne comprit pas grand-chose. Puis il donna l’ordre à Thérèse de me rendre mes lettres immédiatement, ce qu’elle fit. Après quoi, il me demanda de partir en disant qu’il ne voulait plus jamais entendre parler de cette histoire... Affreusement bouleversée, car je croyais rencontrer auprès d’elle un appui, ma pauvre tête à la dérive, mon fils m’a emmenée. Avant de remonter en voiture, je me suis retournée, et Dieu soit loué ! J’ai vu Thérèse au coin de la maison me faire signe de la main et j’ai pu lui répondre.

Le soir même, à ma demande instante, j’ai pu être reçue vers 22h00 par le Dr F qui m’a écoutée très attentivement, tandis que mon fils attendait dans le hall en compagnie de Madame F. Bien sûr j’étais dans un état de grande exaltation, mais je pense avoir pu lui expliquer ce qui s’était passé depuis ma dernière visite et mon dernier courrier. À un moment, il m’a demandé de l’excuser et est sorti de son bureau. Voyant qu’il tardait à revenir, je suis sortie à mon tour et je l’ai retrouvé dans le hall avec sa femme et mon fils. Ils avaient parlé de moi tous les trois, j’en étais certaine ; je l’ai compris à leur gêne. Après coup, j’ai pu comprendre le trouble de mon fils, complètement perdu dans une situation qu’il n’avait pu, de loin, imaginer et à laquelle il était à présent confronté. Il avait assisté à "l’entretien" avec sœur Thérèse et il avait dû confier son désarroi au docteur et à sa femme. – Alors, je crois que je me suis senti trahie. Je ne sais plus ce que j’ai dit, mais en une seconde, tout s’est retourné de nouveau contre moi. Madame F a ordonné à son mari de me mettre dehors, car disait-elle "cette femme me fait peur" ! Sur quoi, le Dr F m’a prié d’excuser sa femme et m’a demandé de partir immédiatement. Ce que Bruno et moi avons fait.

C’était l’horreur ! En plus du reste du monde, je sentais aussi mon propre fils se dresser contre moi ; je crois qu’il ne pouvait plus supporter l’idée que sa maman avait de nouveau perdu la tête, treize ans après cette autre fois. C’était trop et il avait peur. Nous sommes rentrés et alors il s’est passé une chose terrible… Je ne veux rien dire de plus. Totalement désespérée, j’ai téléphoné à mon mari de venir me rechercher, il m’a dit : j’arrive (6 heures de route pendant lesquelles je n’ai cessé de pleurer) et à l’aube nous repartions immédiatement.

 

10 août 1983

Chère sœur Thérèse,

Je ne sais au juste si cette lettre vous parviendra jamais. J’ai presque envie d’en rester là en vous disant simplement : mission accomplie ! – Mais quelle mission ? –

Vos prières restent nécessaires pour tous et un peu pour moi, si c’est encore possible.

L’Esprit souffle où Il veut, mais cela ne va pas sans dommage pour les simples mortels que nous sommes. J’ai du mal à reprendre pied et ne sais plus trop qui je suis. – Selon votre conseil, je m’en remets à Dieu dans la plus totale humilité.

Ne vous laissez pas troubler par les tempêtes qui ont l’air de s’élever autour de nous ; rappelez-vous les consignes de Jésus à ce sujet : Tenez ferme ce que vous avez, et priez.

Un petit mot de vous me ferait du bien je crois. Ma famille ne comprend rien, forcément, toujours selon la parole du Christ : "Nul n’est prophète en son pays". De toute façon, j’ai choisi de me taire – mais le désert, vous savez, c’est dur.

À présent, je ne sais plus que répéter cette prière que ma maman m’avait apprise il y a bien longtemps :

Petit Jésus, petit agneau, faites de mon cœur un berceau.

Petit enfant de Bethléem, je vous adore et je vous aime.

Dormez Jésus, dormez Sauveur, au milieu de mon petit cœur,

Ainsi soit-il.

 

6 septembre 1983

Chère Madame,

Vous allez croire que je vous ai oubliée, il n’en est rien !

Merci de me donner de vos nouvelles. Je suis heureuse de voir que vous allez mieux. Patience toujours ; c’est long de se remettre sur pieds.

Malgré mon silence, ma prière vous accompagne chaque jour.

Pourquoi n’ai-je pas écrit plus tôt ? Fin août j’ai suivi une session à Rennes : dix jours intensifs ; puis le Père m’a envoyée me reposer trois jours chez des amis en Finistère sud ; la côte sauvage et la mer, le silence me font beaucoup de bien. Depuis que je suis rentrée, vendredi soir, il y a pas mal de choses à reprendre : jardin, ménage, lessive, courrier, etc.

Hier je lisais quelques extraits de Marcelle Auclair et je pensais à vous. Je vous livre une de ses réflexions : "Dans toute difficulté, de toute épreuve, de toutes soudaines épreuves intérieures, se demander : Qu’est-ce que Dieu m’enseigne par là ? – Et s’abandonner à sa bonté qui surpasse toute intelligence et défie le bon sens humain".

C’est ce que vous faites, je crois. Alors PAIX et JOIE. Je connais la prière dont vous me parlez. Ma maman nous l’avait apprise.

Le 26 juillet c’était votre fête, j’ai beaucoup pensé à vous et prié pour vous. J’étais dans un monastère bénédictin. Quinze jours : un ressourcement physique et spirituel très fort.

Je vous prie de croire chère madame, à ma prière fidèle et à ma grande affection dans le cœur de Jésus

Thérèse Joannes.

 

8 septembre 1983

Docteur F

Comme vous pouvez le supposer Docteur, je ne puis guère effacer de ma mémoire (ou de ce qu’il en reste !) les événements du mois de juillet – pas plus que je ne puis admettre que tout ceci soit ramené à une simple "bouffée délirante" du cerveau.

Si mon interrogation a un peu perdu de son angoisse, elle n’en reste pas moins journalière et traumatisante – partagée entre "c’est le cerveau qui fabrique tout ! "Auquel cas ... il n’y a rien - point final ! - ou – que m’est-il, de nouveau, arrivé réellement – qu’est-ce que tout cela signifie ? Mais ceci pose une question si vaste, que je ne vois vraiment pas qui pourrait y répondre : une armée de psychiatres, de philosophes, de théologiens n’en finiraient probablement pas d’en discuter ! Et n’y voyez de ma part, nulle mégalomanie, simplement si tout peut être réduit à la psychiatrie, la philosophie et la théologie, il n’y aurait plus alors que des fous, que des sages ou que des saints. Or les trois, il me semble, sont irrémédiablement mélangés - comme l’ivraie et le bon grain. Ce n’est donc pas si simple – et pourtant, il me faut vivre, pour ne pas dire survivre, sans nuire aux autres.

J’ai eu ma part dans cette existence. Quand je fais un grand retour en arrière, sans nulle complaisance envers moi-même, je suis bien obligée de constater que je suis en quelque sorte "marquée par le destin". Quelle explication à celui-ci ?

Bien sûr la lumière s’est éteinte pour moi ; je suis redevenue "normale" – apparemment –. Il ne me reste plus qu’à faire le bilan : triste bilan de cette nouvelle "crise", treize ans après l’autre – et pourtant si différente – Médicalement, alors que j’étais depuis treize ans sous barbituriques et antidépresseurs, avec un simple tranquillisant pour la nuit, j’ai depuis trois semaines, retrouvé un sommeil suffisant. Que j’estime suffisant surtout par rapport aux deux mois précédents où je n’ai pratiquement pas dormi, sauf pour sombrer dans une espèce de transe affreuse dont je sortais à grand peine avec l’impression que l’On me vampirisait le cerveau. Que "quelqu’un ou quelque chose" extorquait de ma mémoire des choses innommables, des temps immémoriaux, dont je n’ai même pas idée. Je sortais de ce pseudo-sommeil avec l’horrible impression que l’on me pressait le cerveau comme un citron, pour en extraire des "souvenirs ancestraux" que pourtant je ne possède absolument pas ! Quand je reprenais conscience, j’étais terrorisée – (comment peut-on appeler le contraire de suggestion ? je ne peux m’exprimer autrement que par : vampirisation) – donc par cette vampirisation et les impressions quasi-inhumaines qui flottaient pendant quelques minutes dans ma mémoire. À ma reprise de conscience – car je ne peux appeler cela réveil, pas plus que je ne puis dire sommeil ou rêves ou cauchemars ! – car tellement contraires à ce que Dieu peut permettre ! À tel point qu’un matin, indignée à la fin, de cette horreur, je me suis écriée : comment Jésus-Christ peut-il tolérer cela ? Je ne vous demanderai pas de me croire si je vous dis qu’à partir de ce jour-là les phénomènes ont été en s’estompant... et pourtant c’est la vérité.

Pendant la journée, oubliant tout amour-propre, (mais après cela comment pourrait-il encore m’en rester ?) j’ai voulu faire une enquête sur ce que les autres avaient perçu pendant ces treize jours. J’ai commencé par leur demander pardon de tout ce que j’avais pu faire ou dire dans cet état de réelle inconscience. Dieu m’est témoin que si j’ai eu des éclairs de lucidité pendant cette période, avec parfois des mouvements de révolte contre la ou les forces qui me manipulaient ainsi – il n’y a eu, en aucune façon, une seule seconde où je n’ai cessé d’aimer Dieu et mon prochain. Bien au contraire, car j’avais conscience (pauvre de moi !) de les aimer dans une Charité infinie – et c’est bien cela qui me terrifie le plus – Comment expliquer cela ? Car si parfois à mes proches, j’ai pu sembler menaçante (ma force était paraît-il décuplée) – mais je n’étais pas dans "mon bon sens" – comment eux – normaux – ont-ils pu faire preuve de tant de dureté, voire d’hostilité ?

Après coup, bien après, j’ai repensé à ce que vous m’aviez dit en avril dernier : de l’instinct de survie de l’espèce (d’une espèce animale ou autre – le mouton à cinq pattes…) qui fait que le troupeau se ligue inconsciemment pour faire disparaître tout élément anormal au dit troupeau – ou comment un corps rejette un élément étranger – Je crois que c’était cela : la Peur. J’étais devenue anormale et leur hostilité devait en fait, cacher une grande peur : la peur de l’espèce devant un danger. Ce doit être pour cela que la Société enferme les fous, même s’ils sont parfaitement inoffensifs. Et la peur engendre la violence. Et moi aussi j’avais peur, de leur peur à eux d’abord et de cette immense solitude où je me sentais constamment rejetée, car plus personne ne pouvait m’atteindre et me comprendre. J’étais passée de l’autre côté du miroir. Dans un grand élan d’amour j’avais cru pouvoir y emmener les autres, mais cela s’avérait impossible : ils ne pouvaient pas me rejoindre, j’étais la seule à avoir franchi la porte dans le mur et elle s’était refermée – eux d’un côté et moi de l’autre.

Si aujourd’hui je peux reconnaître et critiquer ce délire qui s’est emparé de moi, – et le critiquer avec d’autant plus d’amertume et de chagrin qu’il est apparu aux yeux de mon entourage sous la plus mauvaise face que j’eusse pu imaginer – je ne peux pour autant renier ce qui l’a provoqué : Cette lumière perdue, retrouvée – retrouvée et perdue – pour laquelle je suis prête à affronter de nouveau toute la souffrance qu’il sera nécessaire. – car comment vivre sans Elle, c’est à dire sans Dieu ? – Qu’Il ait pitié de moi !

Lettres de 1983 (suite)

 

- 21 Septembre 1983, envoi de Michèle :

 

Un texte d’Evelyn UNDERHILL

 

" Il y a trois profondes aspirations, trois grandes expressions de l'inquiétude humaine que seule une foi mystique peut pleinement satisfaire.
C'est d'abord celle qui fait de l'homme un pèlerin, un vagabond ; c'est le désir de sortir de son monde normal pour aller à la recherche d'un pays perdu, d'un "meilleur pays", un Eldorado, un Sarras, une Sion céleste.
C'est ensuite le désir de l'âme de trouver une âme sœur qui s'accorde parfaitement avec elle, et ce désir inspire l'amour.
C'est enfin l'aspiration à la pureté intérieure et à la perfection qui fait de l'homme un ascète et, en dernier ressort, un saint."

 

Ma chère Michèle,

Comme je te le disais au téléphone dimanche, j'ai bien reçu ton petit mot qui m'a fait plaisir en même temps qu'il m'intriguait…

A condition, bien sûr, d'élever cette recherche au-dessus de la "planète" (tu sais bien qu'ici-bas, il n'y a ni Eldorado, ni pays de Cocagne !), le texte d'Evelyn Underhill que tu me cites peut effectivement servir de "mode d'emploi" à tout être désirant sortir de lui-même pour remonter vers son Créateur.

Cela me fait grand plaisir de voir que ma petite fille fait sienne "cette vérité", comme tu dis ; mais pourquoi ajoutes-tu "Qu’elle puisse vous aider à vivre et à décider de votre destin sans regrets".

M'aider à vivre ? La première aspiration d'après E. Underhill : tu sais combien je suis ce "vagabond" de l’âme qui n'a cessé depuis toujours "d'aller à la recherche de ce pays perdu" !…

Je peux te citer ici tout de suite deux textes qui m'accompagnent depuis bien des années. L'un est de Platon ; il est noté en exergue par Charles Morgan au début de son Sparkenbroke, avec l'extrait de Keats, tant de fois répété : "Je ne suis certain de rien si ce n'est de la sainteté des affections du cœur et de la vérité de l'Imagination. La beauté saisie par l'imagination doit être Vérité... etc. "

Platon écrit : "Or, toute âme humaine a par nature, contemplé les réalités de cet autre monde : autrement, elle ne serait pas entrée dans un corps. Mais trouver dans les choses de ce monde-ci, le moyen de se ressouvenir de ces réalités n'est pas aisé… Il n'est resté qu'un petit nombre d'âmes qui aient suffisamment le don du souvenir ; et quand elles aperçoivent ici, une imitation des choses de là-bas, elles sont hors d'elles-mêmes et ne se possèdent plus. Mais la nature de ce qu'elles éprouvent, elles l'ignorent, parce que leur perception est trop indistincte…"

L'autre texte est du R.P. Standinger, extrait de son livre "L'homme moderne devant les problèmes de l'au-delà". Il y a une douzaine d'années j'ai noté quelques passages, dont celle-ci : "Vous nous avez créés pour Vous, ô mon Dieu, et notre cœur est inquiet tant qu'il n'a pas trouvé de repos en vous" (cette phrase est en fait, de St Augustin). Je pourrais t'en citer mille autres sûrement… Ce qui prouve bien que cette inquiétude métaphysique est vieille comme le monde et que la quête du "Graal" ou de "l'Eldorado" a dû débuter avec la chute de l'homme qui dès lors, a commencé de "se souvenir" (dans son inconscient ?) ayant perdu la lumière de la Réalité. Ceci peut nous rassurer sur un point: nous ne sommes pas les seuls, loin s'en faut, à nous lancer dans cette recherche.

Quand on a trouvé la réponse, tout paraît tellement simple – Le Père Standinger avait, semble-t-il, une fois pour toutes répondu à cette question : Dieu existe-t-il ? son texte paraît en être la preuve. Mais hélas, ce n'est pas si simple.

Comme dit Maurice Clavel, ce grand converti : "La Foi est un trou noir, mais comme dans l'œil, la pupille. Ce qu'elle donne à voir et à vivre s'appelle Révélation. La Révélation est Vérité absolue, mais accessible seulement si je la vis". – Et ailleurs il note : "Il n'y a pas Foi d'abord, puis Révélation. Il n'y a pas Foi nourrie par Révélation. Il faut qu'il y ait d'abord Révélation pour qu'il y ait Foi – Je me permettrai d'ajouter : c'est vrai, mais ce n'est pas donné à tout le monde ; et ceux à qui cette grâce est accordée ont l'énorme responsabilité de transmettre cette Révélation pour "fabriquer" des croyants, des personnes qui ajoutent "foi" à ce que leur dit l'Illuminé, alors qu'eux-mêmes n'ont rien vu, rien compris, – et pourtant ils adhèrent. C'est pourquoi Jésus disait à Thomas : "Heureux ceux qui auront cru sans avoir vu" (ou compris). "

Je relève encore ce texte de Clavel : " Se détourner de Dieu en le connaissant, ce n'est pas possible, car de deux choses l'une : ou bien on ne s'en détournerait pas, ou bien ce serait par une haine pure et consciente. Se détourner de Dieu sans le connaître, à plus forte raison sans L'avoir soupçonné, ne veut rien dire. La vérité, c'est que nous ne voulons pas Le connaître ; un orgueil inconnu nous le rend inconnu ; nous ne voulons pas Le connaître et nous sommes ainsi faits que nous y réussissons. Le Péché originel, ce sont les deux sens réunis du mot : j'ignore. J'ignore par ignorance, et j'ignore par aversion. Le Péché originel, c'est dans l'inconscient humain, par rapport à Dieu : "Je t'ignore". Et ce refoulement n'est pas quelque chose qui nous arrive un beau jour dans notre vie d'homme : il est notre condition humaine.

Ou mieux encore, notre condition en résulte, et notre esprit, et le monde. Notre raison naturelle ne fuit pas Dieu : elle est cette fuite même."

Clavel dit plus loin : " La Foi en nous n'a pas la foi – Viens en aide à notre peu de foi disent les disciples... " Cela rejoint donc bien ce que je disais déjà il y a plus de vingt ans : "Si nous avions la certitude de l'existence de Dieu, nous passerions la nôtre à genoux !". Cela me paraît évident – Evident aussi que la Foi n'est pas la certitude. La Foi qui, selon Morgan "transcende la raison dont elle est née et existe ensuite de sa vie propre". Là, je ne suis pas tout à fait d'accord avec lui. La Foi, (la Foi en Dieu) ne peut pas procéder de la raison, puisque l'on ne peut pas plus démontrer l'Existence de Dieu que sa non-existence. Pour moi la Foi est Folie, Illumination et par cela même insaisissable, indémontrable. Il faut se contenter de ces brèves incursions, fulgurations, qui, comme dit Platon, mettent "nos âmes hors d'elles-mêmes" !… et après revient l'obscurité.

La plus grande partie de notre existence se déroule dans cette obscurité ; et la plupart des gens se font une raison, car ils n'ont jamais soupçonné la Lumière, donc elle ne peut leur manquer. J’ai toujours dit : "La plupart des hommes vivent de désespoir tranquille" ! Les autres… Eh bien ! Ils se débrouillent, s'accrochent… ou craquent…

La deuxième proposition : Trouver l'âme sœur etc., découle de la première : si tu as "entrevu" Dieu, nulle créature humaine ne peut plus combler ton aspiration – Quand tu as soif de l'Absolu, tu acquiers peu à peu, mais sans nul doute possible, la certitude que cet Absolu, tu ne peux le rencontrer dans une créature humaine si parfaite soit-elle. Elle ne sera jamais qu'un pâle reflet du Dieu que tu pressens. Tout au plus, si tu as la grâce de trouver sur ton chemin un être qui ressemble à ton "moi divin", c'est-à-dire dont les secrètes aspirations spirituelles sont les mêmes que les tiennes ; alors, tu auras la chance inouïe de ne pas te trouver seule sur ce chemin aride qui est la montée vers Dieu – Seule face au doute, au désespoir – rançon inévitable à payer quand on a eu l'audace de frôler "l'Indicible".

"Car notre condition humaine, redit encore Maurice Clavel est justement faite de ce "refoulement" de Dieu, conséquence du péché originel." – Alors, là aussi je me permets d'ajouter que si par une circonstance extraordinaire, (de temps et de lieu ?) – (appelons cela la Grâce) – ce refoulement de Dieu est lui-même refoulé, alors, en un éclair on entrevoit Celui-ci, et c'est alors que se fait cette mutation de Vérité en Certitude… dans une totale adhésion, une totale compréhension et une totale participation à l'Amour… dans une totale allégresse !… Puis, la porte se referme, c'est de nouveau le noir, et après avoir entrevu la Lumière, les ténèbres sont encore plus noires – il n'y a plus ni Certitude, ni Vérité ; rien, rien, que le Néant du Doute d'où repart toujours la même interrogation, péniblement, misérablement avec ses montées, ses descentes et l'Angoisse : avons-nous en nous autre chose que des produits chimiques ? Est-ce que ce n'est pas un produit chimique de mon cerveau qui invente Dieu ? Tout le porte à croire… Si je veux trouver des preuves en ce sens, je ne peux manquer d'en voir dans cette nouvelle épreuve que je viens de traverser – il y a trois mois à peine - treize ans après l'autre !

Tandis que j'écris ces mots, un rapprochement s'impose à moi : Preuve – Épreuve – Est-ce à travers l'Épreuve, – (pour moi significative, puisque la médecine y voit un délire mystique, qui donnerait parfaitement raison au "c'est le cerveau qui fabrique tout" de mon frère !) – que Dieu se fait Preuve ? Me tend-Il cette perche, au travers de l'ultime effort de l'Adversaire qui, narquois, se demande ce coup-ci comment je vais réagir ? Etait-ce la seule façon possible à Dieu de se manifester à moi – sachant bien tout ce que cela allait impliquer de la part de "l’Autre" ? Et que j'aurais à résister, à triompher des folles conséquences inévitables de cette "manifestation" – L'Esprit se manifeste – l'Adversaire en profite, sachant la faiblesse de mon mental – achevant dans un paroxysme de mettre le désordre dans ma tête : "Et regarde-toi bien ma chère ! Regarde ce que ton Dieu a fait de toi ! Honte, désespoir, humiliation, souffrances de tous ordres… Voilà ta belle récolte, sans compter le mal qu'Il t'a fait faire aux autres par la même occasion ! le restant de tes jours tu vas te poser cette question : et si ce coup de folie me reprend ? Demain, dans un mois, dans un an !… Allons regarde-toi pauvre idiote et reconnais que ton "éblouissement" n'est qu'un lamentable fiasco, et que le Dieu que tu voudrais adorer n'existe pas ! – ou alors Il se sert de toi comme d'un jouet, pour mieux te ridiculiser ensuite !… "

Mais alors, justement, dans un étrange paradoxe, une lumière se fait jour : trop, c'est trop – et dans le TROP de cette épreuve, je ne sais quoi me pousse à voir la PREUVE – Comment l'expliquer ?

– Je cherche des preuves de l'existence de Dieu ; quand je suis au paroxysme de cette recherche et que vient la Certitude, alors suit immédiatement l'Épreuve – qui de nouveau me plonge dans les abîmes du Doute avec en plus cette douloureuse interrogation : suis-je folle ? Les produits chimiques de mon cerveau sont-ils anormaux ?

Et si Dieu ne pouvait se manifester autrement ? – car pour Lui le temps n'existe pas – IL EST – Dans un temps simultané de Dieu : l'épreuve et la preuve pour l'homme, qui lui, plongé dans le temps "humain" décompose chaque événement et ne peut les superposer… Là est peut-être la clef ?… Alors ?

Aujourd’hui, je crois que je vois plus clair : je ne suis pas le jouet de Dieu, je suis le jouet de l’Autre !!!

Dieu ne se prouve pas – Il s’éprouve!

Dès lors il est clair que notre âme ne peut avoir sa vraie patrie que "là-haut", dans le monde de l'au-delà ; car toute aspiration un peu profonde qui la consume, toute grandeur et sublimité, toute valeur idéale et divine dont elle a faim, habitent "là-haut", de l'autre côté des frontières de la vie terrestre… Mais alors, cette terre n'est qu'un pays étranger qu'il lui faut nécessairement traverser pour atteindre la Patrie, la vie d'ici-bas : une nuit au-delà de laquelle l'autre Monde brille comme une aurore, un songe qui du lieu d'exil monte vers le cœur du Père. "

Lettres de 1990 à 1992

- 6 juillet 1990

Pourquoi veut-on toujours trouver des "excuses" à Dieu ? "Dieu est Dieu, nom de Dieu" s’écriait Maurice Clavel !

Quand cesserons-nous d’essayer de l’enfermer dans des concepts anthropomorphiques ?

"Je ne suis pas un méchant homme " dit Dieu ! (Péguy)

L’homme essaie toujours de recréer Dieu à son image.

Isaïe disait déjà :

Mes desseins ne sont pas comme vos desseins,

Ni mes voies comme vos voies.

Mais autant le ciel est loin de la terre,

Autant ma voie est loin de votre voie,

Et vos pensées de mes pensées.

 

- 7 juillet 1990

Combien il devait être plus facile de réaliser que notre corps était le réceptacle, le tabernacle de l’Esprit, lorsque le progrès, son bien-être et ses distractions ne venaient pas nous enliser plus profondément dans la matière !

CONCEVOIR : former, élaborer dans son Imagination.

CONCEVOIR : devenir enceinte

 

- 9 juillet 1990

– Entre Dieu et les hommes, il existe un affreux "malentendu" – (mal-entendu) –

Mais comment pourrions-nous mieux entendre, bien entendre l'Esprit, tout Esprit – alors que nous n'en portons qu'une misérable étincelle en nous-mêmes – cette étincelle étant enfouie, que dis-je, – noyée – en perdition – dans un océan de matière ! ...

Jetés dans un univers où la matière est la seule "réalité", car la seule tangible, la seule perceptible et démontrable !...

La science scientiste n’a que faire de DIEU-ESPRIT, elle se suffit à elle-même !

Le malentendu ne peut aller qu'en grandissant, la science d'aujourd'hui ayant réponse à tout – expliquant tout !

Si nous ne savons pas qu'il y a eu Jésus-Christ : Amour de Dieu = Emanation de Dieu = Homme-matière où était enfermé l'Esprit – si semblable à nous, mais si différent – car l'Esprit chez Lui avait en vérité tant prédominé sur la matière, qu'elle n’a pu triompher de Lui. C'est Dieu en Lui qui a repris ses droits sur elle – la régénérant par transmutation.

La matière étant par nature en constante évolution : rien n'y est fixe, tout change, le Temps étant le facteur responsable de cet état : (entropie).

DIEU = aussi DIEU hors du Temps = Immutabilité = Eternité. Mais l'homme possède une étincelle de l'immutabilité de Dieu : l'espritimmobile et agissant – : dégagé de la matière, il ne peut cesser d'exister : donc immortel.

Cette étincelle est unique pour chaque individu et a donc une vie propre – une identité immortelle elle aussi – et fait partie d'un Tout qui est DIEU – Tout est dans Tout – mais DIEU est Unique.

 

- 11 juillet 1990

Quoi d’étonnant dans cette aspiration à Dieu – à l’Absolu – de tout mon être ? Cette tension permanente vers ce Plus, dont la lumière à peine entrevue, me manquait déjà ?

Sachant que ce monde où nous "existons" n’est qu’un passage, un voyage obligé souvent pénible, (le mot est délibérément faible !) Comment ne pas souhaiter qu’il se termine au plus vite et au mieux ? – Voilà ce qui m’étonne de ne pas rencontrer plus souvent chez les êtres humains.

Pour moi, à présent, rien de plus naturel que ce désir infini de retrouver ma source, de me plonger dans cet océan d’Amour. Je n’ai plus d’autre Désir que Lui. Lui seul peut combler ce manque de tout qu’est devenu mon être !

Non, rien d’étonnant à cela, je sais que tant d’autres – avant moi, avec moi et après moi, ont eu et auront cette même certitude que nous ne pouvons vraiment aimer que Dieu seul. Que Lui seul est à la mesure de cette soif !

Mais avoir un besoin absolu de Dieu, est-ce l’aimer ? Une panique me prend, qu’est-ce que j’appelle mon amour ?

... Silence...

J’appelle mon amour, cette acceptation que j’essaie de faire toujours plus totale de sa Volonté. A l’écoute de Celui que j’aime, dans le monde où il a voulu que je sois – et où je ne le perçois pas – Celui que j’aime reste parfois très longtemps sans donner signe de son Existence – et c’est la nuit –.

"Sois attentive et sache que je suis Dieu"

C’est certainement de ma faute si je ne sais pas être suffisamment attentive ! Alors Seigneur, apprends-moi à me taire que Tu puisses te faire entendre !

Je peux appeler mon amour, cette Volonté toujours en moi, de dire aux autres ce que Tu es, ce que Tu m’as donné de comprendre : Ton Amour. Je te suis inconditionnelle, Majesté ! Tu n’as pas de plus ardent défenseur que moi. Je ne supporte pas que l’on te "juge mal". Je ne supporte pas non plus que Tu sois bafoué. Cela m’est une souffrance intolérable.

Mais quoi d’étonnant à cela ? Cela me paraît être d’un "ordre naturel".

Par contre, que Dieu puisse m’aimer, moi, telle que je suis – et personnellement ! Qu’il y ait réciprocité entre nous deux – Qu’il ait besoin de moi, comme j’ai besoin de Lui ! Cela passe l’imagination et me fait tout aussitôt penser que je suis paranoïaque, mégalo…

Et me voilà replongée au fond du puits. – Allons, raisonnons :

– Mais cela fait plus de vingt ans que j’essaie de raisonner et de remonter le puits !

Quelle est cette étrange maladie qui me fait désirer aimer et rejoindre dans son Infinitude un Être dont je ne sais que ce que mon Imagination n’imagine justement pas !

L’Imagination – ressort de la pensée – L’Imagination dont Keats disait qu’il était certain qu’elle était Vérité : " Je ne suis certain de rien, si ce n’est de la sainteté des affections du cœur et de la Vérité de l’Imagination ! La beauté saisie par l’Imagination doit être Vérité ".

De cela, je suis certaine – Je suis certaine aussi que même s’Il ne m’aimait pas, cela n’aurait pas tellement d’importance, du moment qu’Il me laisse l’aimer.

On a tellement plus besoin d’aimer que d’être aimé. Quelqu’un à adorer, de qui s’émerveiller, encore et toujours !... C’est peut-être pour répondre à ce besoin, que nous vous aurions "inventé" ? Mais qui aurait mis ce besoin en nous ? Si ce n’est Vous.

Mais pour Lui, ici l’imagination se tait, tant elle sait qu’elle est totalement impuissante à concevoir cette Chose qui la dépasse infiniment.

Autrefois je disais toujours, en parlant de Dieu : Je ne peux pas aimer quelqu’un que je ne connais pas, alors que l’on me recommande de l’aimer ! Comment cela serait-il possible ?

J’ai donc cherché à te connaître – Tu t’es laissé entrevoir – et je fus terrassée. Après, la nuit fut beaucoup plus noire – et la terre beaucoup plus lourde ! Mais je gardais péniblement en mon âme, au milieu d’un monde tellement loin de Toi, le souvenir de Ta Justice et de Ton Amour, plus grand encore, s’il était possible qu’une chose en Toi soit plus grande qu’une autre, puisque Tu es infiniment Tout.

Un parallèle me vient tout juste à l’esprit – C’est comme le soleil : quand il est là, qu’il brille, nous illumine et nous réchauffe, tout va bien, je me sens bien. Quand les nuages le recouvrent, il arrive qu’on ne le voit plus pendant des semaines entières – C’est le couvercle, comme je dis – Alors, je périclite, je dépéris – J’ai beau savoir qu’il existe ce soleil, que là, derrière les nuages, il est tous les jours présent ; ça ne change rien à l’affaire ; tout mon être se sent mal, il lui manque l’essentiel : Le souvenir du soleil ne peut en aucun cas, remplacer le soleil lui-même.

C’est la même chose avec Toi, Seigneur ; encore plus dure est la vie de celui à qui tu as envoyé un rayon de ta Lumière – Il sait – de certitude absolue – que sa vie terrestre ne sera jamais plus qu’un boulet à traîner dans l’attente de revoir cette lumière !

Mais en Père sage et prudent, Tu ne les dispenses, ces rayons, qu’avec prévoyance et bon escient. Tu as peur pour ta petite fille que ta première lumière avait si profondément bouleversée qu’on l’avait mise chez les fous ! Et puis, ces autres fois où cela a failli être aussi grave !... Mais tu sais aussi combien je deviens sage – j’ai grandi–.

De toute façon, tu as toujours raison, ainsi que je le disais et que je le dirais toujours. Pourquoi réclamer de Toi quelque chose que tu m’as déjà si généreusement donné ? Donne-le plutôt aux autres, il y en a tant qui ont besoin de ta lumière. – Tiens-moi seulement par la main, que je ne sombre pas !

Et puis, cette forme de Toi que sont les autres – C’est vraiment très difficile – J’essaie de les aimer tous, mais j’ai mes préférences... En fait, j’ai des coups de cœur ; et puis, ceux qui m’attirent le plus, ce sont ceux que je nomme mes "frères de misère". Ceux qui souffrent, qui ne savent plus où se jeter, parce qu’ils ne savent pas que Tu existes et que Tu les aimes tellement ! Malgré les apparences qui sont souvent contre Toi ! Alors, j’essaie de leur expliquer et de prendre un peu de leur douleur. Tu le sais bien, puisque si souvent "je tire la sonnette" pour attirer Ton attention sur l’un d’eux. Mais pour eux comme pour moi, je le dis toujours : "Fais comme tu voudras, Seigneur, Tu sais tellement mieux que nous ce qui nous convient".

 

- 12 juillet 1990

Ce qui me fait le plus peur quand je perds Ta Lumière : c'est moi-même. Je redeviens ce que je suis. Une voix de colère gronde en moi ; je me sens mauvaise, je sais que je suis mauvaise et qu'au fond rien n'a changé. Il n'y a plus d'amour, que de la rancœur. Je ne supporte rien ni personne, quand ce n'est plus Ton regard qui, passant par le mien, voit les autres.

Et je prends conscience que ce n'est pas la faute des autres – eux n'ont pas changé, ils sont tels qu'en eux-mêmes, tels que Tu les as faits, tels que Tu les aimes! C'est mon moi, ma mauvaise nature qui reprend le dessus et cela m'épouvante!... Après avoir tant reçu, tant appris de Toi, n'ai-je donc absolument rien retenu? Le Maître éprouve-t-il l'élève en le laissant livré à lui-même ? Cela fait-il partie de son éducation ?

Il est vrai que cela lui apprend l'humilité et que cela, jamais personne n'en aura suffisamment – nous ne sommes rien – la preuve !

Est-ce pour me faire comprendre mieux encore que sans Toi, je suis peut-être encore pire que les autres ?

Mais je l'ai tellement compris, mon Seigneur, Toi à qui je demande chaque matin : Donne-moi aujourd'hui l'Amour, la Patience dont j'ai besoin, pour vivre ce jour comme Tu désires que je le vive !

 

Il n’y a pas longtemps que j’ai enfin compris le récit de Marthe et Marie.

Ont-elles existé ? Peu importe. Je me suis longtemps insurgée contre Ta conclusion : "Marie a choisi la meilleure part, elle ne lui sera pas ôtée " – Cela me paraissait tellement injuste pour cette pauvre Marthe. Voilà bien les hommes, me disais-je ! Parce qu’une nana se met à leurs pieds et les écoute béatement, ils oublient complètement qu’à l’heure de se mettre à table (parce que cela existe, quand même !) heureusement qu’il y a Marthe qui s’est tapé tout le boulot ! ! !

Et Toi, avec ta drôle de phrase, tu avais l’air de lui donner tort à Marthe ! C’est trop facile et c’est macho !

Cela révoltait mon sens de la justice, parce que, justement, je me sentais tellement une âme de Marie... à rester à ne rien faire, qu’à t’écouter à tes pieds, avec de l’Adoration plein les yeux – Et chaque fois, le devoir m’appelait pour ce que j’appelle l’intendance, qu’il faut bien assumer. Tout ce que je trouve stupide et inutile, parce que me détournant de Toi : la poussière, la lessive, les repas... . Les repas ! Et les courses pour les repas !

Et puis, il n’y a pas longtemps j’ai enfin compris que Marthe et Marie, c’était peut-être une seule et même femme – Alors là ! Ça change tout !

Tu as donc voulu dire qu’il y a en la personne humaine deux façons d’exister : celle de tous les jours qu’il faut assumer, et celle où tu rêves de t’asseoir aux pieds de Celui que tu aimes et de ne plus faire rien d’autre, parce que justement tu en as marre d’assumer la vie de tous les jours !

J’ai donc compris que dans la personne que je suis, et que je serai quand Tu m’auras aidée à franchir la porte, le passage – il y aura définitivement la meilleure place pour la Marie que j’ai toujours dû refouler, parce que la pauvre Marthe était constamment sollicitée par les impératifs de cette vie – Je pourrai donc enfin être ce que j’ai toujours rêvé d’être !

Vrai, cela change tout ; ça c’est vraiment la Justice. Mais pourquoi tes apôtres n’ont-ils pas su mieux raconter cela ?

Que je suis sotte. La réponse est là, d’elle-même : A toi de faire ta propre expérience, sans laquelle aucune leçon n’est valable.

Mais quand même, je crois que j’essaierai d’expliquer cela à ma façon, la prochaine fois que l’occasion m’en sera donnée !

Maintenant, je crois même que dans cette vie plus on accepte, plus on s’oblige à être Marthe pour les autres, plus on sera Marie de l’autre côté !

Quelle merveille que ta Justice et ton Amour !

 

- 5 août 1990

Tout ce qui est contrainte abîme l’Amour. L’Amour doit être pur élan. C’est pour cela que Dieu se fait si discret. Il nous aime tant qu’Il ne veut pas nous imposer quoi que ce soit ! Il ne veut nous gêner en rien – Mais Il est toujours là si nous avons besoin de Lui. Il n’attend qu’un mot, qu’un geste, qu’un appel de notre part, pour se jeter vers nous, toujours prêt à nous aider... si seulement nous Le laissions faire, car Il sait comment, mieux que nous.

Prêt aussi à s’effacer quand il voit que l’on n’a plus besoin de Lui... ou que nous le croyons !

Bien sûr qu’Il souffre de se voir mis au rancart !... car Il a tant donné d’Amour et il veut continuer à en donner à pleines mains !... Mais nous, quand tout va bien, quand nous sommes rassurés, pauvres sots, aveugles et fiers ! Nous préférons nous fier à nous-mêmes et le renvoyons au placard !

Ô mon Seigneur, pardon de cette cruelle inconscience !

 

 

 

20 août 1990

St Jean de la Croix.

 

 

- 4 décembre 1990

Combien de fois peut-on avoir le cœur brisé sans en mourir vraiment ?

Mon Seigneur, c’est comme tu voudras !

Voilà trois mois que Tu m’as "repris ta Lumière". J’ai si mal, la vie s’est retirée de moi ; mais j’accepte Ta Volonté – sans la comprendre – Ô mon Seigneur bien-aimé, Tu sais tout, Tu as tes raisons que je ne peux pas connaître, et même si c’est très dur de me sentir rejetée par Toi, je l’accepte en toute humilité…

C’est Toi qui me choisis, c’est Toi qui fais ce que Tu veux de moi ; je suis ta servante ô mon Seigneur !

Quand Tu voudras que je me remette en chemin, fais-moi signe et de nouveau tu me trouveras prête. Que ce soit le plus vite possible, c’est mon seul souhait, sinon Tu me retrouveras totalement desséchée – mon cœur sans Toi n’est plus qu’un désert... une maison vide dont Tu as emporté la clef et où personne ne peut plus rentrer.

Je ne serai bientôt plus capable d’Aimer  !

 

- Seize ans plus tard,
(je vais essayer d’exprimer ce qui s’est passé en août 1990 ; je ne l’ai jamais raconté à personne: ce n’est pas facile.)

J'étais dans le jardin sous les sapins, je lisais... St Jean de la Croix et je ne dormais pas! Tout à coup, j’ai été transportée hors des lieux, hors du temps. Je n’ai rien vu, mais une Voix me disait : Tu es ma Reine.

Submergée d’un bonheur indicible, j’ai immédiatement compris que c’était Jésus, et j’ai aussitôt protesté : Mais Seigneur, je ne suis rien, c’est Toi qui es le Roi, c’est Toi qui as tout fait – Oui, mais toi, tu es ma Reine.

J’étais transportée dans un océan d’Amour, ayant perdu toute notion de la terre… puis j’ai dit : "Mais Seigneur et les autres, tous les autres ?". Il m’a répondu : "Viens voir".

Je me suis retrouvée dans un espace infini ; il y avait trois sphères blanches lumineuses. – Qu’est-ce que c’est, Seigneur ? –

"Ecoute, approche ton oreille."

J’ai obéi et à la première sphère, celle du bas, j’ai entendu à l’intérieur une immense clameur de Joie ; c’était l’expression d’un Bonheur parfait.

Il m’a emmenée à la deuxième sphère, le même bonheur, la même jubilation, emplissait mes oreilles. La troisième sphère : exactement la même sensation. J’ai compris alors que chacun d’entre nous dans l’au-delà, où que nous soyons, nous jouirons d’un bonheur parfait.

Puis je me suis retrouvée sous mes sapins, le cœur empli d’un bonheur sans nom : Je connaissais l’Amour de Dieu mais maintenant j’en avais la Preuve.

Cette sensation de plénitude s’est prolongée pendant plusieurs heures, puis il m’a fallu ré atterrir parmi les miens… Et de nouveau faire semblant de rien, ne rien laisser paraître, pour ne pas les troubler.

Ce fut très dur… mais je gardais en mon cœur l’ineffable secret d’Amour.

J’avais une autre réponse à ma recherche ; je me suis souvenu de ma petite sœur de Jésus : Thérèse de Lisieux, qui ne comprenant pas comment Dieu pouvait remplir de la même manière le cœur de chacun d’entre nous,  le disait à sa sœur ainée. Celle-ci lui a dit : "Va chercher un dé à coudre et un grand verre… puis remplis-les d’eau tous les deux…

Et maintenant lequel est le plus plein ?

Je crois que c’est ma maman qui m’a racontée cela quand j’étais petite.

Bientôt Noël et plus que jamais il faut nous souvenir du message : "Paix aux âmes de bonne volonté"...

La bonne volonté, que nous soyons grands ou petits, c’est là-dessus que nous serons jugés, car c’est tout ce que Dieu nous demande – et c’est beaucoup, car ce n’est pas dans la nature humaine !

Nous sommes si facilement découragés, car cette bonne volonté n’est pas souvent perçue par les autres. Dieu seul voit le fond de notre cœur (où se trouve cette volonté). Et bien souvent les efforts que nous faisons pour rendre cette volonté : bonne – ne sont ni perçus, ni compris.

Hélas, la nature humaine est ainsi faite – aveugle et aveuglée – Il nous faut l’accepter et pourtant cela ne doit en aucune façon nous détourner de ce but jamais atteint : imiter Jésus – qui n’a d’autre volonté que celle du Père, qui est parfaitement bonne parce que volonté d’Amour...

Mais les hommes ont fait mourir Jésus...

 

- 20 décembre 1990

Après trois mois de désert – profond désespoir – ce matin, j’ouvre le livre du Père Brune – C’est la page 121 et je lis :

"Oui, c’est le même "mécanisme", si l’on peut dire, c’est la même pédagogie divine que l’on trouve à l’œuvre dans la vie de tant de mystiques. Dieu fait sentir la douceur de sa présence, la qualité, tout à fait à part, du bonheur de son amour. Puis, il se retire, il disparaît, il se tait, il se cache. Et alors, c’est la douleur, d’autant plus grande que plus fantastique était ce bonheur. Et l’âme est prête à tout pour retrouver ce bonheur, prête à traverser toutes les épreuves, à subir tous les tourments, à consentir à tous les renoncements."

C’est donc cette douleur si poignante, ce désir si ardent qu’a, par exemple, si bien exprimée st Syméon le Nouveau Théologien. Le seul mystique des Eglises d’Orient, peut-être, à nous avoir laissé deviner un peu les secrets de son cœur...

Une grande bouffée de joie m’envahit pour la première fois depuis trois mois, tandis que je descendais peu à peu dans l’enfer de la désespérance. Donc, mon "état" a existé. Je le savais, je le sais... mais le doute, ce serpent pernicieux, s’était de nouveau installé en moi : Dieu avait disparu, et je ne comprenais pas pourquoi j’avais "démérité" cet abandon – (pas plus que mérité quoi que ce soit, d’ailleurs !) Mais c’est la première fois je crois, qu’en quelques lignes je vois définir mon état d’âme ! Merci Père Brune – Merci Majesté – Cela va être Noël, je le sais, je le sens.

Comme pour soutenir cet élan de joie, je me sens obligée de regarder à la date du 20 décembre dans l’agenda que le Père D. m’a donné. Ô merveille ! Aujourd’hui : saints Abraham, Isaac et Jacob – (non des philosophes et des savants !... merci Blaise Pascal.) Pensée du jour : Fais de moi, Seigneur, une lampe qui brûle et qui luit !... et en bas de la page un texte de... Syméon le Nouveau Théologien ! ! ! Cadeau royal, les signes dont j’ai tant besoin pour ne pas te perdre, Majesté, pour que tu sois en moi "une lampe qui brûle et qui luit", dans le silence que je sais à présent garder.

C’est une "cathédrale de coïncidences exagérées" que Tu m’offres – pour que la joie puisse revenir et que je puisse en éclabousser les autres... les miens qui arrivent de Bretagne et qui ont tant besoin que je leur communique ta Paix, ta Lumière. C’est le plus beau cadeau de Noël que tu me permettras de leur faire !

Au calendrier des Postes aujourd’hui, c’est la saint Théophile qui signifie : ami de Dieu. Merci !

 

- Juillet 1991

Avec Toi, il ne faut jamais oublier que toutes les valeurs sont toujours renversées ! C’est ce qui vaut le plus qui vaut le moins, et surtout ce qui vaut le moins qui vaut le plus ! Tu abandonnes tout pour ce qui vaut le moins.

Tu es venu sauver ce qui ne pouvait être sauvé !

Et nous ne le comprenons pas ; cela nous laisse désemparés, déconcertés.

Et pourtant, si nous savions réfléchir : ce n’est pas si souvent que nous pouvons donner la préférence, ouvertement, à ce que préfère notre cœur ! Il nous faut souvent assumer auprès de ce que nous aimons moins. Et ce que nous aimons le plus peut alors s’étonner, s’inquiéter.

Ce n’est pas forcément ce qui est le plus près de nous que nous aimons le plus fort – pour qui nous avons une préférence – Mais c’est ce qui est le plus près de nous qui a souvent le plus besoin de nous. – Il faut aller au plus pressé.

Se rappeler toujours la parabole de "L’enfant prodigue". Tout Dieu est raconté là-dedans – et "l’indignation" du frère aîné peut nous faire comprendre la nôtre, elle est tellement humaine. N’oublions pas la leçon : la préférence du Père va peut-être à ce fils qui lui ressemble : sage et aimant – mais elle doit se faire oublier devant l’urgence de la situation.

Nous qui essayons d’être fidèles, ne nous croyons pas abandonnés pour autant.

Si Dieu se fait tellement silencieux et absent pour nous, qui sommes pourtant ses enfants soumis et aimants, c’est parce qu’Il a sans arrêt des "urgences" – des brebis en perdition.

Il nous faut accepter ce silence de Dieu, qui n’est ni oubli – ni rejet. En l’acceptant avec le meilleur cœur possible, nous l’aidons peut-être à aller plus vite et plus loin, pour les enfants perdus. Sachons lui dire : " Ne t’inquiète pas pour moi, je sais que Tu m’aimes, même si tu ne me le fais pas savoir en "direct" et que cela me fait mal, je continue de t’aimer et de me savoir aimée. Ne perds pas de temps avec moi, nous sommes sûrs l’un de l’autre. Cours après ceux qui ne savent pas que Tu les aimes, ils ont tellement besoin de Toi." – Et un jour nous serons tous réunis !

De toute façon, Marie a choisi la meilleure part, elle ne lui sera pas ôtée ! Tu l’as promis.

 

- 2 septembre 1991

Plus d’un mois de recul. Faute de temps et aussi parce que j’ai décidé de "fermer ma tête" à ce genre de choses… mais je n’ai pas oublié ; oh non !

Le 14 juillet de cette année, Amaury, mon dernier petit-fils, 22 mois, accidenté le 14 juillet 1990 – il est tombé à 10 mois sur la tête, trépané 3 jours après ; miraculeusement il n’y a pas eu de séquelles !

Ce 14 juillet 91 donc, nous sommes allés, Michèle, Amaury et moi au petit cimetière d’Erloy, c’est pour nous une promenade. Arrivés là, à notre grande stupéfaction, le bébé s’est dirigé vers une tombe assez haute, 2 ou 3 marches à escalader – nous pensions qu’il voulait jouer - mais instantanément sur la tombe il a embrassé à pleine bouche la tête du Christ scellée sur la pierre, puis celle de Marie, allant de l’un à l’autre dans une pluie de baisers ! (et pourtant le marbre est froid !)

Quelques jours plus tard, nous y sommes retournés, même manège, mais il a voulu aller sur une dizaine de tombes, n’embrassant parmi les plaques souvenir, que le Christ, rien d’autre, et ne se trompant jamais.

Puis le jour où mes enfants devaient retourner en Bretagne, pour une dernière promenade, seule avec lui, nous sommes retournés au cimetière. Là, ce sont toutes les sépultures du cimetière qui y sont passées. Ne sachant pas encore parler il me prenait par la main et tendait son petit doigt disant : encore, encore ! Il a voulu embrasser tous les crucifix de toutes les tombes ! J’étais à la fois bouleversée et un peu mal à l’aise, à la limite trouvant cela presque malsain.

Quelque temps après, commentant la chose avec ma belle-fille toujours un peu négative, jamais tout à fait satisfaite de son sort, je lui disais : " Regarde la leçon que Dieu nous donne à travers Amaury ; Un an jour pour jour après cet accident qui pouvait être mortel, mon bébé embrasse tous les Crucifix du cimetière. C’est un enseignement : ce tout petit voulait dire à Jésus que lui aussi acceptait et voulait prendre part à sa croix. Dans son innocence, il vient de nous donner l’exemple, nous ne devons jamais l’oublier. J’aurais pu ajouter ce que je pense aujourd’hui, c’est que Jésus les lui rendait bien ses baisers, car cet enfant éprouvait un bonheur infini à faire ce qu’il faisait ! Sinon pourquoi l’aurait-il fait ?

Il y a eu là un échange d’Amour entre ce monde et l’Autre, j’en suis certaine.

Merci mon Dieu ! Protégez mon bébé, mes enfants et tous ceux à qui je voudrais épargner le moindre chagrin.

 

- Dimanche 9 février 1992

Incarnation = Dieu-Homme

Par Amour Tu t'identifies à nous, pas seulement au genre humain en son entier, mais à chacun de nous – personnellement – et si bien, mon Seigneur, qu'à travers Toi, nous prenons peu à peu conscience de ce que nous sommes.

Avec un Amour et une Patience infinis, lentement Tu nous mets en face de nous-mêmes, et nous sommes obligés de nous regarder ; d'oser enfin nous regarder tels que nous sommes et tels que nous devrions être par rapport à Toi.

Mais Tu es là en filigrane pour nous rassurer : avec Toi en nous, nous ne pouvons pas être aussi mauvais que nous le découvrons, Tu nous dis d'en avoir la certitude – et que c'est pareil pour les autres, pour tous les autres, et qu'il ne faut jamais l'oublier.

Tu es la partie perdue de notre être, la plus belle, celle dont nous avons été privés par la tare originelle. Tu viens nous restituer. Avec Toi, nous retrouvons notre Unité et aussi notre Unicité. Tu nous rétablis vraiment en notre premier état : celui où Dieu notre Père nous avait créés.

Et c'est le bonheur, parce qu’avec Toi nous trouvons enfin notre double, notre "nous même", avec qui dialoguer. Toi seul nous connaît "con-naît" vraiment. Toi seul peut nous comprendre "com-prendre", nous assumer. Notre bonne volonté te suffit, et surtout notre confiance – en Toi – surtout pas en nous-mêmes – puisque Tu viens de nous faire découvrir le pourquoi de notre malheur : d'avoir cru que sans Toi nous pouvions exister ! Ne plus jamais Te perdre de vue mon Seigneur et apprendre tous les jours à Te ressembler. Apprendre de mieux en mieux à Te percevoir dans les autres, surtout ceux qui ne te perçoivent pas en eux-mêmes : ils sont si malheureux. Alors te laisser montrer Ton Visage à travers le nôtre, que Tu puisses leur crier qu'ils ne sont pas tout seuls !… Que Tu es aussi en eux – en filigrane – mais il faut qu'ils Te découvrent, que Ta Lumière éclaire leur opacité, par transparence.

Et il n'y a que l'Amour qui puisse produire une telle lumière, Ta Lumière, et il faut que cet Amour passe par nous, il n'y a pas d'autre possibilité pour Toi, puisque Tu es enfermé en nous ; il n'y a donc que nous pour Te montrer !…Alors, après T'être identifié à nous pour nous sauver parce que Tu nous aimes – en nous montrant que nous c'est aussi TOI – Par la puissance de Ton Amour, Tu nous identifies à TOI, et nous devenons, nous deviendrons ce que TU ES : Homme-Dieu.

 

- 8 septembre 1992

Il y a une quinzaine de jours, après deux jours d’arrêt (une tendinite du tendon d’Achille) due à de grandes promenades et baignades avec l’aîné de mes petits-fils (13 ans), voyant qu’il s’ennuyait, malgré ma difficulté à marcher, j’ai donc proposé à Mathieu de retourner nous baigner dans l’Oise.

En revenant dans le chemin de campagne rempli de profondes ornières, mon bon pied a glissé, j’ai buté, valdingué et atterri dans les ronces ! J’en pleurais de douleur et de découragement ; mon bras droit saignait abondamment de plusieurs balafres, mes deux mains aussi. Après quelques instants, reprenant mes esprits, j’ai dit à Mathieu : comme nous allons repasser devant le cimetière, j’irai me laver au poste d’eau à l’entrée, pour qu’à la maison ils ne voient pas comment je suis arrangée, car en plus, nous nous ferons gronder. Ils diront que c’est de ta faute, ce qui est faux, puisque c’est bien moi qui t’ai proposé la baignade.

C’est ce que nous avons fait. Mathieu a retiré quelques épines de ronce qui étaient enfoncées dans les plaies, puis avec la serviette de bain j’ai lavé mes bras essayant d’arrêter le sang qui continuait de couler…

Et deux heures plus tard, à table, personne n’a rien vu et pour cause : sur mon bras nu il n’y avait plus rien à voir ! Mathieu que j’appelais à la cuisine l’a constaté comme moi : ma peau était absolument indemne et, j’oserai le dire, beaucoup plus belle et jeune que d'habitude. Toute la soirée, prenant Mathieu à témoin, nous nous sommes émerveillés devant le phénomène, d’autant que je ne souffrais absolument pas. Et je ne me lassais pas de remercier Dieu !

Le lendemain, à mon réveil, toutes les balafres, ecchymoses, coupures étaient là, bien visibles, mais déjà cicatrisées et normalement douloureuses.

Ce n’est que bien plus tard, en essayant de comprendre ce "petit miracle" auquel je pensais de temps à autre, que la Vérité m’apparut évidente : Tout l’amour qu’Amaury avait prodigué en embrassant  les effigies du Christ au cimetière, Jésus me l’avait rendu en effaçant provisoirement avec l’eau du cimetière, les traces de ma chute. Jésus savait que celle-ci avait été la conséquence d’un acte de charité envers Mathieu – Pour faire plaisir à celui-ci, j’avais pris sur la souffrance que me causait la tendinite, d’où ma chute ; et de plus, je ne voulais pas qu’à la maison mon mari et mon fils lui disent que c’était de sa faute !

Merci, Majesté, de ce geste d’Amour.

Ô mon ami !
Soyons en joie et allons-nous en nous voir en Ta Beauté !

- Septembre 1994 

Je suis un arbre mort sur lequel, de temps à autre, viendrait se percher un oiseau !

Quatre ans que mystérieusement la Source s’est tarie !

L’eau ne coule plus, le temps est suspendu… Plus rien… Si : la vie. Et tous les jours je dis : encore une journée de moins à vivre, mon Seigneur, merci ! Et chaque nuit passée me rapproche un peu de Toi ! Mais combien de temps encore ?

Quatre ans de grand silence où j’essaie de sauvegarder le "souvenir du Souvenir" de ce que Tu me donnas ! …

Car Tu m’as tout donné ; tout ce qu’une âme séparée de Toi par la Matière, le Temps et l’Espace, peut espérer en ce monde.

"Ô ! Mon Ami, soyons en joie et allons-nous en nous voir en Ta Beauté" (Jean de la Croix). Ô ! Suprême récompense : Tu m’as emmenée nous voir en Ta Beauté ! Merveille ! Mais qui pourrait le dire ? Qui pourra dire ce bonheur que l’autre jour Tu me donnas ?

Je t’attends, les jours sont longs et monotones. Quel goût peut-on trouver aux êtres et aux choses quand on a goûté à Toi ?

Mais il faut vivre, Tu le veux…

Alors, je me dessèche et je me dépéris. M’aimeras-Tu encore quand Tu te souviendras de moi ?

Je suis une eau morte et glacée. La Source d’eau vive – en apparence – a cessé de l’alimenter. Et sauf, peut-être, ce petit Feu de Toi qui vacille là-bas, à la surface de cette noire étendue et ne veut pas sombrer, qui ne peut pas sombrer : la Foi… est tout ce qui me reste !

 

- Avril 1996

Oh ! Entrevoir encore une fois le Ciel ! Pour y puiser le courage de devenir. Pour suivre la route qu’un jour Tu m’as montrée !

Ô ma Source et mon Dieu, comme un voyageur perdu dans le désert, je ne sais plus où je vais, ni même pourquoi je vais !

C’est la nuit obscure où pas une étoile ne luit. Je suis entourée de négativité et d’hostilités ; je rampe dans le noir. Donne-moi Seigneur la force que je n’ai plus !

Rends-moi une petite lueur de ce que Tu m’avais si généreusement prodigué !

Je comprends et j’accepte que Tu aies tout repris – mais ce qui en reste : le souvenir qui m’aidait à survivre, même cela disparaît dans une lointaine irréalité !

Ne laisse pas l’esprit du Mal rôder autour de moi. Garde-moi intacte auprès de la petite étincelle que j’arrive à peine à préserver. Ta Grâce ô Majesté ! Ne me retire pas Ta Grâce !

En Toi je m’abandonne, je suis ta servante Seigneur, fais de moi ce que Tu veux – mais si seulement je savais ce que Tu veux ! …

Quelle sottise !

C’est comme cela que Tu me veux : ignorante et inconditionnelle !

Il faut donc que je cesse de me plaindre, puisque c’est dans ce noir absolu que Tu me conduis le mieux. Comment oserais-je murmurer ? Augmente ma Foi, Ô mon Seigneur !

*Permets Esprit Éternel, à nous qui sommes agenouillés devant Ton obscurité, qu’elle se change en lumière par ta Grâce, car nous n’en portons qu’une misérable étincelle en nous-mêmes. Envoie sur nous Ton Souffle, que nous ne sentons pas. Conduis-nous, même si nous ne suivons pas. Reçois-nous, même si notre fierté rejette toute consolation, car nous ne pouvons T’atteindre sans Ton aide et il n’y a pas d’aboutissement à moins que Tu ne le montres ! *

(Charles Morgan : attribué aux Protestants allemands)

D’accord ! J’ai passé dix jours et dix nuits chez les fous ! Dieu n’a pas voulu que je me prenne au sérieux et ça c’est une grande grâce. Par contre, Lui m’a prise au sérieux et c’est bien cela le plus important. La chose la plus importante, peut-être, puisque Il l’a voulue ainsi.

Ne nous soumets pas à la tentation : ne devrait-on pas dire : ne nous soumets pas au Tentateur – puisque c’est lui le Maître de ce monde ? Ou bien : ne nous soumets plus – puisqu’il y a deux mille ans Ton Fils Jésus a déjà vaincu Satan !

Mais les temps ne sont pas accomplis, le temps de Dieu n’étant pas celui des hommes, et l’Adversaire est encore pour l’instant, Maître de ce Monde. Alors permets-nous d’ajouter : Hâte-toi de nous délivrer du Malin ! Amen.

Pierre Monnier, de l’au-delà dicte à sa mère : Ne nous laisse pas tomber dans la tentation, mais délivre-nous du Malin !

Le Père Varillon lui, traduit : Ne nous laisse pas succomber à la tentation !

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Il ne faut pas assimiler la Face du Christ – et l’église faite d’hommes et de pécheurs.

C’est comme si l’on confondait le Visage de Jésus et les crachats qui le recouvraient lors de sa Passion.

Les crachats ne sont pas le visage du Christ ; ils le recouvrent, mais Son visage reste le même au-dessous de ces crachats. Ainsi de l’Église : Il y a toujours eu des gens d’église, des prêtres, des fidèles, depuis le commencement, qui ont fait le déshonneur de l’Église : des crachats sur son visage ! Il faut savoir essuyer ces crachats pour ne voir que son vrai visage, celui que Jésus a donné à son Épouse.

L’Amour que Dieu a pour nous ? Nous en avons un reflet dans l’amour d’une mère pour ses enfants – qui n’ont pas à se donner de peine pour être aimés ; ils sont aimés tels qu’ils sont.

Mes deux fils chéris : Je vous aime ! Je vous dois tout, car je vous ai donné la vie. C’est à cause de moi – et par moi, que vous êtes entrés dans ce monde. Je suis donc responsable de votre existence – et ce, jusque dans l’Éternité.

  • Ainsi de Dieu qui nous crée et nous fait exister : Responsable de notre existence, Il nous aime tous et pour l’Éternité !

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Il ne faut pas être bourré de certitudes, mais savoir nous remettre en question – tout en gardant confiance, non pas en soi, mais en la Providence qui sans arrêt nous guide.

Jésus se met à notre place en tout. Puisqu’il était homme Il connaît notre nature humaine, Il l’a assumée – ce qui veut dire : Prendre volontairement sur soi ; se charger de ; accepter les conséquences de - (Larousse). A notre jugement particulier ce n’est pas Lui qui nous jugera, c’est nous-mêmes à la Lumière de sa Beauté, qui prendrons conscience de notre petitesse, de notre égoïsme, de tous nos manquements à l’amour. Nous serons bouleversés de honte et de remords en nous voyant tels que nous sommes. Il ne nous jugera pas, Il nous dira que même le plus grand pécheur peut être pardonné parce que l’Amour pardonne tout. Qu’il faut avoir confiance parce que : Même si notre cœur nous condamne, Dieu est plus grand que notre cœur ! (St Jean)

Et à la fin des temps Lui seul se présentera devant le Père, ayant réuni toute l’humanité rachetée en Lui-même. – Qui pourrait tenir devant Ta Face ? Seul Jésus Dieu-Homme-Fils peut "tenir" devant Dieu-Père-Esprit.

La réponse à cette énigme ou ce mystère, c’est Jésus lui-même qui nous la donne : "Votre père à vous c’est Satan". Jésus est venu rechercher ce qui était perdu : Il fait la Volonté de son Père. Et que veut le Père ? Rendre à ses créatures de la terre, le bonheur, la vie éternelle pour lesquels Il nous avait créées.

Lucifer, prince des anges, responsable des anges, prend sur lui le péché de ses anges.

Tout comme Jésus prend sur Lui le péché des hommes qui est arrivé par la faute d’un ange, Satan.

Donc Jésus reprend à travers l’homme le péché de Satan

- Pour les jeunes … et les moins jeunes

L’Homme croit toujours qu’il s’est fait tout seul et s’enferme dans un amour-propre qui est l’obstacle le plus grand à renverser pour arriver à l’Amour tout court. Cet amour qui vient de Dieu et ne peut que retourner à Dieu qui nous a créés par AMOUR.

"Par la faute d’un seul homme, la mort a passé en chacun de nous" dit St Paul. Cette tare héréditaire, il serait peut-être temps de se demander ce qu’elle est vraiment :

Dieu donne des lois – c’est à dire qu’Il donne le mouvement primordial et le "programme" inclus dedans.

Tout le monde sait à présent qu’en informatique certains programmes (logiciels) sont (par des gens malins et pervers) infestés par des virus. Si l’opérateur ne prend pas soin de passer un détecteur de virus, le logiciel devient alors inutilisable, car complètement faussé. Et bien pire : "l’âme de l’ordinateur" le disque dur qui est la vie même de l’ordinateur où est stockée toute sa mémoire peut être tuée par ce virus – fichue – morte – irrécupérable.

Cette analogie peut nous faire comprendre ce qui s’est passé pour nous : Des esprits malins et pervers ont introduit un Virus – le Mal – dans notre programme. "Le mal est dans l’homme" dit Dieu avant le déluge, (comme le mal est dans la disquette) – et le programme est définitivement fichu ! Sauf !… sauf si Celui qui a inventé ce logiciel est capable de le restaurer de l’intérieur et lui redonner sa forme première en détruisant le virus et en récupérant le disque dur.

Et c’est Dieu lui-même le Concepteur qui envoie son Amour se faire homme, Jésus, qui s’intègre dans le programme de la vie terrestre (notre logiciel) pour détruire le virus (Satan) et redonner sa Vérité première à notre Programme, nous restituant dans notre état originel.

- Ma Foi provient d’une certitude intérieure…

- Pourtant on a cherché des preuves de l’existence de Dieu ?...

- Ce n’est pas cela qui nous le fera trouver ! Dieu ne se prouve pas : IL s’éprouve !

- C’est vrai cela ?

   OUI !!!

- 13 décembre 1996

J’ai lu ou cru lire, (car je n’arrive pas, après de nombreuses recherches à retrouver ce passage ; je pensais que c’était dans Julienne de Norwich), j’ai donc cru lire cette phrase qui m’a apporté un bonheur indicible :

"Chaque larme versée par Amour ou à cause de l’Amour, a la même valeur que chaque goutte de sang versée par le Christ, qui en quelque sorte, nous les "remboursera" au centuple, lorsque nous l’aurons enfin rejoint".

A présent, je me demande si je n’ai pas rêvé ceci ?…

Alors, me revient en mémoire cette vision que Dieu m’a certainement envoyée il y a quelques années : Juste avant mon réveil un matin, J’ai VU – en esprit – (puisque je dormais encore), sur un grand fond de lumière très blanche, comme de la neige au soleil, se profiler un enfant tout habillé de bleu-marine des pieds à la tête (je ne voyais pas son visage), qui disait : La Grâce de Dieu !

Là-dessus, je me suis réveillée et je n’ai jamais pu oublier ‘’ l’apparition’’ et surtout pas les paroles qui me sont toujours comme un baume sur le cœur, quand je suis en désespérance ! J’ai raconté cela à mon curé qui m’a simplement répondu : Vous en avez de la chance !…

La Clef

Un grand MERCI au Père Louis Bouyer ( de l’Oratoire)

J’ai enfin rassemblé avec l’aide de l’ordinateur, tout ce que j’ai pu écrire ici ou là,

la nuit comme le jour (mais j’en ai brûlé beaucoup) : des bouts de papier sur lesquels j’ai noté depuis plus de trente ans, quantité de réflexions qui ont traversé mon esprit. Après avoir trié tout cela, j’ai essayé de raccorder l’ensemble. C’est peut-être un peu décousu, mais à mon grand étonnement, j’ai l’impression d’avoir enfin achevé le puzzle.

Je ne suis ni scientifique, ni philosophe, si quelques pièces ne sont pas tout à fait à leur place, de plus savants que moi pourront rectifier : A vous de juger ….

Anne-Marie

- Novembre 1999

Notre nature déchue subit par voie d’hérédité la tare léguée par Adam et Eve, conséquence tragique et inéluctable de la transgression commise (plutôt péché d’imprudence et d’inconséquence ! ). Yahvé  avait averti : Si tu fais cela – cela va te conduire à la mort.

Le Jaloux, le Tentateur, l’Adversaire, sachant déjà qu’il est voué à l’extermination, a combiné le traquenard afin de pouvoir se réfugier en Caïn, via Adam et Eve –  “Le ver était dans le fruit”. (Le ver est en réduction un serpent !) : la “pomme” était peut-être véreuse ? Ingestion du fruit avec l’Ennemi dedans ?  Mystère de la génétique !

  Alors, ils furent ‘chassés’ du Paradis (pour atterrir sur notre planète ?)

Caïn : premier homme né d’Adam et Eve : premier meurtrier parce que première “intrusion” du Mal (ou Malin) dans l’Homme : Le Tentateur et ses séides refusant de comparaître devant Dieu après leur révolte ont trouvé ce moyen d’échapper  – momentanément –  (notre espace-temps n’est pas celui de Dieu) – et depuis, se survivent en chacun de nous. Mais la Genèse précise que si notre corps retournera en poussière, satan s’est autocondamné en s’y précipitant, car Yahvé s’adresse à lui en premier et lui dit : “Puisque tu as fait cela, tu marcheras sur ton ventre et tu mangeras de la poussière tous les jours de ta vie.” (Tous les corps morts).­

–Yahvé sait que si Caïn a tué, c’est que l’Autre a pris possession de lui (Le Péché est tapi à ta porte ! dit Yahvé) et Caïn le sait aussi. Sinon la plainte de Caïn, devant la condamnation de Yahvé, que celui-ci prend aussitôt en considération en le marquant d’un  signe destiné à le protéger, n’aurait aucun sens, puisqu’en fait Il lui dit : « Aussi bien, si quelqu’un tue Caïn, on le vengera sept fois ». Ce n’est donc pas Caïn que Yahvé condamne, mais le meurtrier (le Malin) qui s’est tapi en lui.

Le Tentateur a trouvé refuge dans notre corps, mais celui-ci est devenu, par la logique de la transgression, un corps mortel ! Or tout être humain est composé de matière et d’esprit, qui sont dans cette vie, indissociables. Notre esprit, notre corps spirituel insufflé par Dieu ne sera hors de l’atteinte de Satan, qu’à la mort de notre corps charnel. D’ici là, le bon grain est mélangé à l’ivraie dans un fouillis inextricable.

Pour l’instant, chaque être humain est investi par la présence occulte de celui qui s’est incorporé à l’être humain, mais dans la chair ou ce qui fait partie de la chair (le cerveau ?...) – maintenant un corps voué à la mort.

Tout comme chaque être humain – spirituel – constitue une partie, un membre du Corps Mystique Unique du Christ promis à la Vie Eternelle.

Les anges déchus, (pour qui le temps n’existe pas) veulent être sauvés. Ils usent d’un stratagème en circonvenant  Adam et Eve. Après avoir tué Abel, ils veulent arriver – par la naissance des descendants de Caïn, à être réintégrés dans la deuxième Économie : le Salut par le Christ. (Ils le connaissent, sans trop savoir qui Il est, ni à quelle époque terrestre il se manifestera : le temps étant éternel présent pour eux). D’ailleurs St Paul dans la première épître aux Corinthiens (2,6-8) le dit clairement : "pourtant, c’est bien de sagesse que nous parlons, mais non d’une sagesse de ce monde, ni des princes de ce monde voués à la destruction" (la bible de Jérusalem précise qu’il faut entendre par là les puissances mauvaises, les démons qui règnent sur le monde – La version de Segond traduit : sagesse qui n’est pas de ce siècle, ni des princes de ce siècle qui vont être réduits à l’impuissance) et St Paul ajoute “ Ce dont nous vous parlons au contraire, c’est d’une sagesse de Dieu, mystérieuse, demeurée cachée, celle que dès avant les siècles Dieu a par avance destinée pour notre gloire, celle qu’aucun des “princes de ce monde” n’a connue – car, s’ils l’avaient connue, ils n’auraient pas crucifié le Seigneur de Gloire ! (Ou : ils n’auraient pas poussé les hommes à le faire…).

Donc, ces entités – les volontaires tout au moins – décident de s’introduire dans les enfants des hommes (dans une partie de l’appareil psychique, la seule qui leur soit accessible, puisqu’ils sont eux-mêmes des êtres psychiques : l’Inconscient), sachant qu’en fin de compte tous les hommes seront sauvés. – et eux, peut-être, par la même occasion ! Leur dernière chance ! … Dieu le sait… Si Dieu le veut !

Le chapitre 6 de la Genèse versets 1 à 5 devient beaucoup plus clair si nous envisageons les choses de cette façon. « Les fils de Dieu (déchus) trouvèrent que les filles des hommes leur convenaient et ils prirent pour femmes toutes celles qu’il leur plut ». Il ne faut peut-être pas interpréter cette phrase uniquement dans le sens sexuel, mais aussi psychique (l’un n’empêchant pas l’autre !) Constatant la contamination, Yahvé dit : “Mon Esprit ne sera pas toujours humilié dans l’homme, puisqu’il est chair : sa vie ne sera que de cent vingt ans. ”  Puis voyant décidément ‘’ que le mal était dans le  ‘’cœur’’  de l’homme”, Yahvé décida d’envoyer le Déluge afin de laver la terre de toutes ses créatures (à l’exception de Noé, descendant direct de Seth troisième fils d’Adam et Eve.)

Ils sont esprits, ils s’incorporent, mais leur lieu de résidence est le :

Çà ! = l’Enfer !

Je n’ai jamais rien lu de Freud, mais le dictionnaire Larousse explique et je recopie :

« Le Çà est l’une des trois instances de l’appareil psychique, constituant le réservoir des pulsions et du refoulé, à partir de laquelle se différencient génétiquement le Moi et le Surmoi. (Le contenu du Çà est inconscient, mais le Çà ne représente pas tout l’inconscient). »

« Selon Freud, l’Inconscient est formé par les pulsions et par les désirs refoulés. Ce système ne connaît ni le temps, ni la réalité extérieure ; (comme les anges !) des désirs inconciliables peuvent y coexister. Les mécanismes en jeu sont le déplacement (Report de l’énergie psychique liée à un désir inconscient sur un objet substitutif) et la condensation (Fusion d’éléments provenant d’associations diverses en une représentation unique). L’inconscient n’obéit qu’au principe du plaisir. »

« Dans une deuxième définition Freud dit que le terme inconscient qualifie alors non seulement le Çà, mais certains contenus du Moi et du Surmoi. Les rêves, les actes manqués et les symptômes névrotiques apparaissent à Freud comme autant de manifestations de l’Inconscient. »                                

Et à moi, il apparaît tout à fait évident que le refuge des esprits mauvais se situe dans le Çà ! – Et l’Homme ne le sait pas car il ne les perçoit même pas ! Mais on peut constater les dégâts qu’ils occasionnent !

Toujours selon Freud : « le Moi est la conscience personnelle et indépendante, ce qui constitue l’individualité, la personnalité de l’homme. C’est une instance de l’appareil psychique, distinguée du Çà et du SurMoi, permettant la défense de l’individu contre la Réalité et contre les pulsions. » (J’ajouterai que la Réalité : c’est Dieu, (le Surmoi) et les pulsions : (le Çà).  Et selon Freud, ‘’ le Moi se défend contre la Réalité’’, c’est à dire que  par sa nature dénaturée il refoule Dieu, (qui est la Réalité !) tandis qu’il aurait tendance à subir le charme de ses pulsions et à succomber à la tentation.

Mais heureusement Dr Freud !  Nous avons la Grâce de Dieu qui soutient notre libre arbitre pour rester à peu près maîtres de nous… Mais c’est vraiment ici-bas qu’est notre purgatoire !

Quant au Surmoi dit Freud : « C’est une formation inconsciente qui se constitue à partir du Moi ; par l’identification de l’enfant au parent, représentant de l’autorité. Elle joue le rôle de juge vis à vis du Moi ; de leurs conflits éventuels (entre le Moi et le Surmoi), naissent les sentiments inconscients de culpabilité… » Le Surmoi : L’Esprit de Dieu, c’est certain ! – Mais les bons anges aussi pardi ! Qui font du zèle avec leur Loi, peut-être pour essayer de nous sauver, mais surtout sauver leurs frères cachés dans le Çà de l’homme. Car de même la “communion des saints”, de même “la communion des anges” = solidarité dans l’épreuve des anges fidèles avec les anges rebelles – d’où : Ambiguïté.

Satan lui-même se déguise bien en ange de lumière ! Il n’est donc pas surprenant que ses ministres aussi se déguisent en anges de justice ! (St Paul : 2 Cor, 11 ; 14 et 15.)

Et toujours Paul : (2 Cor, 12 ; 7)… A cause de l’excellence de ces révélations, et pour que je ne sois pas enflé d’orgueil, il m’a été mis une écharde dans la chair, un ange de Satan pour me souffleter, pour que je ne m’enorgueillisse pas !

 L’enfer est pavé de bonnes intentions !

Mélangez tout cela et vous comprendrez tout et pourquoi Saint Paul s’écrie : « Malheureux homme que je suis ! » Saint Paul a tout compris et nous l’a raconté du mieux qu’il a pu ! Il faut relire à la clarté de ce qui précède toute l’épître aux Romains et en particulier : 5 ; 20 «  La Loi, elle, est intervenue pour que se multipliât la faute ; mais où le Péché s’est multiplié, la grâce a surabondé ». Et au chap.7 depuis 7-25 : «  Qu’est-ce à dire ? Que la loi est Péché ? Certes non ! Seulement je n’ai connu le Péché que par la loi. Et, de fait, j’aurais ignoré la convoitise si la loi n’avait dit : « Tu ne convoiteras pas… Mais, saisissant l’occasion, le Péché  (planqué” dans le Çà) par le moyen du précepte produisit en moi toutes sortes de convoitise : car sans la Loi, le Péché n’est qu’un mort. *Ah ! Je vivais jadis sans la Loi ; mais quand le précepte est survenu, le Péché a pris vie tandis que moi je suis mort, et il s’est trouvé que le précepte fait pour la vie me conduisit à la mort. Car le Péché saisit l’occasion et, utilisant le précepte, me séduisit et par ce moyen me tua.* (Note personnelle) : St Paul dit carrément que le Péché  ne suit pas la tentation, mais la précède. Pour lui, c’est le Péché qui suscite la tentation - qui la provoque ! Le Péché, comme Paul le voit, est une Puissance active (- réactivée par la Loi) capable de subjuguer notre Vouloir. Un parasite infiltré dans notre psychisme).

« En effet, nous savons que la loi est spirituelle ; mais moi je suis un être de chair, vendu au pouvoir du Péché. Vraiment ce que je fais, je ne le comprends pas : car je ne fais pas ce que je veux, mais je fais ce que je hais. Si ce que je ne veux pas, je le fais, je déclare, d’accord avec la loi, qu’elle est bonne. Maintenant, ce n’est plus moi qui accomplis cela, mais le Péché qui habite en moi. »

« Car je le sais, ce qui est bon n’habite pas en moi, c’est à dire dans ma chair, (il faudrait dire : mon humanité.) Car je suis à même de vouloir, mais pas d’accomplir le bien. Je ne fais pas le bien que je veux, mais je pratique le mal que je ne veux pas. Si je fais ce que je ne veux pas, ce n’est plus moi qui l’accomplis, mais le Péché qui habite en moi. Je découvre donc cette loi : quand je veux faire le Bien, c’est le Mal qui se présente à moi. Car dans mon for intérieur, je prends plaisir à la Loi de Dieu, mais je vois dans mes membres une autre loi, qui lutte contre la loi de mon intelligence et qui me rend captif de la loi du Péché qui est dans mes membres. «Malheureux homme que je suis ! Qui me délivrera de ce corps de Mort ? »

« Grâces soient rendues à Dieu par Jésus-Christ, notre Seigneur ! Ainsi, c’est donc bien moi qui par mon intelligence sers une loi de Dieu, tandis que par ma chair, je suis esclave du Péché. »

(Autrement dit : l’intelligence ne fonctionne qu’en état d’éveil ; l’inconscient lui, “se réveille quand la chair dort”…)

Et Grâces soient rendues à saint Paul, qui avait tout compris, de nous avoir si bien expliqué cela – ou Çà !!!

Vraiment, c’est clair comme de l’eau de roche !

Car il devient évident que la Loi était destinée spécialement au Çà de l’Homme. Au mont Sinaï “les bons anges”, en dictant la Loi à Moïse, essaient à travers l’homme de corriger leurs frères réfugiés dans le Çà. Les “bons anges”, (qui ignorent beaucoup de choses de la nature humaine) – sans le vouloir, (soyons indulgents !) viennent d’ouvrir ‘la porte’ qui sépare le Çà du Moi. Profitant de l’occasion : Grâce à la Loi, le Cà peut sortir de son trou et infiltrer le Moi. Car Moïse ne peut transmettre cette Loi qu’à travers le Moi de l’Homme. Comment atteindre l’Inconscient dont les hommes ignorent tout ?  Les “Bons Anges” espèrent quand même qu’à travers le Conscient, le “Çà” prendra à son compte les injonctions et que, essayant de s’améliorer, par la même occasion, transformera le Moi de l’Homme. Si les hommes acceptent et accomplissent la loi au pied de la lettre, disent-ils, ils seront sauvés (et le Çà aussi !). Mais c’est l’inverse qui se produit : Car non seulement le Çà fait la sourde oreille, mais il profite de l’occasion pour accabler l’Homme encore un peu plus (il le déteste) et se servant des préceptes de la Loi,  le fait s’enfoncer plus profondément encore. Alors, le Çà et le Moi de l’Homme devient un tout inextricable,

Paul toujours chap 7 aux Romains, 12-13 « La Loi, elle, est donc sainte et saint le précepte et juste et bon. Une chose bonne serait-elle donc devenue mort pour moi ? Certes non ! Mais c’est le Péché (Péché personnifié ou le Serpent, le diable, explique la Bible de Jérusalem) qui, afin de paraître péché, se servit d’une chose bonne pour me procurer la mort, afin que le Péché exerçât toute sa puissance de péché par le moyen du précepte. »

Naturellement, le Moi de l’homme, pas encore éclairé par un Surmoi qui ne peut lui être rendu que par l’incarnation du Christ, va s’enferrer davantage. Et voilà : une fois de plus l’Autre a gagné : c’est retombé sur l’homme. – L’enfer est, dit-on, pavé de bonnes intentions !

Le Péché originel serait donc l’union psychique de l’ange déchu et de l’homme (créé : “Moi et Surmoi”, car ayant reçu l’Esprit de Dieu). Le Péché d’origine serait le “croisement” psychique entre l’humanité et le monde angélique déchu, qui va inexorablement, entraîner avec la perte du SurMoi, une dualité totalement inconciliable : Çà + Moi = Qui veut faire l’ange fait la bête ! (Blaise Pascal).

Pour nous restituer notre SurMoi : Jésus va s’incarner… Agneau de Dieu qui enlève le Péché du monde ! (et non pas les péchés). Il est remarquable que l’autorité de Jésus s’exerce à l’encontre des mauvais esprits  (le Çà). Relisons les Évangiles : une grande partie de son ministère (et celui des apôtres) va consister à chasser les démons de l’Homme. – qui est à ce moment de l’histoire, toujours démuni du ‘Surmoi’  ; il faudra attendre la Pentecôte pour que l’Esprit puisse de nouveau « habiter »  dans l’Homme !

Les pharisiens, sans le savoir ou le vouloir, ont fait le jeu du démon avec l’application de la Loi, dont ils ne voient plus que la lettre et non l’Esprit. Si Jésus vitupère si souvent les pharisiens, c’est parce qu’Il sait que ce sont eux, transmetteurs de la Loi, qui sont en réalité, sans le savoir, les fidèles serviteurs de Satan. A travers eux Il s’en prend à Satan = Çà : quand Il les traite de « Serpents, engeance de vipères ! comment pourrez-vous échapper à la condamnation de la géhenne ? » – c’est bien au Cà qu’il s’adresse ! Pauvres pharisiens ! qui n’étaient probablement pas plus mauvais que les autres : mais à travers eux, il est évident que c’est au Çà que Jésus s’adresse !

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Le grand violoniste Isaac Stern a dit un jour : « Le talent est ce que possède l’homme. Le génie est ce qui possède l’homme ». Je crois que cette phrase est à prendre au pied de la lettre. De même Franz Liszt disait de Schubert : «  Les anges parlaient dans sa tête et Schubert les entendaient ! »

Ce qui expliquerait :

Le dédoublement de la personnalité : dualité soudaine du Cà et du SurMoi, ou le Moi se déséquilibre. Les délires etc.

Les cas de “folie” - Deux esprits cohabitant avec celui de l’homme : le Cà, le Surmoi et le Moi. Si l’Angélique “ bon” n’arrive pas à supporter le corps mortel de l’homme et à cohabiter avec le Cà = dissociation de l’esprit humain.

 Les cas de génie : Le SurMoi supplante totalement par moment les autres instances de l’appareil psychique ! Ex : Léonard de Vinci, Michel-Ange, Mozart...etc. Qui, quand le Surmoi “se tait” redeviennent des hommes comme les autres…

A la limite, les bons anges suivent le mouvement pour aider leurs frères les anges déchus, quand ils se manifestent à travers l’homme – mais pas pour aider l’homme qui n’est pour eux qu’un sous-produit ! Alors, dans le psychisme de l’Homme tout se met à aller de travers !!!

Pourquoi Jésus insiste-t-il tellement quand il se dit être le Fils de l’Homme ? - Parce que sa nature est purement humaine et son Esprit ne doit rien aux anges. Pas d’intermédiaire, donc pas d’obstacle : Il est fils d’Homme et Fils de Dieu. Il l’est “en direct” – revenu à ce que Dieu souhaitait en créant l’Homme. (Jésus naît sans la tare d’origine, Marie a donc échappé à la contamination ?- (Voir Généalogie). « Ce qui déconcerte les anges ! (St Paul) », les bons comme les mauvais, qui n’arrivent pas à concevoir que le Salut puisse venir de cette planète et du produit de cette planète – ce minus – l’Homme, enfermé dans la matière périssable !

Et pourtant St Paul écrit (Col : 1 ; 15-20) «  Le Christ est la Tête du Corps aux membres innombrables, puisqu’Il est le Réconciliateur, par sa croix, des créatures terrestres et célestesLe mystère de l’Incarnation ne devait être révélé aux “Principes” et  “Sources d’Etre” (à titre relatif et second), aux régents du Cosmos (appartenant aux niveaux « surcélestes » de l’être – qu’aujourd’hui dit St Paul (Eph 3 ; 8-12), c’est à dire à la vue de l’Église, alors qu’il était jusqu’à présent “resté caché” aux plus hautes hiérarchies spirituelles.

C’est le genre humain tout entier que Dieu destine au rôle de médiateur cosmique. – C’est pour cela que les hommes seront appelés à juger les anges. (1Cor ; 6-2,3).

Et je me permettrai d’ajouter : et à leur pardonner !

Car le coupable n’est pas l’homme mais bien l’Ange qui a voulu se sauver, malgré sa chute. Sachant que l’Homme – qu’il méprise et déteste – était destiné à une fin glorieuse qu’il a voulu usurper, l’Ange s’est incorporé en Caïn pour profiter de l’aubaine. Détournant par sa ruse la Justice de Dieu, entraînant par cette ruse le malheur de l’Homme – qu’il accuse d’avoir désobéi à Dieu. Or : Dieu qui ne peut pas tricher avec ses propres lois, sera obligé de faire passer l’homme par la Mort, ainsi qu’il en a prévenu Adam et Eve. Mais de tout mal sort un Bien : c’est la seule façon dont Dieu peut anéantir le tricheur… ou peut-être le sauver ?…

Il y a trente ans, en 1970, je pense que j’avais déjà tout compris, mais aujourd’hui avec le temps et la réflexion, c’est devenu très évident pour moi :

Il y a eu la première création : Dieu et les sept jours – à laquelle les anges (Elohim) participaient. (Récit Elohiste).

Deuxième récit : Yahviste – L’archange Lucifer – “porteur de lumière” – une des plus belles entités créées par Dieu ainsi que Michel – “qui est comme Dieu” – chargé de l’organisation de l’univers (ou simplement de notre planète ?), est le bras droit de Dieu.

Mais dans un gouvernement, il y a forcément des ministres et toute une hiérarchie, comme dans une entreprise il y a le patron, le contremaître, puis les ouvriers… l’un d’entre eux, (le contremaître) (contre le Maître ?) qui avait peut-être déjà reçu un blâme, est jaloux de cette basse créature qu’est l’homme, dont il sait (car il est pure intelligence hors de l’espace et du temps) qu’elle deviendra supérieure aux anges. – (St Paul : Ne savez-vous pas que nous serons appelés à juger les anges !). Il va circonvenir l’homme, comme nous le savons. S’étant “mélangé” – en quelque sorte amalgamé à l’esprit de l’homme (Çà, Moi et Surmoi), de telle façon qu’à la sortie – c’est à dire après la mort physique de l’homme, ce mélange reste inextricablement emmêlé, (explication du bien et du mal ; du bon grain et de l’ivraie) et “l’Autre” profitera de l’imbroglio pour essayer de “passer à l’as” !…                   

En Mathieu 11 ; 12, Jésus dit : Depuis les jours de Jean-Baptiste jusqu’à présent, le Royaume des Cieux souffre violence, et des violents le prennent de force. (Dans les diverses interprétations de la Bible de Jérusalem figure celle-ci : de la tyrannie des puissances démoniaques, ou de leurs suppôts terrestres qui prétendent garder l’empire de ce monde et entraver l’essor du Royaume de Dieu.) (Or : Jésus dit à ses disciples que Jean-Baptiste est cet Elie  qui doit revenir…) Donc depuis Elie jusqu’à Jésus « le royaume des Cieux souffre violence » !

La Justice de Dieu voudrait donc que tout l’homme (qui abrite, sans l’avoir voulu, l’usurpateur) soit anéanti, puisqu’il est à première vue impossible de démêler qui est qui.

Mais l’Amour de Dieu, qui sait de toute éternité le Mensonge qui a fait perdre à l’homme son rang, veut le lui rendre, Dieu veut le restaurer dans son droit. Et c’est Jésus “Fils de l’Homme” – achèvement de l’Homme – Fils du Père Créateur – qui accepte de faire ce que le Père dans Son Amour désire.

J’ai toujours pensé que Dieu Amour Créateur avait prévu un autre plan pour élever ses enfants :

 « L’homme était naturellement bon (ce qui paraît une erreur grossière et même contradictoire aux yeux du bon sens – et à la plupart des regards et des consciences.) Néanmoins, c’est ainsi que Dieu l’avait créé. Mais Satan, l’ange de la chute, l’adversaire du Père, a brouillé les cartes, faussé la partie et jeté l’esprit-homme à la merci de la chair faible, faillible et inconséquente ». (Lettres de Pierre  Monnier - tome IV, p 455) - Tué à la guerre en 1914 il a envoyé pendant des années des lettres à sa mère par écriture automatique.

 (Dans le tome V, p : 121) Pierre Monnier dicte ceci à sa mère : Le Mal né de l’accouplement monstrueux du Prince des Ténèbres avec les âmes humaines. » !!!  « J’espère que vous avez compris ! On ne peut pas trouver « mieux » !  

Que va faire Lucifer en constatant le désastre ? Lui, chargé par Dieu de façonner l’homme à la ressemblance de son Créateur, en voyant ce qui vient d’arriver se sentira responsable et fera ce que ferait tout patron honnête d’une entreprise : prendre la malfaçon à son compte, pour couvrir son employé : Un chef ne se désolidarise pas de ses soldats. Lucifer est responsable, mais pas coupable – Il va endosser “l’erreur” et tomber avec – et à cause des anges révoltés. Il assume la responsabilité de leurs actes ; Il ira jusqu’au bout, ne voulant pas les rejeter, malgré son désespoir.

Michel, son alter ego, dont la troupe est restée fidèle à Dieu, par solidarité envers Lucifer, va essayer par tous les moyens de réparer les dégâts - (la Loi) - pour réconcilier le Ciel et la Terre, et pour faire reprendre sa place à son autre lui-même. Au cours de l’Histoire, il était venu en personne : Melchisédech, = Melchi : anagramme de Michel, (c’est évident), prêtre du Très Haut sans génération. Au temps d’Abraham, il est donc descendu sur la terre – pour amorcer la réhabilitation !!!

Lucifer prend sur lui le péché des anges – Jésus prend sur lui le péché des hommes, qui est arrivé par la faute des anges – Donc Jésus, à travers l’Homme reprend sur lui le péché de Satan. C’est le Mystère de la Substitution : (Le dictionnaire Larousse  est très clair : Se substituer = prendre la place d’un autre. En chimie : remplacer un atome, une molécule d’un composé, par un autre atome, une autre molécule, sans modifier la structure globale.) C’est la splendeur de : All shall be well ! (Julienne de Norwich).

 

Le Dragon des profondeurs est avant tout l’image de l’inconscient humain. Il contient tout : le noir et le blanc – (le Çà et le SurMoi.)

« Le Dragon des profondeurs, c’est en chacun de nous qu’il se terre (le Çà). Il faut l’épée de Feu de Saint Michel passant à travers le corps du Dragon pour éveiller l’Esprit (SurMoi). Force du Dragon transformée par la Lumière –  Force véhiculée par la Kundalini jusqu’au Surmoi – qui unifie le tout en Moi – en état d’éveil. » (Jean Markale).

 

En Luc 17 ; 20,21, Jésus dit aux pharisiens : “La venue du Royaume de Dieu ne se laisse pas observer, et on ne saurait dire : le voici ! Le voilà ! Car sachez-le, le Royaume de Dieu est en vous.

Le Royaume de Dieu est en vous : (SurMoi, Surconscient, Surnature). En cas de N.D.E, celui-ci nous devient accessible et nous ouvre la porte du Royaume. Car : en cas de “mort clinique”, le Moi étant dans le coma,  le Çà, ne peut, peut-être pas, survivre – ou il se sauve par lâcheté et va investir un nouveau-né (Ce qui expliquerait parfaitement le problème de réincarnation. En fait c’est le Cà qui se réintègre de corps en corps (poussière !), et qui forcément, garde tout l’acquis de ses incarnations premières. Les recherches faites à ce sujet trouvent une explication logique à la lumière de ce qui précède. “A la recherche de Bridey Murphy” est un exemple très clair : le sujet sous hypnose régresse dans “son” passé, jusqu’au point de changer de voix et de décrire des endroits et des faits bien précis datant parfois de plusieurs siècles auparavant. Puisque le sujet est endormi, il est clair que c’est le Cà qui répond à sa place. Idem pour les médiums etc.) -Quand quelqu’un meurt, il y a toujours un enfant qui en même temps vient au monde, cela est statistiquement prouvé – il ne reste alors que le SurMoi  (immortel) : et nos “morts”, quand ils sont obligés de rentrer dans leurs corps que disent-ils ? Tous la même chose : ils sont allés jusqu’à la Porte du Paradis, là où un Être de Lumière rayonnant d’un Amour indicible les a accueillis. Et ils reviennent – à regret – mais transformés : remplis de bonne volonté, de patience, tolérance, compréhension, compassion… ils n’oublieront jamais “ce qu’ils ont vu, entendu”.

 

Les Kéroubims : (chérubins) placés par Yahvé à la porte de l’Eden, pour en défendre l’accès = les C.R.S. placés aux portes de notre esprit (cerveau) pour empêcher celui-ci d’avoir accès à la Totalité des informations qui lui arrivent du Continuum Espace-Temps. Bergson semble être de cet avis quand il écrit : « L’esprit a des possibilités illimitées de “connaître”, indépendantes des sens, et le cerveau existe exclusivement “pour servir de filtre” à ces connaissances ; afin d’empêcher que parviennent jusqu’à l’esprit conscient toutes celles, parmi elles, qui pourraient faire obstacle au cours normal de la vie dans l’univers à trois dimensions.» 

 

Du livre “Le Diable” de Giovanni PAPINI édité en France en 1954.

La Chute de Lucifer et la Douleur de Dieu

Si Dieu est Amour, il doit, nécessairement être aussi douleur. Si l’amour est une communion parfaite entre celui qui aime et celui qui est aimé, il s’ensuit que toute peine, toute épreuve de l’être aimé assombrit et éprouve l’âme de celui qui aime. Si Dieu aime ses créatures comme un père aime ses enfants, –Il les aime infiniment plus qu’un père terrestre n’aime les enfants de sa chair – Dieu doit souffrir, et il souffre certainement de la souffrance des êtres que sa puissance a tirés du néant. Et si Dieu, par nature, est infini en tout, on peut croire que sa douleur est infinie, comme son amour.

Nous ne pensons pas assez à cette infinie souffrance de Dieu. Nous n’avons aucune pitié de ce tourment de Dieu. La plupart de ceux-là mêmes qui se reconnaissent ses fils, ne se soucient pas de comprendre ou de consoler l’affliction de Dieu qui est sans mesure…

…La condamnation de Lucifer a toujours été jugée éminemment juste. Mais ne s’est-il jamais trouvé quelqu’un, jusqu’à aujourd’hui, pour penser et sentir que cette condamnation condamne en même temps Dieu à la douleur ? Le châtiment de Lucifer devint aussitôt, sous une autre forme, le châtiment de Dieu.

Lucifer a été condamné à la peine la plus atroce : celle de ne pouvoir aimer … Dieu est condamné à une peine presque aussi cruelle : Il aime sans être payé de retour.

Cherchez – si vous avez un atome d’imagination, un embryon de cœur – à comprendre, à pénétrer, à concevoir le thème déchirant de cette “ Divine Tragédie”. Qui ne se prête pas à un tel effort et continue à voir en Dieu un excellent et placide vieillard fait pour distribuer des prix à ses serviteurs, n’est pas même arrivé encore sur le seuil du Christianisme.

Réfléchissez, Dieu, en vertu de sa Justice, peut condamner mais Il ne peut haïr. S’Il est, par essence, Amour, Tout Amour, il ne peut subsister en Lui le contraire de l’Amour qu’est la Haine.

 

25 novembre 1999 :

Lu ces jours-ci in “ Satan”  Études Carmélitaines, paru chez Desclée De Brouwer en 1948 ; livre acheté d’occasion il y a quelques années, et auquel je n’avais pas attaché grande importance, en fait je l’avais feuilleté, mais jamais lu : De la page 179 à la page 311 : “Réflexions sur Satan en marge de la tradition judéo-chrétienne” par Albert FRANK-DUQUESNE qui a écrit cela en 1947. Ecrivain qui de son propre aveu “ n’a jamais reçu une formation ecclésiastique ; ses études  n’ont jamais dépassé le premier trimestre de la seconde latino-grecque. Autodidacte.”  (J’ai moi-même arrêté mes études au premier trimestre de la première “moderne” en 1947). Je jure que je n’avais jamais eu connaissance de cet écrit, et c’est avec une stupéfaction qui n’a d’égale que ma jubilation que je viens de découvrir cette centaine de pages, tant chaque ligne m’apporte confirmation et renforcement de tout ce que j’ai pu écrire ci-dessus. C’est proprement incroyable – ou divinement providentiel.

Je retranscris ici quelques lignes de cet ouvrage (p : 302) Mais si l’humanité de Jésus doit sa justice à sa divinité, parce que la Personne même du Christ, étant divine, n’a pas, mais est, sa propre divinité, Adam, créé dans la justice, comment a-t-il pu contracter cette syphilis spirituelle (*je dirais plutôt : cancer spirituel) qu’il a transmise à tous ses descendants ?

– Par un contact, et par un contact atteignant et souillant les sources les plus intimes de la vie (spirituelle) ; Il y a donc un transmetteur premier de la pollution ontologique.

Réflexion après relecture de ce qui précède :

Les hommes ont peur de la mort, tellement peur qu’ils appréhendent d’en entendre parler. Les hommes redoutent même l’idée de la survie, et leur ego se pose le moins possible la question de l’existence immortelle. Combien de fois entendons-nous : il sera toujours temps d’y penser…

Il est tout à fait remarquable que les personnes qui ont connu une NDE en reviennent totalement libérées de cet effroi : elles sont allées aux portes de la mort et réintègrent leur corps en proclamant qu’elles n’ont absolument plus peur de mourir ! Cela tendrait à prouver qu’à la suite de leur coma leur Çà a disparu ! C’est donc bien le Çà qui provoque cet état d’esprit : la peur de la mort tient l’homme en esclavage.

La Vérité vous délivrera !

Genèse

Seigneur, donne-moi la Sagesse !

Dès le matin, de tout son cœur, le sage tourne son visage vers le Seigneur,

Il élève son âme vers le Très-Haut, il ouvre la bouche pour la prière,

Il supplie pour ses propres péchés, et s’il plaît au Seigneur tout-puissant,

Celui-ci le remplira de l’Esprit de l’Intelligence…

Alors, il méditera ses mystères cachés, et ainsi il acquerra la droiture du jugement.

Dans sa prière avec sagesse, il rendra grâce au Seigneur,

Et il mettra sa fierté dans l’accomplissement de sa Loi !

                   ADDENDA              

Quand je parle d’Adam et Eve, je ne nie absolument pas la théorie de l’évolution – Bien au contraire -. Il n’est que de lire : Genèse 4 ; 11-17, pour apprendre qu’en dehors d’Eden il y avait au moins le pays de Nod où Caïn trouva une femme capable de lui donner des enfants ! Mais, il m’apparaît également évident que ceci n’est pas incompatible avec cela. A savoir que notre Créateur – ou ses envoyés – a très bien pu quand il l’a jugé bon, intervenir à ce stade du processus d’évolution : Il a décidé d’insuffler l’Esprit dans sa créature jusqu’alors encore semi-animale et de cette façon la faire monter au stade de l’hominisation. Mais bien sûr, cela ne pouvait se faire d’un seul coup ; pas plus qu’un enfant qui sort de la “maternelle” ne peut rentrer à l’E.N.A. ! Le jardin d’Eden, n’est autre que le premier stade dans l’évolution spirituelle – un jardin d’enfant – un endroit privilégié où l’âme – le corps spirituel – du futur homme va pouvoir se développer selon les vues de son créateur : Devenir le parangon de ce que sera désormais l’Homme dans sa plénitude. Mais n’oublions pas, que Adam et Eve au jardin d’Eden étaient à ce moment, seulement en’’ formation’’ de corps spirituels –N’ayant pas eu de contact avec les non-évolués du ‘’dehors’’, ils étaient encore dans l’enfance de l’Esprit – « Ils étaient nus et ne le savaient pas » – Cela pourrait peut-être signifier qu’ils n’étaient pas pourvus de ‘’corps matériels’’ ? Sinon pourquoi est-il écrit que Yahvé “fit à l’homme et à sa femme des tuniques de peau et les en vêtit ‘’  … afin qu’ils deviennent semblables aux “cousins” vivant à l’extérieur ?…

L’Eden était une sorte de laboratoire destiné à faire évoluer la race, à la faire monter vers la spiritualité. Si l’on veut bien considérer sous cet angle le récit yahviste, il devient beaucoup plus compréhensible. Car cela veut bien dire qu’il y a eu dérapage dès le début, à cause du Jaloux : car l’homme spirituel était loin d’être prêt à revêtir le corps qui lui était destiné, ce corps matériel n’étant pas lui-même arrivé à sa plénitude, loin de là ! (Nous en sommes encore la preuve aujourd’hui !!!) Satan a précipité le processus, afin d’empêcher l’Homme ‘ce minus’ de devenir ce que son Créateur voulait qu’il soit

 - ce que lui, Satan, cet orgueilleux, ne pouvait tolérer : à l’image de Dieu ! Alors, ce fut la catastrophe ! Et comme Dieu ne peut pas tricher avec ses propres lois…

Tout cela est arrivé trop tôt ; beaucoup trop tôt. Certainement, dans le plan de Dieu notre Père qui nous aime comme on aime ses enfants, il n’y avait pas place pour cet accident – mortel. L’évolution devait suivre son cours avec un programme bien précis – Hélas ! Il fut faussé par l’Autre !...

       Adam et Eve ont donc été « chassés » du Paradis terrestre !... Ils ont été « transférés » sur une Terre ingrate et avec eux : en eux- le Serpent : le CA !!! Et Là (Ici sur notre planète) devenus comme les « hominiens », ils ont eu leurs fils : Caïn et Abel qui ont grandi comme tous les enfants… mais avec en eux  LE CA ! = Le Serpent qui lui aussi va faire « des petits » qui passeront d’un humain  à l’autre -  (mystère de la Génétique !)

       A cette lumière, nous pouvons relire le second récit de la Création et comprendre ce qui est arrivé. Après la « faute » des parents, Caïn est forcément déjà investi par Satan (et Abel probablement) : Et Yahvé le sait  car il dit à Caïn avant l’assassinat de son frère : Le « péché est tapi à ta porte » !!!

Ensuite, Caïn se plaint à Yahvé de ce que le châtiment encouru est trop lourd et ajoute : « je serai un errant parcourant la terre, mais le premier venu me tuera. » – (Cette réflexion prouve bien qu’il y a déjà des terriens – non spiritualisés – sur cette planète)

– Alors Yahvé  met un signe sur Caïn afin qu’il soit protégé, car Il sait qui a poussé Caïn à commettre ce crime !… Et Caïn partira chez les non-évolués, lui qui possède tout à la fois son Moi, son Cà et peut-être des traces de son Surmoi ?… Comme Nous jusqu’à Jésus !...

(Et juste retour des choses, avec la mort, conséquence de la chute, de même nous laissons notre corps matériel pour que puisse se dégager le corps spirituel qui est notre véritable identité immortelle.)

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Einstein disait : L’Imagination est plus importante que le Savoir !

Jean Guitton écrit : L’Imagination est bien supérieure aux autres connaissances !

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Jésus a dit : ‘’Dieu, personne ne l’a jamais vu !’’ 

Or : (Exode 33-11) Yahvé (Dieu) conversait avec Moïse face à face, comme un homme converse avec son ami… ???

Et : (Exode 33-18/23) Yahvé dit à ce même Moïse : Tu ne peux pas voir ma Face, car l’homme ne peut pas me voir et demeurer en vie !

Incohérence ou mauvaise traduction ? Ne vaudrait-il pas mieux écrire : Tant que l’homme est vivant, il ne peut pas voir ma Face !

Ou alors adopter ce que St Paul a dit : Moïse parlait avec un ange : (Michel ou Gabriel) ? Comme toujours St PAUL a raison !

Réflexion

 A l’intention de mes petits-fils de la part de Grannie.

En ce moment – et à tous les moments, depuis des milliards d’années, sans jamais arrêter – la terre tourne sur elle-même (comme une toupie) à la vitesse de : 40.000 km par jour, soit 1.665 km à l’heure, soit 27,75 km à la minute, soit presque un kilomètre toutes les deux secondes.

En même temps, elle se déplace en 365 jours autour du soleil dans une orbite elliptique dont le demi grand axe mesure environ : 149.600.000 km. (Ce qui doit donner une vitesse de déplacement de plus de 34.000 km/Heure ! De plus tout cet ensemble (et les autres planètes) "roulent" dans l’Univers à la vitesse de : (je ne le sais pas !) et j’arrête là les chiffres, ce n’est pas mon domaine !…

Mais je voulais te demander : Sens-tu quelque chose ? Éprouves-tu quelque chose ? Si tu roules en voiture, tu vois bien que tu bouges : tu es assis dans la voiture, tu es secoué, tu vois bien qu’elle avance, puisque le paysage change, tu peux même savoir à quelle vitesse la voiture roule, t’emmenant toi qui es immobile dans ce véhicule qui pourtant te déplace. Par contre, les pieds sur le sol de ta chambre, si tu restes parfaitement immobile, tu ne ressens même pas un petit frémissement, tant et si bien qu’il est impossible d’imaginer qu’en fait, tu es dans le véhicule "Terre" qui roule à toute allure. Comment le prouver ? L’eau dans ton verre ressent-elle cette vitesse et cette rotation ? Puisqu’elle ne bouge pas, elle ne peut rien prouver. – Alors, crois-tu que la terre tourne et roule, bien que tu ne puisses, par toi-même, le vérifier et en avoir la certitude ?

Tu le crois parce que l’on te l’a dit – les scientifiques en sont certains, grâce à leur science et leurs calculs – donc nous devons les croire et nous les croyons ! Il n’est pas question d’en douter.

Et bien, il y a des "scientifiques" de la Foi : les théologiens qui, grâce à la Révélation nous affirment que Dieu existe. En les croyant, tu fais une première démarche – acceptation –. À partir de cette acceptation, sans connaissance théologique spéciale, tu peux, en cherchant – positivement – mais uniquement avec ton Intellect, (les sens n’ont rien à voir avec le Surnaturel) adhérer plus profondément à cette croyance. Ton intelligence doit te servir non pas à comprendre Dieu – nul cerveau humain ne peut l’appréhender – mais à le concevoir – dans tout ce qu’il est – et surtout ce qu’il n’est pas – l’anthropomorphisme étant ce qu’il y a de plus difficile à surmonter.

" Dieu nous a créés à son Image " – Mais voilà : l’homme par sa nature "dénaturée" par la faute originelle qui l’a coupé de Dieu, essayant de le retrouver, ne peut se servir que de concepts inhérents à cette nature. Et ce n’est que sa propre image – anthropocentrique – qu’il arrive à rencontrer. C’est cela qu’il faut absolument dépasser : Être à l’Image de Dieu, c’est posséder une intelligence (une conscience, dans tous les sens de ce terme), un cœur pour aimer et la volonté de bien s’en servir. Il est vrai que l’homme – même sans "l’idée" de Dieu – possède ces trois choses. C’est ce qui le distingue réellement de l’animal : L’Intelligence pour connaître- Le Cœur pour aimer- la Volonté pour agir.

Dieu c’est la même chose à la "puissance infinie". Car il est infiniment cela. Potentiellement, nous sommes donc à l’image de Dieu, car nous avons en nous une étincelle de ce Feu Infini. Mais c’est à nous de faire grandir l’étincelle ; il ne faut pas laisser s’éteindre cette petite lumière. À nous d’avoir un peu plus de conscience, un peu plus d’amour. C’est possible à notre volonté si elle "se laisse faire" par la Grâce, (ce don surnaturel qui "restaure" notre nature dénaturée) que Dieu accorde à chacun de nous, afin que nous puissions Le retrouver. Mais ne jamais oublier qu’en fait, nous ne pouvons le retrouver que parce que c’est Lui qui nous cherche – qui vient nous re-chercher – sauver ce qui était perdu, coupé de Lui. C’est son Amour qui s’incarne en Jésus ; Jésus faisant la volonté d’amour du Père assume notre nature humaine jusqu’au bout en passant par la mort, et quelle mort ! Effaçant notre "dénaturation" et sa conséquence : la mort. Par sa résurrection il nous restitue notre vraie nature, nous remettant dans la condition première de notre création.

Judas

Que peut-on penser de la personnalité de Judas ?
Que savons-nous de lui ?

Faisait-il partie du groupe des Zélotes ? C’est à dire des nationalistes farouches, qui ne reculaient devant rien pour atteindre le but qui était pour eux légitime : libérer Israël de l'envahisseur romain ? Barrabas était l'un d'eux.

Pourquoi Judas a-t-il suivi Jésus ? Il a dû, lui aussi, se tromper en écoutant ses discours – révolutionnaires – car appelant à la Justice, la libération. Il dut être subjugué. Il voit en Lui le Chef, le Roi, qui va rendre au peuple sa liberté, sa dignité, sa puissance. Il ne comprend pas, pas plus que les autres d'ailleurs, que le discours de Jésus ne concerne pas "les affaires de ce monde"… Or les affaires de ce monde, Judas les connaît ; c'est même lui qui est chargé d'administrer le pécule du petit groupe – Pas un doux rêveur Judas, ses pieds sont solidement fixés au sol – Mais sa tête où est-elle ?

Pauvre tête de Judas ! La plupart du temps ça devait être une fameuse pagaille là-dedans… Rien qui ressemble au repos de Jean sur la poitrine du Seigneur – Torturé par l'ambition, l'idée de revanche sur l'envahisseur, le désir de s'affirmer... Au fur et à mesure que le temps passe, les déceptions s'accumulent et le doute s'installe : Jésus n'est pas ce qu'Il dit, c'est un fabulateur… un menteur peut-être !

Voilà Judas à l'affût, essayant de discerner dans les paroles de Jésus ce qui pourrait prouver ce que lui, Judas pense être la Vérité : tantôt une phrase semble le conforter, mais tantôt une attitude, une manière de dire ou de faire de Jésus, amènent de l'eau à son moulin… et le doute, serpent perfide et insidieux, lui remet la tête à l'envers.

Pauvre Judas ! Il n'a pas eu le temps de recevoir le Saint Esprit à la Pentecôte ; il aurait alors, comme les autres, tout compris ! Il n'a pas eu le temps, car ce fameux jeudi du dernier repas, nous dit l'Evangéliste : "Satan entra en lui" . Ce qui veut dire, je pense, que ses doutes se muèrent soudain en certitude. Satan n’est-il pas le père du mensonge – celui qui s'oppose – qui sème la discorde – qui divise ?

Pauvre Judas, sa Pentecôte à lui, fut celle du Diable, qui avec la malignité qu'on lui connaît, fit que dans la tête de Judas tout bascula… du côté de Satan ! Soudain Judas vit "clair" et sut avec certitude qu'il s'était fait "rouler"… Ce Jésus n'était qu'un imposteur, un roublard… mais il ne fallait pas qu'Il le prenne lui Judas, pour un imbécile… et pas plus tard que tout de suite, il allait le lui montrer à ce pauvre type !

Peut-être cette dernière phrase du Maître lui semble une vraie provocation : "Il y en a un parmi vous qui va me trahir" ; peut-être Judas y voit-il un défi : – S'Il dit cela devant les autres, c'est qu'Il pense que je n'oserai pas, c'est encore une façon de se protéger, car Il est très habile à ce jeu. Mais toi, Judas, tu vas lui montrer que tu as tout compris. Tous ces pauvres types peuvent continuer à gober toutes ses salades, moi, Judas, il ne faut pas me prendre pour un idiot. Ca suffit !…

Et il alla le livrer…

Pouvons-nous condamner Judas ? Une vertueuse indignation nous saisit ! Comment, ce sale type, ce traître, cet assassin ! Avoir commis un crime à nul autre pareil ! Celui qui ne le condamnerait pas doit être aussi salaud que lui !

Et pourtant, je pense qu'en le condamnant, nous nous condamnons nous-mêmes. Car, qui de nous peut dire qu'il n'a jamais été saisi par le doute – cet enfant de Satan – face à l'un d'entre ses frères humains ? – lointain ou proche – Qui n'a pas connu ces instants où Satan entre en nous, semant le doute, le muant ensuite en certitude, (c'est là une de ses plus habiles manœuvres) où il devient absolument évident que nous sommes en train de nous faire "rouler" par un salaud, mais que celui-ci ne doit pas nous prendre pour des idiots… Et de se dépêcher de dire autour de soi cette "vérité" qui nous paraît si limpide… qu'on ne peut même plus lui accorder le bénéfice du doute !

Sans cesse nous condamnons les autres sur de simples apparences. Et même si toutes ces apparences semblent nous donner raison – et que l'on puisse crier "haro sur le baudet", ne se trouvera-t'il donc personne pour avoir le courage de se regarder en face et dire : "A sa place qu'est-ce que j'aurais fait ?… "

Je n'aurais même pas pensé à aller me pendre !…

Même s'il est vrai qu'une fois sur deux, nous avons raison, sachons, n'oublions jamais que Satan se sert de ces apparences pour nous tromper ; qu'il va tout faire, tout accumuler pour que le doute qu'il a si habilement insinué, se transforme en triomphante certitude. Faisant ainsi, en plus de la zizanie qu'il sème, deux victimes du même coup.

De toute façon, si Judas n’avait pas livré Jésus, il aurait fallu trouver quelqu’un d’autre pour "Que Tout s’accomplisse!"

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